Le Vacherin Mont-d’Or a retrouvé toute sa saveur régionale

Patricia Michaud

C’est l’une des fiertés vaudoises et sa production est désormais 100 % locale: depuis 2021, les embléma­ tiques boîtes en épicéa renfermant le Vacherin Mont­ d’Or sont fabriquées à la vallée de Joux. Cette relocali­ sation, après dix ans d’«infidélités» de l’autre côté de la frontière, renforce le poids de l’AOP du célèbre fro­ mage, selon les porteurs du projet.

Son goût fruité et sa texture crémeuse font de sa dégustation une expérience culinaire intense. Produit artisanalement entre la mi­août et la mi­mars à la vallée de Joux (VD) et au pied du Jura vaudois, le Vacherin Mont­d’Or est l’un des fromages romands les plus connus. Sa célébrité, ce produit la doit no­ tamment à la boîte ronde en épicéa qui lui sert de cocon et le rend reconnaissable au premier coup d’œil dans le rayon frais des épiceries.

À la vallée de Joux, cette spécialité fait figure de fierté régionale, au même titre que l’horlogerie et la microtechnique. Il y a vingt ans, les membres de l’Interprofession du Vacherin Mont­d’Or – créée en 1999 afin de sauvegarder les intérêts de ce fromage et d’en défendre la production – ont obtenu la consécration ultime: une AOP (appellation d’origine protégée). Et pourtant, durant plus de dix ans, son si caractéristique – et sympathique – emballage a dû être produit hors de la région. Et même hors du pays, en France voisine. Certes avec du bois local – la forêt du Risoud, la plus grande d’un seul tenant en Europe, se situant à proximité de la frontière – mais dans un atelier français, le seul fabricant suisse de boîtes ayant pris sa retraite en 2010.

«Les années passant, la retraite arrivait également pour ce fabricant français», rapporte Pascal Monneron, gérant de l’Interprofession Vacherin Mont­d’Or AOP. Se posa alors sérieuse­ ment la question de la pérennité de l’approvisionnement en boîtes, ainsi que de la conservation d’un savoir­faire ancestral. En 2018, le comité de l’Interprofession a nommé une commis­ sion chargée de plancher sur la question. Etant donné que «l’utilisation de l’image de proximité et du travail artisanal sont primordiaux pour la communication à nos consommateurs», il a été décidé de faire d’une pierre deux coups et de relocaliser la production des boîtes dans la vallée de Joux, ce afin que l’en­ semble de la filière du Vacherin Mont-d’Or soit assuré sur place.

Financement public-privé

© regiosuisse

Une seule société de la région, une PME nommée Boîte du Risoud, était capable de reprendre la fabrication du pré­cieux contenant. «Elle maîtrisait déjà l’assemblage des divers composants de la boîte mais était dépendante de scieurs et de producteurs français», explique Magali Estève de la plateforme Star’Terre, qui a participé à l’accompagnement du projet de relocalisation. «L’idée centrale – qui avait d’ailleurs déjà émergé lors de l’enregistrement de ce fromage en tant qu’AOP – était que les affineurs puissent redevenir maîtres de toute la chaîne.» Parmi les principaux défis rencontrés figuraient ceux de «créer du dialogue entre les différents acteurs, de rapatrier le savoirfaire et de trouver des solutions concrètes en matière de sto­ ckage et de congélation». De congélation? «Oui, sinon le bois perd son humidité, donc sa souplesse.»

Devisé à près de 800 000 francs, le projet de relocalisation de la fabrication des boîtes en épicéa – via la création d’une Sàrl baptisée Valartibois – a été porté par huit des onze affineurs membres de l’Interprofession, ainsi que par la direction de l’en­ treprise Boîte du Risoud. Des coups de pouce financiers régio­ naux sont venus appuyer la démarche, notamment celui d’une fondation et du canton de Vaud. Le projet a également reçu un soutien dans le cadre des mesures pilotes NPR (Nouvelle poli­tique régionale) en faveur des régions de montagne, ainsi que d’autres aides fédérales. Bref, un financement public-privé avec un accent fortement local, comme on en rencontre de plus en plus souvent en terre helvétique.

Patrimoine forestier valorisé

Des machines datant pour certaines des années 1940 ont été installées dans les futurs locaux de Valartibois, situés à L’Abbaye. Ou plutôt réinstallées, puisqu’elles y avaient déjà servi par le passé. Elles permettent de confectionner les quatre com­ posants des boîtes à fromage – le couvercle, le fond et les deux targes (ou pliures) – à partir de grumes d’épicéas provenant du périmètre de L’AOP. Ces pièces sont ensuite transportées au Brassus, où elles sont assemblées. La capacité de montage quo­ tidienne de cet atelier est de 6000 boîtes. Pour mémoire, le Vacherin Mont­d’Or a la particularité d’être conservé dans un double emballage boisé: avant d’être glissé dans son contenant, il est ceinturé d’une sangle – elle aussi en épicéa – qui lui confère son goût si particulier.

Huit nouveaux postes ont été créés afin d’assurer en flux tendu la production annuelle des quelque 700’000 boîtes, soit environ 70% des contenants renfermant les 580 tonnes d’onctueux fromage fabriquées chaque saison. Dans la foulée, 300 m3 de bois sont valorisés. Justement, lors de la cérémonie d’inauguration de Valartibois en septembre 2021, aussi bien le syndic de L’Abbaye Christophe Bifrare que la députée au Grand conseil vaudois Carole Dubois se sont réjouis de la contribution de cette entreprise à la valorisation du patrimoine forestier régional. Il a été rappelé à cette occasion que chaque minute, 1 m3 de bois pousse dans le canton de Vaud.

Davantage de résilience

Certes, les fromagers doivent désormais débourser 3% de plus pour leurs écrins «made in vallée de Joux». Reste qu’en terme de marketing, ce sont non seulement les fabricants de Vacherin, mais aussi toute la région, qui profitent du retour au pays de la production des boîtes. «Cette relocalisation donne davantage de sens et de poids à l’AOP », estime Magali Estève. Par ricochet, il est possible de communiquer sur des valeurs «qui vont bien au­delà du côté local, puisqu’il est question de terroir, de patrimoine, de tradition, d’histoire».

Côté finances, près de deux ans après le lancement de Valartibois, quel est le bilan? «La société ne dégage aucun bénéfice», admet Pascal Monneron. «Par contre, étant donné qu’elle est gérée par les affineurs, donc par ses propres clients, ces der­ niers conservent la maîtrise du prix de revient de la boîte, ce qui constitue un sérieux avantage.» Magali Estève, elle, met le doigt sur un autre avantage économique de taille qu’offre cette relo­ calisation. «En permettant la maîtrise de toute la filière, on a rendu la chaîne de production plus résiliente; en cas de futurs chocs, elle sera mieux à même de résister.».

Projet NPR dans la base de données regiosuisse

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Les produits régionaux: une niche robuste qui a encore un potentiel de croissance

Pirmin Schilliger & Urs Steiger

Qu’y a­t­il derrière le succès des produits régionaux? Quelles sont leurs perspectives d’avenir? Ces deux questions et bien d’autres ont été discutées lors de la table ronde de «regioS» par une experte et deux experts: Eliane Kern, responsable de la communication et des événements de «Feld zu Tisch», une plateforme B2B de commercialisation de produits régionaux dans la région de Bâle; Peter Sta­ delmann, responsable des produits régionaux de la réserve de biosphère unesco de l’Entlebuch; et Urs Bolliger, directeur et responsable des marchés de Culinarium, association responsable de la marque «regio.garantie» en Suisse orientale.

Les taux de croissance élevés des produits régionaux au cours des dix dernières années témoignent d’une success story impressionnante. Quelle est la contribution des canaux de soutien de la Confédération à ce succès: Nouvelle politique régionale (NPR), projets de développement régional (PDR), politique agricole ou promotion touristique d’Innotour?

Urs Bolliger: Les marques affiliées à l’Association suisse des produits régio­ naux (ASPR), y compris notre marque Culi­narium de Suisse orientale, bénéficient surtout du programme de promotion des ventes de l’Office fédéral de l’agriculture (OFAG), en cours depuis 2001. Les projets de ce programme mettent l’accent sur des mesures de marketing et de communica­ tion. Entre 30 et 50% des fonds qui y sont investis proviennent de la Confédération.

Eliane Kern: Le soutien de l’OFAG au projet de développement régional (PDR) «Genuss aus Stadt und Land» est aussi déterminant pour la mise sur pied de «Feld zu Tisch».

Peter Stadelmann: La réserve de biosphère de l’Entlebuch fait d’abord partie de la politique des parcs, laquelle relève de la compétence de l’Office fédé­ ral de l’environnement (OFEV). Celui­ci n’aide certes pas les parcs à développer des produits, mais nous bénéficions aussi d’aides fédérales, par le biais des canaux de soutien de l’ofAG précités. Le soutien d’un PDR pour monter la plate­ forme de commercialisation Biosphäre Markt AG destinée à la région est particulièrement important. Sans l’aide éta­ tique, il n’aurait guère été possible de mettre cette organisation sur pied et de la positionner sur le marché.

Peter Stadelmann © regiosuisse

Quel est à ce jour votre plus grand succès régional?

Eliane Kern: Au cours des deux dernières années, nous avons réussi à construire un réseau dans la région de Bâle, notamment avec un format que nous appelons «speed dating» pour la vente directe régionale. Avec ce format, des productrices et des producteurs ainsi que des acheteuses et des acheteurs se rencontrent et font connaissance, de sorte que les relations commerciales directes s’établissent presque automatiquement. C’est à cette occasion par exemple que le magasin Lokal de Bâle, qui fait le com­ merce de produits régionaux, rencontre une productrice de tempeh de Liestal ou un producteur de pois chiches de Wens­ lingen, pour ne citer que deux exemples des nombreuses relations commerciales directes. Les tables rondes que nous orga­ nisons régulièrement pour perfectionner nos idées et nos outils rencontrent aussi un vif intérêt. En dialoguant avec les pro­ ducteurs et les acheteurs, nous prenons connaissance de leurs besoins immédiats, par exemple en matière d’exigences tech­ niques, et pouvons ensuite cibler d’autant mieux notre action.

Peter Stadelmann: Du point de vue de la réserve de biosphère de l’Entlebuch, la création de Markt AG constitue l’étape la plus importante des dernières années. Pour les producteurs régionaux, cette organisation est devenue un sésame déci­ sif pour faire affaire avec les grands distri­ buteurs. Un service centralisé est essentiel pour générer des ventes dans ce domaine. En fin de compte, les grands distributeurs ne souhaitent pas devoir négocier indivi­ duellement avec chaque fromager et chaque boucher. Le seuil d’accès à la col­ laboration s’abaisse nettement lorsqu’il y a un seul interlocuteur pour toute la région. À côté de ce succès plutôt organi­ sationnel, plusieurs autres réussites liées à un produit me viennent à l’esprit. Je pense par exemple au pur épeautre, que nous avons commencé à cultiver il y a 14 ans à l’initiative d’un transformateur. Depuis lors, cette culture est florissante dans la région, surtout parce que tous les ache­ teurs – donc le meunier, le boulanger, le fabricant de pâtes – et les consomma­ trices et consommateurs finaux sont prêts à payer le supplément que nécessitent tout simplement les coûts de production plus élevés à notre altitude.

Urs Bolliger: L’élément central et décisif de notre success story est la colla­ boration avec Migros, qui a lancé le pro­ gramme « De la région, pour la région» il y a déjà des années. Nous collaborons avec Migros Suisse orientale depuis 2003, tout comme les membres de notre organisa­ tion faîtière collaborent, au sein de l’Asso­ ciation suisse des produits régionaux (AsPR), avec les autres coopératives Migros de toute la Suisse. Je considère comme une étape très importante le fait que Migros ait défini la régionalité avec nous et que les directives soient respectées par tous les participants. Quand on regarde les statistiques des chiffres d’affaires, Migros est définitivement le véritable moteur des ventes avec son programme « De la région, pour la région».

Urs Bolliger © regiosuisse

Malgré tous les succès, vous avez aussi dû apprendre certaines choses à vos dépens. Dans quel domaine par exemple?

Urs Bolliger: La collaboration avec la restauration est plus difficile qu’avec le commerce de détail. La restauration a vraiment été bouleversée par toute l’his­ toire du coronavirus. Elle est en outre soumise depuis longtemps à une vio­ lente pression sur les prix, de sorte que nous nous creusons la tête sur la manière dont nous pourrions collaborer avec des charges acceptables. On trouve certes des restaurants qui travaillent beaucoup avec les produits régionaux depuis assez longtemps. Mais il y a mal­ heureusement un grand nombre d’éta­ blissements qui essaient de donner l’im­ pression par le biais de leur carte qu’ils misent un peu sur les produits régionaux. Si on y regarde de plus près, la plupart des offres sont tout sauf régionales.

Eliane Kern: La question de savoir comment nous pourrions mieux colla­ borer avec la restauration nous occupe aussi dans la région de Bâle. En outre, nous avons dû beaucoup apprendre à nos dépens lors du développement du logiciel pour notre plateforme B2B. Nous imaginions que ce serait plus simple et espérions pouvoir recourir à une solu­ tion existante. Nous nous retrouvons maintenant à devoir promouvoir un développement interne au niveau natio­ nal, donc une solution open source qui puisse également être utilisée par des porteurs de projets analogues. La dura­bilité et les coûts relativement élevés de la micrologistique alimentaire nous donnent aussi du fil à retordre.

Monsieur Stadelmann, où se si- tuent les obstacles dans l’Entlebuch?

Peter Stadelmann: Pour que la création de Markt AG ne devienne pas un obstacle, il a fallu de nombreux entre­ tiens et beaucoup de tact. Nous avons par exemple dû gagner à notre cause les fro­ mageries, qui avaient jusque­là agi en toute autonomie et créé leur propre petite marque. Cela signifiait que chaque fromagerie devait confier une grande part de la responsabilité com­ merciale à la nouvelle organisation, Markt AG, qui a ensuite repris la coordi­ nation et la vente. Ce changement est un processus long et difficile lors duquel tout ne fonctionne pas sans accroc. Notre présence commune signifie que l’entreprise individuelle doit mettre sa propre marque de côté et qu’elle doit soudain collaborer en matière de com­ mercialisation avec des entreprises qu’elle percevait jusqu’alors surtout comme des concurrentes.

Le fonctionnement avec la restauration est-il meilleur dans l’Entlebuch que par exemple en Suisse orientale ou à Bâle?

Peter Stadelmann: Non, travailler avec la restauration est aussi très pénible dans l’Entlebuch. La guerre des prix est violente et les nombreux petits producteurs de notre région ne par­ viennent pas toujours à couvrir la demande, par exemple lors de grands banquets. La disposition des restaura­ teurs et des clients à utiliser l’animal entier au lieu de ne manger que des steaks et des escalopes est en outre limi­ tée. Il faut en général une révision des conceptions pour qu’un bas morceau régional se retrouve parfois à la carte.

Eliane Kern: La sensibilité aux prix est effectivement déterminante dans la restauration pour décider où on achète en fin de compte les denrées ali­ mentaires. À cela s’ajoutent des critères comme la praticité et l’efficience du marché. Quels sont les cycles de livrai­ son? Quelle durée s’écoule entre la com­ mande et la livraison? Quelle est la dis­ ponibilité de l’offre? Avec quelle fiabilité et quelle efficience la chaîne d’approvi­ sionnement fonctionne­t­elle? Nous pouvons certes garantir pas mal de choses sur notre marché B2B, mais nous devons concéder que certains défis sont plus faciles à relever par un commerce plus grand que par une micrologistique.

Eliane Kern © regiosuisse

Existe-t-il des solutions judi- cieuses pour ces cas?

Urs Bolliger: On ne doit pas perdre de vue les relations. Les produits régionaux font certes l’objet d’un matra­ quage médiatique, mais les clients qui les demandent explicitement au restau­ rant restent une minorité. Nous parlons d’une part de marché totale des produits régionaux située entre 5 et 10 % sur l’en­ semble des canaux de vente. J’ai déjà observé plusieurs fois un phénomène sem­ blable avec le bio. Quand on demande au consommateur moyen: «Quelle est à votre avis la part du bio dans les ventes?», la réponse est «certainement 50% ». En réalité, la part de marché des produits bios se situe entre 15 et 18%. La percep­ tion du consommateur ne correspond pas à sa consommation effective. Je le remarque surtout lorsque je discute avec des boucheries qui ont aussi un service traiteur. Il semble certes souhai­ table d’avoir des produits régionaux dans cette offre, mais pratiquement per­ sonne n’est prêt à réclamer explicite­ ment la régionalité. Nous devons nous rendre compte que nous occupons une niche avec la régionalité. La solution devrait consister à se concentrer sur cette niche et à essayer d’y travailler avec succès à l’aide de concepts fiables. Mais nous ne pouvons pas nous attendre à ce que les arbres poussent jusqu’au ciel.

Les produits régionaux n’ont-ils donc que peu de chances sur le marché de masse?

Urs Bolliger: La bonne collabora­ tion avec Migros montre que nous pou­ vons tout à fait marquer des points dans le commerce de détail, tant en qualité qu’en quantité. Nous parlons ici d’un chiffre d’affaires d’environ un milliard de francs que Migros réalise mainte­ nant chaque année par le canal «De la région, pour la région». Or nous colla­ borons également avec d’autres détail­ lants. Le dernier exemple est Aldi Suisse avec la marque «Saveurs suisses». Nous sommes actuellement en pourparlers avec d’autres détaillants, et des possibi­ lités de vente supplémentaires se des­ sinent dans d’autres domaines. C’est ainsi que les cff ont remis au concours cette année l’exploitation de leurs quelque 4000 automates, à condition qu’au moins 10% des articles soient des produits régionaux. Le résultat est qu’un grand exploitant d’automates qui a reçu l’adjudication des cff pour les pro­chaines années nous a contactés. Il existe donc de nouveaux canaux de vente par lesquels encore davantage d’authenticité régionale peut parvenir au consommateur.

Madame Kern, comment évaluez- vous les possibilités de conquérir un marché plus large?

Eliane Kern: Nous cherchons actuellement le contact très ciblé avec la restauration collective. Réussir à accroître les ventes au niveau souhaité dans ce segment dépend toutefois de l’extension de notre infrastructure de production. On demande dans ce cas des produits préparés et donc plus commodes. Nous procédons à une mise en œuvre pro­ gressive et essayons de découvrir au moyen d’analyses de marché ce qui peut vraiment fonctionner.

Comment la réserve de biosphère de l’Entlebuch se positionne-t-elle sur ce marché plus large?

Peter Stadelmann: Si nous avions la recette pour conquérir le marché de masse avec les produits régionaux, je ne la dévoilerais pas. En fin de compte, notre travail consiste à ramer constam­ ment avec de petits projets. Le canton de Lucerne, centré jusqu’à présent sur l’élevage, lance depuis peu une cam­ pagne en faveur du bio et une offensive pour les cultures spéciales. Nous cher­ chons actuellement la collaboration dans ce domaine, tout en ayant conscience qu’il y règne une concur­ rence acharnée. De mon point de vue, il est essentiel d’essayer de placer au bon endroit sur le marché les produits parti­ culiers qu’une région peut proposer. L’Entlebuch est constitué d’herbages en zone de montagne 1 ou plus haute: nous sommes soumis à de fortes limitations en termes de diversité et de productivité. Il me semble d’autant plus important de penser à accroître encore la qualité plutôt que la quantité. Nous devons nous dé­ marquer avec nos produits régionaux de façon à être uniques à tous égards.

Les consommatrices et les consom- mateurs s’imaginent que «régional» est synonyme de circuits courts, de durabi- lité, de produits sains et souvent encore bios. Les productrices et les producteurs peuvent-ils répondre à ces attentes?

Urs Bolliger: Selon des sondages, les consommatrices et les consomma­ teurs n’attendent pas forcément du pro­ duit régional qu’il soit aussi «bio». C’est néanmoins un fait que le consomma­ teur voit parfois dans les produits régio­ naux des arguments positifs qui n’y sont pas. Les produits régionaux jouissent en principe d’une confiance très élevée, ce qui nous oblige au plus grand soin. Les prestations écologiques requises (PER), telles qu’elles sont stipulées en détail dans les directives sur les marques régionales, sont déterminantes pour les critères de qualité de tous les produits regio.garantie.

Eliane Kern: Nous constatons que certains produits régionaux sont expé­ diés à l’échelle nationale. Cela ne signi­ fie pas forcément que ces produits sont moins durables, car d’autres critères, tels que réfrigération, pèsent beaucoup plus lourd dans un bilan CO2 que les kilomètres parcourus. Nous travaillons néanmoins à nous améliorer dans tous les domaines de la durabilité. Cet aspect est et reste un défi important qui requiert un changement de système, lequel ne se produira pas simplement d’un jour à l’autre.

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Petit-déjeuner de la région pour les clients des hôtels

Pirmin Schilliger

Le petit-déjeuner suisse ne se limite pas au muesli: les établissements hôteliers qui misent sur les produits frais régionaux et les spécialités locales pourraient marquer des points auprès de leurs clients grâce à des expériences gustatives et sensorielles incomparables.

C’est avec cet objectif que l’association professionnelle HotellerieSuisse, la Société suisse des cuisiniers (SSC), l’École hôtelière de Thoune et le Culinarium Alpinum, un centre de compétence en restauration régionale alpine à Stans (NW), ont lancé en 2021 un projet Innotour d’une durée de deux ans. La Confédération l’a soutenu à raison d’environ 100 000 francs. L’une des huit entreprises participantes était l’hôtel destiné aux séminaires de la Chartreuse d’Ittingen en Thurgovie. Son directeur Valentin Bot déclare: «Presque tout est fait maison dans notre buffet du petit-déjeuner.»
La plupart des ingrédients qu’utilise cet hôtel trois étoiles proviennent de paysans de la région ou directement de son propre domaine de cent hectares. Il confère à la chartreuse un haut niveau d’autosuffisance, avec sa boulangerie, sa fromagerie et sa boucherie.

Afin de faciliter l’accès des hôtels participants au petit-déjeuner régional, les étudiants de l’École hôtelière et de l’école professionnelle ont élaboré des bases théoriques lors de la première phase du projet. Ils ont inventorié les spécialités disponibles dans les différentes régions, analysé l’offre et la demande et réalisé des analyses commerciales. Les établissements pilotes devaient ensuite montrer à quoi pourrait ressembler leur propre petit-déjeuner régional. Le résultat de leurs efforts est un aperçu étonnamment diversifié du paysage des petits-déjeuners suisses. Chaque restaurant trouvera dans une brochure toutes les informations nécessaires pour surprendre ses hôtes par une cuisine régionale dès le petit- déjeuner.

La version complète est disponible en allemand et en italien.

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La mobilité dans une destination durable

Pirmin Schilliger

Dans la région de vacances Engadine-Samnaun-Val Müstair, la mobilité durable constitue un facteur d’attractivité important et un signe distinctif touristique. C’est dans ce sens que la région a lancé une série de projets pionniers et pilotes au cours des dernières années. Selon leur objectif, ces projets sont soutenus par la NPR, Interreg ou Innotour. L’ouverture du tunnel de la Vereina par les Chemins de fer rhétiques en 1999 a constitué un saut quantique en termes de desserte de la région à grande échelle. Depuis cette date, l’organisation de marketing touristique Tourismus Engadin Scuol Samnaun Val Müstair AG (TESSVM) et la Regiun Engiadina Bassa / Val Müstair (EBVM), responsable du développement régional, s’efforcent avec les communes d’améliorer aussi les offres de mobilité à l’intérieur de la région. La dernière démarche en ce sens a eu lieu en 2022 avec la carte d’hôte qui permet à tous les vacanciers de circuler librement dans les transports publics régionaux. Dans sa version PLUS, cette carte donne aussi le droit de se déplacer dans l’espace frontalier des trois pays que sont la Suisse, l’Autriche et l’Italie, par exemple à destination de Mals (Val Venosta, Tyrol du Sud) ainsi que de Nauders et de Landeck (Tyrol) en passant par le col de Resia ou le col de l’Ofen. Depuis plus de dix ans, la région de vacances s’occupe aussi du transport des bagages pour ses hôtes sur le « dernier kilomètre », donc entre la gare et l’hôtel ou l’appartement de vacances.

© regiosuisse

En Basse-Engadine, les offres principales du tourisme estival incluent des itinéraires cyclables et des chemins de randonnée sur une longueur de plus de 2300 kilomètres. En coordination avec le projet cantonal graubünden bike soutenu par la NPR, la région développe diverses offres destinées aux cyclistes et aux randonneurs avec le master plan VTT TRAI(L)S VALS. Un autre projet se consacre aux infrastructures dédiées aux vélos électriques, notamment au développement d’un réseau de stations de recharge des batteries.

Les efforts visant à rendre la mobilité plus durable portent leurs fruits. Aujourd’hui, un vacancier sur quatre se rend en Basse-Engadine en transports publics. C’est un pourcentage relativement élevé, mais le véritable objectif est encore loin d’être atteint. Les deux organisations TESSVM et EBVM ont attribué à la mobilité durable le statut de mission stratégique permanente.

engadin.com/fr/cartes-hôtes

regiunebvm.ch

tourcert.org

regiosuisse.ch/fr/base-de-donnees-des-projets

Vous trouverez ici la version complète en allemand.

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Le covoiturage pour mieux desservir les zones rurales

Patricia Michaud

L’équation «participation sociale = véhicule privé» a la dent dure, surtout dans les zones rurales. Deux expériences pilotes suisses lancées dans le cadre d’Interreg Alpine Space – et de son projet MELINDA – visaient à changer les habitudes, en se basant sur le covoiturage et les nouvelles technologies.

Réduire l’empreinte écologique liée aux déplacements en privilégiant une mobilité multimodale, c’est bien. Planifier cette évolution en se basant sur les habitudes et les besoins effectifs des usagers, c’est mieux. Grâce aux nouvelles technologies, il est désormais possible d’avoir accès à une multitude d’informations et de les faire circuler en temps réel. Interreg Alpine Space, un programme soutenant des projets de coopération entre les pays de l’espace alpin, souhaite mieux intégrer le potentiel offert par la récolte et l’exploitation de données afin d’encourager le développement d’une mobilité plus verte et durable, que ce soit dans les villes ou les zones rurales.

Lancé en 2018 et achevé en 2021, le projet MELINDA (Mobility Ecosystem for Low-carbon and INnovative moDAl shift in the Alps) visait à soutenir activement les citoyens et toutes les parties prenantes dans leurs efforts en matière de mobilité du futur. La meilleure intégration des données, tout particulièrement au niveau transnational, en était l’un des points centraux. Concrètement, ce projet doté d’un budget total d’environ 2 millions d’euros avait pour but d’améliorer la connaissance des facteurs qui influent sur le changement de comportement en matière de déplacements bascarbone. Il était articulé autour d’une série de projets pilotes en France, en Italie, en Slovénie, en Allemagne, en Autriche et en Suisse.

C’est la Haute école spécialisée de Lucerne (HSLU) qui s’est chargée du volet helvétique de MELINDA, à travers deux projets pilotes. Ils ciblaient des zones rurales dont les transports publics se caractérisent par une cadence peu soutenue, des horaires limités et des parcours indirects, ce qui a pour conséquence un taux particulièrement élevé de véhicules personnels dans la région. Dans les deux cas, l’idée centrale consistait à encourager aussi bien les collectivités publiques que des entreprises privées à s’engager pour le covoiturage.

Le financement de ces projets était porté par des partenaires cantonaux, des sociétés de transport, ainsi que la Nouvelle politique régionale de la Confédération. Rimant respectivement avec l’introduction de Taxito à Maladers (GR) et de HitchHike dans le parc naturel Thal (SO), ils cherchaient tous deux à tester des modèles permettant potentiellement d’augmenter l’accessibilité aux régions rurales, tout en réduisant la dépendance de la population locale aux véhicules motorisés privés.

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Un smartphone et quelques francs

Le carpooling, qui consiste à créer des communautés de conducteurs et de passagers, peut contribuer à réduire les émissions globales de CO2. Les nouvelles technologies – et surtout la généralisation de leur utilisation par la population – facilitent grandement la mise en lien entre les diverses parties prenantes au covoiturage. Reste qu’à l’heure actuelle, ce modèle de transport est utilisé de façon marginale en Suisse, du moins pour les déplacements quotidiens.

Entre Coire et Maladers, le système de ridesharing Taxito a été mis sur pied afin de pallier l’absence de transports publics dans certaines zones et d’offrir une alternative aux taxis. Ce système consiste à placer des panneaux à des endroits stratégiques, créant des espèces d’arrêts où les véhicules privés peuvent venir charger des voyageurs ayant au préalable indiqué leur destination par sms. Une modeste contribution financière est demandée aux passagers, qui peuvent la régler via leur téléphone portable. À noter que Taxito est davantage adapté aux déplacements occasionnels qu’aux trajets pendulaires. Quant à HitchHike, le service privilégié dans le parc naturel Thal, il s’agit d’une plateforme mettant en lien des personnes effectuant régulièrement un trajet similaire et leur proposant des lieux de rendez-vous sous la forme de places de parc. Une fois le contact initial établi, les conducteurs et les passagers communiquent directement entre eux.

Dans un rapport, la HSLU rappelle que le parc naturel Thal englobe neuf communes totalisant quelque 15 000 habitants répartis sur près de 140 km2. L’offre existante en matière de transports publics ne parvient ni à rendre la région aisément accessible aux personnes ne disposant pas d’un véhicule privé, ni à fluidifier le trafic dans le secteur, dont les routes sont régulièrement sujettes aux bouchons aux heures de pointe. C’est en juin 2019 que HitchHike a été introduit dans la région, via une sous-plateforme de www.hitchhike.ch. Chaque commune de la région concernée a été équipée d’un point de rencontre entre conducteurs et passagers. Ces derniers réglaient entre eux la question d’un éventuel défraiement. À noter qu’il s’agissait de la première utilisation publique de HitchHike, une plateforme créée en 2011 essentiellement à l’intention des organisations.

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Scepticisme et inclusion

Responsable du dossier MELINDA auprès de la HSLU, Timo Ohnmacht rapporte que le volet suisse du programme «visait à sortir de l’équation ‹participation sociale en zone rurale = véhicule privé› ». En effet, alors que la mobilité est considérée comme un axe central de cette participation, «un argument un peu simpliste consiste à justifier l’utilisation des voitures individuelles en invoquant l’égalité entre tous les habitants du pays, qu’ils vivent ou non en ville». Ce que le sociologue des transports et son équipe ont observé, c’est qu’il est relativement facile de mettre en place un projet tel que celui du parc naturel Thal, «que ce soit techniquement ou politiquement». Constat moins réjouissant, «nos résultats montrent que l’introduction de systèmes de covoiturage dans des zones rurales n’est pas une baguette magique, qu’il ne s’agit que d’une goutte d’eau dans l’océan».

En effet, «le nombre d’utilisateurs reste très faible et ne suffit en aucun cas à réduire de façon substantielle les émissions de CO2». Pour avoir un impact sur le changement climatique, il faudrait faire drastiquement augmenter le recours à ces services de carpooling, ainsi qu’à toutes les alternatives au trafic routier. «Mais on ne peut pas se contenter de lancer des nouveaux outils et d’informer la population; parallèlement, il faut de la gouvernance, des règles pour restreindre l’attractivité des véhicules privés.» Timo Ohnmacht relève néanmoins que serrer la vis en zone rurale «est délicat, car contrairement aux zones urbaines, les alternatives sont moins nombreuses pour les usagers», ce qui fait planer le risque de discrimination évoqué plus haut.

Certes, les projets testés en Suisse dans le cadre de MELINDA laissent le spécialiste de la hslu sceptique en matière de contribution environnementale, du moins en ce qui concerne le futur proche. Sur d’autres plans, les résultats sont néanmoins prometteurs. «Je pense par exemple aux jeunes qu’il est possible d’emmener jusqu’au prochain arrêt de rer; ou à certaines femmes qui, pour des questions de sécurité, préfèrent rester chez elles que de ‹lever le pouce›, l’autostop étant parfois la seule option dans une région donnée.» Un pas en avant intéressant en matière d’inclusion. D’ailleurs, aussi bien Taxito que HitchHike sont en pleine expansion. Alors que le premier est désormais disponible dans six régions de Suisse – sous la forme de 38 arrêts –, le deuxième vient d’étendre son offre hors des frontières, via le portail www.sayhi.eu.

alpine-space.eu/project/melinda

regiosuisse.ch/fr/base-de-donnees-des-projets

taxito.ch

hitchhike.ch

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Guide numérique des offres de promotion économique

La promotion économique de la Confédération soutient la place économique suisse par le biais d’un large éventail d’offres de soutien et de promotion destinées aux entreprises et à d’autres organisations. Jusqu’à présent, les utilisatrices et les utilisateurs de ces offres étaient confrontés au défi de trouver rapidement la solution qui leur convenait. Le «Panorama de la promotion économique», nouvel outil interactif de conseil, a pour but de faciliter cette démarche: il suffit de quelques clics pour trouver les offres pertinentes. Ce guide numérique complète les rubriques existantes du site Internet du SECO. La palette actuelle comprend seize instruments de soutien et environ cinquante offres différentes.

promotion.guide/fr/

Mobilité durable dans les régions

Pirmin Schilliger & Urs Steiger
La mobilité joue incontestablement un rôle important pour le développement régional. Dans notre économie fondée sur la division du travail, l’accessibilité des espaces tant urbains que ruraux constitue un facteur décisif d’implantation.
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Avec les programmes de développement stratégique (PRODES) des routes nationales et de l’infrastructure ferroviaire ainsi qu’avec les fonds de financement dédiés, la politique des transports fournit l’infrastructure de base. Elle soutient aussi le développement de solutions de transport et de mobilité durables par une série de programmes de promotion tels que le Programme en faveur du trafic d’agglomération (PTA), la Nouvelle politique régionale (NPR), Interreg, les projets-modèles pour un développement territorial durable (MoVo), Innotour ou le Bureau de coordination pour la mobilité durable (COMO). «regioS» esquisse ci-dessous les défis que pose le développement de solutions de transport et de mobilité porteuses d’avenir et décrit l’éventail des instruments de soutien à la disposition des acteurs régionaux.

Dans la société interconnectée à l’échelle globale, un système de transport performant et facile d’accès est incontestablement un avantage économique décisif et un facteur de compétitivité. Sans desserte efficace, les régions perdent rapidement l’accès aux centres et vice-versa. Avec l’engagement politique en faveur de l’occupation décentralisée du territoire, conformément à la loi sur l’aménagement du territoire (lat), la desserte des régions jouit d’une importance politique et sociale particulière qui contribue à la cohésion du pays au-delà de toutes les barrières sociales et culturelles. Selon le Plan sectoriel des transports, qui expose la stratégie de mobilité du Conseil fédéral, toutes les régions doivent «se développer dans une juste mesure».

Une mobilité qui garantisse l’égalité des chances en Suisse n’est pas simplement une belle promesse, mais un besoin national, que ce soit dans les villes-centres, les agglomérations, les espaces ruraux du Plateau ou les régions de montagne. «Ce n’est pas par hasard que la Suisse dispose aujourd’hui de l’un des réseaux de transport les plus denses au monde, avec environ 83 300 kilomètres de routes et 5200 kilomètres de lignes de chemin de fer», commente Nicole A. Mathys, cheffe de la section Bases à l’Office fédéral du développement territorial (are). Il n’y a guère de localités du pays qui ne soient pas desservies par les transports publics (TP). Le car postal se rend même chaque jour et au moins toutes les deux heures à Juf (GR), le village le plus haut d’Europe, qui compte quelque trente habitantes et habitants.

La population suisse fait grand usage de ces offres étendues: huit personnes actives sur dix font la navette entre leur domicile et leur lieu de travail durant environ une heure par jour ouvrable en moyenne. Le trafic de loisirs est encore plus important puisqu’il est responsable de près de la moitié (44 %) des distances quotidiennes parcourues, selon le microrecensement mobilité et transports (mrmt). Que ce soit pour travailler ou pour se divertir, la mobilité va en tout cas de soi pour la société moderne. Or les routes, les voies ferrées, les chemins et les moyens de transport d’aujourd’hui n’ont pas simplement jailli du sol, mais ont été construits au cours des décennies. Ils sont le résultat d’innombrables efforts à la croisée du territoire, de la technique, de la science, de la société et de la politique.

La tâche est extrêmement complexe

Développer les transports et la mobilité de manière pertinente pour l’avenir est une tâche complexe. Les «Perspectives d’évolution du transport 2050» du Département fédéral de l’environnement, des transports, de l’énergie et de la communication (detec) se fondent sur au moins sept tendances déterminantes, environ trois douzaines de facteurs d’influence essentiels et plus de cent variables. «Logiquement, de nombreux acteurs de la Confédération, des cantons, des régions et des communes sont associés à la conception de solutions de transport et de mobilité», observe Nicole A. Mathys, ce qui requiert des connaissances spécialisées dans différents domaines tels que transports, développement territorial, environnement, logement et énergie. Au niveau national, les transports relèvent de la compétence du detec. Mais les cantons et les communes ont aussi des obligations, surtout en matière de construction et d’entretien des routes cantonales et communales, de transports publics de proximité et régionaux ainsi que de développement de la mobilité douce. Pour développer une mobilité durable et porteuse d’avenir, il est demandé à tous ces intervenants d’harmoniser au mieux tous les intérêts de la société et de l’économie en tenant compte du développement territorial et de l’environnement.

Les Perspectives 2050 esquissent, à l’aide de différents scénarios, la direction dans laquelle la mobilité et les transports pourraient évoluer en Suisse d’ici à 2050 (voir encadré). Il semble clair que les transports dans leur ensemble continueront d’augmenter, mais plus lentement que la population. Les limites de capacité sont déjà atteintes aujourd’hui à différents endroits. Selon le Plan sectoriel des transports, les capacités de transport pour les personnes et les marchandises doivent donc à l’avenir être exploitées de manière plus efficiente et développées ponctuellement. Des améliorations énergétiques sont en outre nécessaires dans tous les systèmes de transport pour réduire à zéro net les émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2050 et ainsi lutter contre le changement climatique. Un processus de transformation est indispensable pour y arriver. «Les offres de mobilité du futur doivent devenir plus durables, plus transparentes, plus flexibles, plus interconnectées, plus confortables, plus conviviales et justement neutres en CO2», souligne Nicole A. Mathys. Il faut en outre réduire le transport individuel motorisé (tim) et développer encore les transports publics (TP).

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Amélioration de la mobilité – avec moins de trafic

Il y a en Suisse de nombreuses possibilités de soutien dans le domaine de la mobilité durable, comme le démontre l’aperçu des programmes de soutien. Ceux-ci ne se concentrent pas, au niveau régional, sur de grands projets d’infrastructure tels que le tunnel du Rosenberg sur l’A1 à Saint-Gall, l’aménagement du tronçon ferroviaire du pied du Jura ou l’acquisition de nouveaux moyens de transport – car ces projets relèvent en priorité de la compétence de la Confédération dans le cadre de la politique des transports. Les efforts de promotion régionaux soutiennent surtout de nouvelles solutions de mobilité et offres de prestations qui visent à optimiser les systèmes existants. Ils concernent aussi bien le trafic professionnel et pendulaire que le trafic touristique et de loisirs. «Des initiatives de réduction du trafic et de modification des comportements sont nécessaires, en faveur d’un développement des pistes cyclables et des chemins pour piétons ainsi que d’un report vers les TP», explique Nicole A. Mathys. À cela s’ajoutent des mesures d’aménagement du territoire qui accroissent la qualité résidentielle et l’attractivité du milieu bâti et permettent ainsi à la population de couvrir la majeure partie de ses besoins vitaux dans son environnement immédiat. Les besoins de mobilité, qui continuent malgré tout de croître avec le bien-être, devraient être couverts de manière non seulement plus efficiente, mais aussi plus propre et plus respectueuse de l’environnement.

Le défi majeur de l’aménagement est de faire concorder les intérêts de tous les participants et d’unir leurs forces pour travailler à un développement cohérent. En complément de la planification générale des transports au niveau fédéral (prodes RN, prodes rail et projets d’agglomération) financés par le fonds d’infrastructure ferroviaire (fif) et le fonds pour les routes nationales et le trafic d’agglomération (forta), tous les cantons disposent de leurs propres stratégies de mobilité, plans directeurs et instruments de planification. Lucerne fonde par exemple la mise en œuvre sur le programme de construction des routes cantonales, le rapport sur les TP et la planification cantonale en matière de vélo. Il est prévu maintenant de réunir tous ces instruments dans un nouveau «programme de mobilité globale», afin que le canton puisse coordonner son action avec les régions et les communes. «Dans tous les organismes et à tous les niveaux mentionnés, un consensus de fond se dessine en faveur d’une planification de la mobilité porteuse d’avenir, selon la devise: éviter le trafic, le transférer, le gérer et l’interconnecter en respectant l’environnement», constate Nicole A. Mathys.

Priorités variables

Les priorités de mise en œuvre diffèrent en fonction de la région et du type de trafic: les mesures de lutte contre les pointes de trafic et les périodes de congestion restent un objectif central des villes et des agglomérations. Dans de nombreuses communes du Plateau, que ce soit Niederbipp (BE), Obergösgen (SO) ou Winznau (SO), les défis majeurs sont en revanche le trafic pendulaire et la planification de l’urbanisation. Selon une analyse de Pricehubble, entreprise spécialisée dans les données immobilières, ces trois localités sont représentatives d’une évolution qui peut être observée à de nombreux endroits de Suisse: bien qu’elles se situent en pleine campagne, elles deviennent de plus en plus des communes de pendulaires, grâce à des maisons relativement bon marché et à la proximité de Zurich (une heure de trajet au maximum). Il est aussi avantageux de travailler à Bâle et d’habiter dans le Jura, par exemple à Haute-Sorne, à Moutier ou à Develier. Une dynamique de mobilité et d’urbanisation similaire s’est aussi emparée des banlieues de certains centres intra-alpins tels que Viège ou Saint-Moritz. En haute saison, les grandes destinations touristiques alpines se voient en outre confrontées à des problèmes analogues à ceux des agglomérations et des villes: congestion et parkings saturés. Les régions de montagne périphériques et les vallées latérales reculées font face quant à elles à un défi tout autre: elles luttent contre l’exode et pour le maintien de la desserte par les TP.

Il n’est pas possible à l’heure actuelle de prévoir quels choix politiques futurs accéléreront encore la transformation de la mobilité en direction de la durabilité. Le levier majeur est sans aucun doute le trafic routier, qui occasionne actuellement environ un tiers de la consommation d’énergie. Le taux de motorisation de la Suisse est élevé avec environ 550 voitures pour 1000 habitantes et habitants et l’efficience énergétique vraiment mauvaise. Ceci qui est dû principalement aux nombreux véhicules puissants qui transportent la plupart du temps une seule personne. Les émissions de CO2 moyennes des voitures neuves en Suisse sont aujourd’hui parmi les plus élevées d’Europe.

«Nous serons obligés de rendre le trafic routier plus efficient au plan énergétique et plus respectueux du climat», Nicole A. Mathys en est convaincue. Avec la première étape de la «feuille de route pour la mobilité électrique », la Confédération souhaite qu’environ la moitié des nouvelles voitures immatriculées soient équipées d’une propulsion électrique ou hybride d’ici à 2025. Un autre poten­ tiel largement inexploité est la gestion des transports fondée sur des données pour une utilisation plus efficiente des moyens et des infrastructures de transport. «Le domaine du trafic individuel motorisé (tim), qui occasionne actuellement 70 % des coûts externes des transports, soit environ 14 milliards de francs par année, présente encore un potentiel d’optimisation important», fait remarquer Nicole A. Mathys. Toutefois, l’électrification visée du parc suisse de véhicules ne résout au mieux qu’une partie du problème. En fin de compte, les véhicules électriques participent aussi aux embouteillages, ont besoin de routes et, bien sûr, d’électricité dont la production n’est de loin pas toujours propre.

Promouvoir des solutions de mobilité innovantes

Les principaux instruments de l’infrastructure de mobilité sont les programmes de développement stratégique des routes nationales (PRODES RN) et de l’infrastructure ferroviaire (PRODES rail). Leur financement est assuré par le fonds d’infrastructure ferroviaire (FIF), avec un volume de 19,3 milliards de francs pour les deux étapes d’aménagement 2025 et 2035, et par le fonds pour les routes nationales et le trafic d’agglomération (FORTA), avec un volume de 11,6 milliards de francs d’ici à 2030 pour les routes nationales (PRODES RN) et de 7,18 milliards de francs de 2008 à 2023 pour le trafic d’agglomération, puis d’environ 1,6 milliards de francs dès 2024 pour la quatrième génération de projets. Ces instruments contribuent beaucoup à la desserte des régions, mais ils aident aussi les acteurs à accélérer la transition vers une mobilité durable et à développer les solutions innovantes nécessaires à cet effet.

Les instruments de la politique des transports axés sur l’infrastructure sont complétés par des instruments de promotion et des programmes qui affinent et soutiennent ce processus au niveau régional.

Programme en faveur du trafic d’agglomération (PTA)

C’est par le biais de ce programme que la Confédération parti cipe au financement de projets de transport qui visent à amélio rer le trafic d’agglomération. Le soutien porte en priorité sur l’extension des capacités des TP, sur l’électrification des moyens de transport, sur une meilleure interconnexion par le biais d’interfaces de transport, et sur des infrastructures de mobilité piétonne et cycliste sûres et attractives. Les mesures de modéra tion du trafic et d’apaisement des quartiers, les zones de rencon tre et les désengorgements ciblés des centres jouent un rôle décisif dans les projets du trafic individuel motorisé (TIM). Le périmètre du soutien comprend des communes éligibles organisées en entités responsables. Il inclut les agglomérations alpines de Coire, Davos, SaintMoritz, Altdorf, Glaris, Oberwallis (Brigue, Viège, Naters), Valais central (Sion, Sierre, Crans Montana), Coude du Rhône (Martigny) et Chablais (Monthey, Aigle, Bex), ainsi que les zones de programmation Interreg des régions frontalières.

Le PTA est le poids lourd financier des programmes de soutien. Lors de la consultation sur la quatrième période de programmation, la Confédération s’est prononcée en faveur d’un financement de 1,6 milliard de francs au total (cofinancement de 37 %). Les can tons, les villes et les communes y participent ensemble à raison de 2,7 autres milliards de francs (63 %). Le PTA déploie ses effets en priorité dans la Suisse urbaine. Avec des solutions de mobilité qui touchent le trafic pendulaire ou de loisirs, il rayonne toutefois loin à la ronde dans les espaces ruraux et les régions de mon­ tagne. Les projets PTA démontrent que, dans un petit pays comme la Suisse, les effets des mesures relatives aux transports se développent au­delà des agglomérations elles­mêmes.

➜ Exemples de projets (de la période de programmation actuelle):

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Nouvelle politique régionale (NPR)

La NPR, gérée par le Secrétariat d’État à l’économie (SECO) en colla­ boration avec les cantons, soutient des projets de transport et de mobilité qui contribuent concrètement à la compétitivité des régions – par exemple dans le tourisme. La Confédération et les cantons parti­ cipent chacun pour moitié aux projets NPR. De nombreux projets de mobilité sont lancés dans le cadre d’une politique de desserte par les transports qui fait partie de la stratégie de développement régional.

➜ Exemples de projets: extension du réseau et de l’infrastructure

Programmes Interreg

Interreg, auquel la Suisse participe via la NPR dans les espaces transfrontaliers, poursuit des objectifs semblables à ceux de la NPR. Les projets de transport et de mobilité constituent une prio­ rité claire de son soutien, notamment dans les quatre régions frontalières qui coopèrent de plus en plus: Suisse du Nord­Ouest – Allemagne – France, Genève – Suisse romande – France, région du lac de Constance – Allemagne – Autriche ainsi que Tessin – Grisons – Valais – Italie.

➜ Exemples de projets:

Attila Kartal dans l’atelier de Rent a Bike AG à Willisau (LU). Les services renforcent le vélo comme moyen de transport tant quotidien que de loisirs.© regiosuisse

Projets-modèles pour un développement territorial durable (MoVo)

Avec les MoVo, huit services fédéraux soutiennent, sous la direc tion de l’ARE, des approches et des méthodes nouvelles pour un développement territorial durable, ce qui inclut aussi de nou velles solutions de mobilité. Pendant la quatrième période de programmation (2020–2024, en cours), la Confédération soutient 31 projets pour un total d’environ 3,9 millions de francs. Huit de ces projets sont explicitement consacrés à la mobilité. Ils visent princi palement à promouvoir les «courtes distances, l’activité physique et les rencontres».

➜ Exemples de projets actuels ou achevés récemment:

Innotour

La Confédération soutient à raison de 30 millions de francs la période de programmation actuelle 2020–2023 pour encourager l’innovation, la coopération et la professionnalisation dans le domaine du tourisme (Innotour). Les priorités de ce programme coordonné par le SECO portent non seulement sur de nouveaux services touristiques d’hébergement, de restauration et d’accueil, mais aussi sur le transport et le trafic. En fin de compte, des so­ lutions de mobilité touristique durable désengorgent l’ensemble du système de transport de la Suisse, dans lequel le trafic de loi­ sirs est connu pour jouer un rôle dominant.

➜ Exemples de projets:

Bureau de coordination pour la mobilité durable (COMO)

Le COMO est rattaché à l’Office fédéral de l’énergie. Il soutient chaque année jusqu’à une douzaine de projets novateurs en ma­ tière de mobilité durable. Ses ressources financières proviennent du programme SuisseÉnergie. Les projets COMO sont cofinancés par les offices fédéraux ARE, OFROU, OFT, OFEV et OFSP. Le sou­ tien se concentre sur des solutions qui favorisent les modes de déplacement propices à l’activité physique et respectueux de l’environnement et des ressources. L’éventail des projets s’étend de l’app pour une gestion simplifiée des places de parc aux mesures de promotion des TP et de la mobilité douce.

➜ Exemples de projets actuels:

Vous trouverez davantage de projets dans la base de données regiosuisse: regiosuisse.ch/fr/base-de-donnees-des-projets

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Perspectives d’évolution du transport 2050

Les Perspectives d’évolution du transport 2050 esquissent quatre scénarios possibles d’évolution, dont le scénario de base qui se trouve au centre de la planification future. D’après ce dernier, le trafic voyageurs (mesuré en personneskilomètres) en Suisse, toutes catégories confondues, croîtra de 11 % d’ici à 2050. La raison principale est que la population continuera de croître durant la même période, de plus de 20 % pour atteindre 10,4 millions de personnes. Le DETEC s’attend à des taux de croissance nettement plus élevés pour le trafic de loisirs, déjà responsable aujourd’hui de 44 % des distances journalières. On table sur une augmentation de 15 % du trafic d’achats, mais sur une diminution du trafic professionnel de 13 % par rapport à aujourd’hui. Les moteurs de cette évolution sont le vieillissement de la population, la baisse de la part des personnes actives occupées dans la population totale et, surtout, la diminution du trafic pendulaire grâce à l’augmentation du télétravail.

Des changements se dessinent aussi en matière de répartition modale : l’urbanisation progressive et la nouvelle extension des TP auront pour conséquence que les gens des villes rouleront moins dans leur propre voiture. Déjà aujourd’hui, environ la moitié des ménages des grandes villes ne dispose pas de son propre véhicule motorisé, tandis que celui-ci semble rester indispensable à l’avenir dans les localités rurales et périphériques. Le trafic individuel motorisé (TIM) devrait certes diminuer de 5 % selon les Perspectives 2050, mais constituerait encore 68 % du trafic voyageurs. Tout compte fait, les TP pourraient voir leur part passer de 3 à 24 % d’ici à 2050. Le trafic cycliste devrait connaître des progrès sensibles, même si c’est à un bas niveau : le vélo pourrait doubler sa part en passant de 2 à 4 %.

S’agissant du trafic marchandises, le DETEC table sur une croissance toujours forte de 31 % pour atteindre 36 milliards de tonnes-kilomètres. D’ici à 2050, le rail devrait gagner deux points de pourcentage dans la répartition modale, avec une part de 39 % du trafic marchandises, mais la majeure partie des tonnes-kilomètres reviendra probablement toujours aux routes en 2050.

Comportement de la population en matière de mobilité en 2021

La population résidente suisse a parcouru en 2021 environ 43 % des distances intérieures pour les loisirs – le motif de déplacement de loin le plus important. En 2021, le deuxième motif de déplacement en importance a été le trafic professionnel, suivi par le trafic d’achats. Au total, 30 km ont été parcourus en Suisse par personne et par jour, 6,8 km de moins que six ans auparavant. En raison de la pandémie, la population a été moins mobile pour la première fois depuis des décennies. Le vélo électrique a été le seul moyen de transport qui a été davantage utilisé malgré la pandémie.

Les divers groupes de population diffèrent parfois beaucoup en matière de mobilité. Les jeunes adultes âgés de 18 à 24 ans ont été particulièrement mobiles avec une distance journalière moyenne de 40,2 km par personne. En 2021, les habitantes et les habitants des communes rurales ont parcouru un quart de kilomètre de plus que les citadines et les citadins. Du point de vue de la population, les améliorations des transports publics et la réduction des incidences des transports sur l’environnement sont plus importantes que les améliorations de la mobilité cycliste, routière ou piétonne.

Bibliographie

OFS/ARE (2023): Microrecensement mobilité et transports 2021. Neuchâtel

Müller-Jentsch Daniel, Avenir Suisse (2020): Les «vallées-centres». Les vallées principales comme axe de développement des régions de montagne.

Wüest Partner (2021): Berggebiete: Sozioökonomische Analyse, eine empirische Grundlagenstudie im Auftrag des SECO (résumé en français).

La Suisse reprend la présidence de l’EUSALP

En 2023, les cantons et la Confédération reprennent pour la première fois la présidence de la Stratégie macrorégionale pour la région alpine (EUSALP). Cette mission comprend notamment l’organisation de trois conférences thématiques ouvertes à toutes les personnes intéressées. La première a été consacrée, fin mars à Fribourg, au thème de l’économie circulaire. Les suivantes auront lieu le 16 juin à Scuol (GR) sur le thème de l’eau et le 1er septembre au Tessin sur le thème de la mobilité et des transports. Il y aura encore un forum annuel et une assemblée générale le 19 octobre à Bad Ragaz. Des représentantes et des représentants politiques de tout l’espace alpin y participeront. La Conférence des gouvernements cantonaux et l’Office fédéral du développement territorial coordonnent ces activités, cofinancées par la Nouvelle politique régionale (NPR) et soutenues par plusieurs offices fédéraux et cantons.

alpine-region.eu/swiss-presidency-2023

regiosuisse.ch/eusalp

Une mobilité de loisirs durable nécessite des infrastructures et des services

Pirmin Schilliger & Urs Steiger

La réalisation d’une mobilité durable est un objectif central de la politique nationale des transports. Comment les transports touristiques et de loisirs peuvent-ils atteindre cet objectif, eux qui constituent une base essentielle pour l’économie de nombreuses régions rurales et de montagne? Selon Vincent Kaufmann, professeur d’analyse des mobilités à l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) et directeur scientifique du Forum Vies Mobiles à Paris, il faut examiner cette question de manière différenciée. «La mobilité de loisirs dans les villes se distingue fortement du tourisme dans les régions rurales de détente de proximité et dans les stations alpines», explique-t-il. Il est nécessaire de couvrir des besoins différents selon les régions et les tranches d’âge.

Vincent Kaufmann © regiosuisse

Les nouvelles solutions de transport et de mobilité devront en outre être durables et neutres en CO2. De l’avis unanime, confort et service sont les concepts clés qui permettent d’inciter la population à un comportement de mobilité durable. Les possibilités ne sont de loin pas épuisées. Dans le Jura par exemple, les sites de nombreux hébergements ne sont pas desservis par les transports publics. «Pour les hôtes de ces destinations, il est clair qu’ils voyageront de préférence en voiture s’ils souhaitent franchir le dernier tronçon confortablement», constate Émilie Moreau, responsable du développement de l’offre et membre de la direction de Jura Tourisme. Une part importante de l’infrastructure cyclable est encore en piteux état dans le Jura – tout comme dans l’ensemble de la Suisse. Le Canton a malheureusement manqué de ressources pour investir prochainement dans de nouveaux itinéraires cyclables plus sûrs, regrette Émilie Moreau.

Emilie Moreau © regiosuisse

Stefan Maissen, directeur de Rent a Bike AG, une entreprise qui propose la location de vélos aller simple dans les gares de toute la Suisse, partage cet avis. « Pour exploiter encore mieux le vélo à l’avenir dans le tourisme, il faut disposer de pistes cyclables plus sûres, soigneusement séparées du trafic motorisé.» Lors de la création de Rent a Bike, Stefan Maissen a réalisé plusieurs projets soutenus par les programmes de promotion nationaux. Ces projets incluent le projet NPR «Boucle cardio autour du Napf» ou le projet Innotour Bikepark Jura dans le val de Travers. Stefan Maissen trouve les programmes de promotion «très précieux» lorsqu’il s’agit de projets locaux ou régionaux. Mais il souhaite une meilleure coordination des différents canaux de soutien et davantage de ressources financières pour les infrastructures cyclables. Vincent Kaufmann voit les forces des programmes de soutien surtout dans la possibilité d’oser des expériences et de réaliser des projets pilotes. «Ce qui n’existe guère par ailleurs, c’est une réflexion à plus grande échelle et la volonté de mener une politique de mobilité vraiment nationale.»

Stefan Maissen © regiosuisse

Vous trouverez ici la version complète en allemand.

Autres articles

Évaluation de la NPR

La Nouvelle politique régionale (NPR) a pour but de renforcer la compétitivité de régions structurellement faibles. L’évaluation complète Improve NRP commandée par le Secrétariat d’État à l’économie (SECO) montre dans quelle mesure la NPR a réussi à le faire. Elle révèle que la NPR remplit sa mission. Les objectifs sont atteints dans de nombreux domaines. La grande majorité des projets se poursuit après le financement de la NPR. Mais l’évaluation montre aussi sur quels points la NPR n’exploite pas encore pleinement son potentiel et quelles mesures sont recommandées
pour affiner son profil. Le rapport succinct existe aussi sous forme de podcast.


improve-nrp.ch