Économie circulaire: les atouts particuliers des régions

Pirmin Schilliger & Urs Steiger
L’économie circulaire est déjà à l’agenda écologique depuis des décennies. Elle est depuis devenue un concept mûr et global pour la gestion durable, qu’il s’agit maintenant de mettre en œuvre dans l’ensemble de l’économie. Il doit également inspirer le développement régional dans le cadre de la Nouvelle politique régionale (NPR).
L’entreprise Basis 57 nachhaltige Wassernutzung AG exploite à Erstfeld (UR) l’eau chaude et propre provenant du tunnel NLFA du Gothard pour élever des sandres. © regiosuisse
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90 % des matériaux de l’économie globale proviennent de l’extraction de nouvelles matières premières, dont 40 % sont des énergies fossiles. Vu ces chiffres, une forme d’économie qui ménage les ressources est nécessaire. Le concept de l’économie circulaire fournit une approche qui se fonde sur un système composé d’énergies renouvelables et de cycles de matières fermés. Toutes les substances préoccupantes qui polluent l’environnement et mettent la santé en danger devraient être remplacées par des substances inoffensives.

Le principe de l’économie circulaire

L’économiste britannique David W. Pearce est considéré comme le fondateur de l’économie circulaire. C’est au début des années 1990 qu’il a dérivé ce concept de l’écologie industrielle. Le professeur allemand de génie chimique Michael Braungart et l’architecte américain William McDonough ont perfectionné systématiquement cette approche au tournant du millénaire. Dans leur livre «Cradle to cradle»1 (du berceau au berceau), ils ont préconisé un système de production fondamentalement nouveau : plus aucune matière n’atterrit dans une décharge ou une usine d’incinération ; au lieu de cela, tous les matériaux non dégradables naturellement sont réutilisées pour produire de nouveaux biens.

Dans l’économie circulaire conforme au principe «cradle to cradle», ils distinguent trois catégories de matériaux :

➊ Les biens de consommation tels que produits de nettoyage, shampoings ou matériaux d’emballage doivent être fabriqués systématiquement, en économie circulaire, à partir de matières premières biologiques de façon à pouvoir être finalement compostés et confiés en toute tranquillité à l’environnement.

➋ Les biens de consommation tels que voitures, lave-linges ou téléviseurs, composés de «nutriments techniques», doivent être conçus de manière à pouvoir être totalement dissociés en éléments réutilisables à la fin de leur cycle de vie. Les matières de ces biens de consommation circulent donc éternellement dans le système de production industrielle.

➌ La troisième catégorie – toutes les matières que nous brûlons ou mettons en décharge aujourd’hui comme déchets – n’a pas sa place dans l’économie circulaire.

«Dans l’économie circulaire, il ne s’agit pas simplement de réduire ou de minimiser les déchets, mais d’éviter la production de déchets», souligne Michael Braungart, l’un des pères spirituels du concept. S’il n’est pas (encore) possible de remplacer certaines matières des biens de consommation par des alternatives circulaires, il s’agit au moins de réduire la consommation de ressources et d’utiliser les produits plus longtemps.

L’économie circulaire est une approche globale qui prend en compte l’ensemble du circuit, de l’extraction des matières premières au recyclage en passant par la conception, la production, la distribution et la phase d’utilisation la plus longue possible. Si les circuits des matériaux et des produits peuvent être fermés, les matières premières peuvent être utilisées encore et encore.© OFEV/regiosuisse

Un projet interdisciplinaire global

La sortie des énergies fossiles constitue une condition indispensable pour une future économie circulaire. Avec le tournant énergétique, la Suisse tient le bon cap politique à cet égard ; mais intégrer tous les flux de matières dans un cycle constitue un énorme défi. La réussite de la transformation requiert des choix fondamentaux supplémentaires – y compris au niveau politique. «Il n’y a pour les fabricants aucune nécessité de se conformer volontairement au principe «cradle to cradle» tant que les contribuables financent l’élimination des déchets dans de coûteuses usines d’incinération», critique Michael Braungart.

La transformation de l’économie linéaire en une économie circulaire est un projet global interdisciplinaire qui doit intégrer tous les acteurs, de l’extraction des matières premières à la gestion des déchets en passant par le développement et la conception des produits, leur fabrication, leur distribution et leur consommation. La gestion des déchets fait en sorte que les matières ne soient plus «éliminées», mais retournent impérativement dans le cycle comme matières secondaires. Mais l’économie circulaire concerne aussi les formes d’utilisation et donc les modèles d’affaires. Les devises sont : louer au lieu d’acheter, partager au lieu de posséder, réparer, récupérer, remettre à neuf au lieu de jeter ! Les consommatrices et les consommateurs peuvent contribuer notablement au changement par leurs habitudes de consommation et leurs modèles de comportement.

Succès économique grâce à l’économie circulaire

Le domaine de la production sollicite surtout les entreprises. Différents pionniers ont déjà montré avec des produits tels que chaises, baskets ou revêtements de sol, que les modèles d’affaires circulaires peuvent être synonymes de succès économique. L’entreprise Forster Rohner, St-Gall, a développé il y a des années des housses rembourrées compostables pour les sièges de bureau et d’avion. Seules quelques entreprises satisfont toutefois aux critères stricts du label Cradle-to-Cradle. Vögeli Druck, Langnau im Emmental, est par exemple la première imprimerie au monde à avoir obtenu, en 2016, la certification Cradle-to-Cradle Gold.

Dans la métallurgie et l’industrie des machines, la voie de l’économie circulaire passe le plus souvent par un processus d’optimisation en plusieurs étapes. Grâce à des améliorations des procédés, le cuisiniste Franke consomme aujourd’hui quatre fois moins d’énergie et deux fois moins d’acier pour ses éviers en acier qu’il y a quelques années. De nombreux métaux, surtout le platine, l’or et le palladium, sont aujourd’hui couramment recyclés dans l’industrie – pour la simple raison que ces matières sont trop précieuses pour atterrir dans les déchets et qu’il est possible de retraiter de nombreux métaux sans problème et sans perte de qualité pour un nouveau cycle de production. En Suisse, environ 1,6 million de tonnes de déchets de fer et d’acier par année sont ainsi reconvertis en acier de construction et en acier inoxydable. 3,2 millions de tonnes de déchets urbains collectés séparément retournent en outre dans le cycle. Dans le génie civil, près de 12 millions de tonnes de matériaux de démolition tels que béton, gravier, sable, asphalte et maçonnerie, soit deux tiers d’entre eux, sont recyclés. «5 autres millions de tonnes de matériaux de démolition et 2,8 millions de tonnes de déchets urbains ne retournent en revanche pas (encore) dans le cycle», précise David Hiltbrunner, de la section Cycles matières premières de l’Office fédéral de l’environnement (OFEV).

Les fibres textiles, les matériaux synthétiques et composites, les déchets électriques et électroniques, les produits chimiques ainsi que certains déchets biogènes restent pour l’instant un défi particulier. Ces matières ne peuvent être dissociées et le cas échéant retraitées qu’à grands frais. Le nombre d’entreprises qui développent des modèles d’affaires innovants selon les principes de l’économie circulaire croît toutefois aussi dans ces domaines délicats. C’est ainsi par exemple que la maison de meubles Pfister propose depuis 2018 des rideaux certifiés économie circulaire. La start-up Tyre Recycling Solutions TRS, Yvonand (VD), remet les vieux pneus en état de marche et l’entreprise Bauwerk, Sankt Margrethen (SG) retraite de vieux parquets.

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Adieu à la société du tout-jetable

Des conditions-cadre politiques efficaces sont nécessaires pour que des biens de consommation complexes tels que lave-linges, ordinateurs ou voitures deviennent également circulaires. Les directives-cadres de l’UE sur l’écoconception et les déchets exigent expressément la promotion de modèles de production et de consommation durables, en particulier une conception axée sur la longévité, la réparabilité des appareils électriques, des mesures contre le gaspillage alimentaire et des campagnes d’information destinées à la population. Quelques pays ont déjà bien avancé dans la mise en œuvre. Les Pays-Bas misent par exemple depuis dix ans sur des biens fabriqués selon le principe «du berceau au berceau» pour leurs achats publics et dépensent des montants supérieurs à dix milliards d’Euros pour des achats conformes aux critères de l’économie circulaire. Avec son plan d’action pour l’économie circulaire (Circular Economy Action Plan), l’UE a encore renforcé ses efforts en 2020. On envisage actuellement d’étendre les directives d’écoconception à tous les biens de consommation, car l’UE souhaite dire définitivement adieu au système de la société du tout-jetable. Les directives de l’UE s’appliquent aussi à tous les fabricants suisses qui souhaitent exporter des produits dans les pays de l’UE.

Ce n’est pas un hasard si l’écoconception occupe la première place dans le plan d’action de l’UE : jusqu’à 80 % de l’impact environnemental ultérieur d’un produit sont prédéterminés lors de la phase de conception, tout comme sa durée de vie et sa fiabilité. La règle générale d’écologie «la sobriété prime sur la circularité» est également de mise! Une gestion raisonnée des ressources qui se limite au strict nécessaire évite les marches à vide et économise beaucoup d’efforts ultérieurs. «Toutes les stratégies qui aident à utiliser les substances et les matériaux de façon plus économe, plus efficiente et plus pérenne contribuent à l’économie circulaire», estime David Hiltbrunner.

L’agenda de la Suisse

En Suisse aussi, l’économie circulaire figure en très bonne place sur l’agenda politique – pour une bonne raison : pratiquement aucun autre pays ne produit autant de déchets urbains que la Suisse, malgré des taux de recyclage élevés.

Au Parlement, au moins huit interventions en suspens se réfèrent à l’économie circulaire, les principales étant l’initiative parlementaire 20.433 «Développer l’économie circulaire en Suisse» et le rapport du 11 octobre 2021 de la Commission de l’environnement, de l’aménagement du territoire et de l’énergie du Conseil national. Le Conseil fédéral a procédé ce printemps à un état des lieux actuel de l’économie circulaire. D’après lui, il existe des potentiels importants pour l’économie circulaire surtout dans les domaines suivants : construction et logement, agroalimentaire, mobilité, génie mécanique et industrie chimique. L’administration fédérale a identifié toute une série de prescriptions et de normes qui entravent encore une économie circulaire. Elle examine comment il est possible d’éliminer ces obstacles. Il semble clair que les aspects d’une économie circulaire qui ménage les ressources doivent être intégrés à l’avenir dans les politiques sectorielles de la Confédération. Selon le Conseil fédéral, le mieux est de le faire en accord avec la Stratégie pour le développement durable 2030 (SDD 2030) de la Confédération et avec les stratégies nationales à long terme des politiques climatique, économique et agricole.

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Développement de la NPR

La promotion explicite de l’économie circulaire, qui n’était pas jusqu’à présent un point du programme de la NPR, pourrait en devenir un élément pour la prochaine période de programmation. Cette intention coïncide avec la demande de Romed Aschwanden, directeur de l’institut uranais Cultures des Alpes de l’Université de Lucerne, selon laquelle il faudrait aligner radicalement la NPR sur le principe de la durabilité. «Car le vrai problème des régions périphériques et de montagne n’est plus l’inégalité salariale, mais le changement climatique, argumente-t-il.»

Les travaux préparatoires nécessaires sont déjà en cours auprès des offices compétents, surtout du SECO et des services NPR cantonaux. Le cadre d’orientation est fixé par les dix-sept objectifs de développement durable (Sustainable Development Goals, SDG) des Nations Unies (ONU). Cet «Agenda 2030» constitue déjà aujourd’hui le cadre d’orientation pour la Stratégie suisse pour le développement durable 2030. La Direction de la promotion économique du SECO peut donc s’appuyer sur ce cadre pour ancrer les idées et les objectifs du développement durable dans la NPR. «L’économie circulaire jouera un rôle important pour le thème prioritaire de la consommation et de la production durable», estime Ueli Ramseier, qui coordonne auprès du SECO les travaux en faveur de la durabilité dans le cadre de la NPR. Avec sa priorité «climat, énergie et biodiversité», la NPR promeut en outre depuis des années les énergies renouvelables et l’aménagement de zones bâties durables et résilientes.

L’harmonisation de la NPR avec le développement durable doit être comprise comme un développement et un complément de la NPR, non comme un changement de système. Il est prévu de développer encore les contributions aux aspects sociaux et écologiques du développement durable au cours de la période de programmation 2024-2027 et de leur donner davantage de poids. La NPR continuera toutefois à l’avenir à se focaliser sur l’économie régionale, mais les services NPR cantonaux et le SECO veulent cofinancer davantage de projets NPR centrés sur l’économie circulaire. «La NPR reste attachée aux objectifs généraux – renforcer la compétitivité des régions, créer des emplois, maintenir l’occupation décentralisée du territoire et réduire les disparités régionales», souligne Ueli Ramseier.

Profiter des atouts de la politique régionale

Les régions jouent un rôle important dans la promotion de l’économie circulaire, même si cela n’apparaît pas au premier coup d’œil. regiosuisse – le Centre du réseau pour le développement régional – a relevé ce défi l’année dernière. «Nous souhaitons créer du savoir-faire, transmettre les connaissances nécessaires et développer des aides concrètes pour les régions», explique Lorenz Kurtz, chef de projet regiosuisse. Dans le cadre de la communauté du savoir-faire regiosuisse «économie circulaire et développement régional», des connaissances importantes ont été préparées au cours des mois écoulés sous la forme d’une boîte à outils pratique accompagnée d’exemples inspirants. Afin de développer ce thème complexe jusqu’à ce qu’il soit prêt à être mis en œuvre par les régions, regiosuisse a lancé en mars de cette année le RegioLab économie circulaire, dont le but est de montrer comment les régions peuvent intégrer l’économie circulaire dans leurs stratégies régionales.

L’économie circulaire offre des opportunités aux régions lorsqu’elle se concentre sur des thèmes et des domaines qui sont déjà structurés régionalement : agriculture et sylviculture, production alimentaire, transformation du bois, énergies renouvelables, infrastructures, services régionaux et donc aussi tourisme. Une analyse systématique des flux de matières et des chaînes de production dans ces domaines montre que le potentiel régional pour l’économie circulaire est énorme. Promouvoir l’économie circulaire requiert non seulement de la formation et de la transmission de connaissances, mais aussi des incitations financières supplémentaires. Il faut de l’argent pour les projets en eux-mêmes, mais aussi pour leur accompagnement professionnel et l’élaboration de stratégies régionales de développement économique circulaire. «Il est envisageable, pour des projets particulièrement exigeants de la catégorie ‹durabilité cinq étoiles›, d’élargir le cadre du soutien et d’allouer à l’avenir davantage de fonds fédéraux à cet effet», estime Ueli Ramseier.

Norman Quadroni, chef de projets politique régionale auprès d’arcjurassien.ch, voit dans l’économie circulaire une grande opportunité de mieux exploiter la richesse naturelle des régions rurales, frontalières et de montagne. Il est convaincu qu’elle permet de mettre en valeur des ressources qui resteraient sur le carreau dans une perspective de développement purement axée sur l’exportation. «Certaines activités économiques organisées aujourd’hui au niveau international pourraient être ramenées dans la région et intégrées dans des circuits courts », considère Norman Quadroni. Grâce à leurs caractéristiques et à leurs qualités telles qu’échelle limitée, vision d’ensemble et proximité, les régions sont en principe prédestinées à l’initiation de processus circulaires. Car la collaboration interdisciplinaire et interentreprises au sein de réseaux, telle que la NPR la pratique depuis ses débuts, est particulièrement demandée en économie circulaire.

regiosuisse.ch/economiecirculaire

ofev.ch

Les promoteurs de l’économie circulaire

Outre regiosuisse, diverses organisations s’engagent pour proposer aux acteurs intéressés du savoir-faire, de l’empowerment et du coaching pour l’économie circulaire:

Go for impact L’association Go for impact, que l’Office fédéral de l’environnement (OFEV) a contribué à créer, se voit comme un moteur de l’économie circulaire en Suisse. Elle s’engage politiquement et économiquement pour modeler l’avenir circulaire de l’économie suisse.

Circular Economy Switzerland Avec sa plateforme, ce réseau qui bénéficie d’un large soutien économique, politique et social s’adresse à l’ensemble des organisations, des entreprises et des personnes qui s’intéressent à l’économie circulaire. Il a élaboré une charte de l’économie circulaire et soutient toutes les initiatives par des connaissances, des manifestations et du lobbying politique.

CircularHub Cette plateforme de connaissances et de mise en réseau pour l’économie circulaire en Suisse propose aux entreprises et aux start-ups innovantes des offres de formation, de conseil et d’accompagnement de projets.

Réseau suisse pour l’efficacité des ressources (Reffnet) Des expertes et des experts du Reffnet conseillent et accompagnent des entreprises lorsqu’elles élaborent un plan de mesures pour accroître l’efficacité des ressources.

Méthode de conception de «pression des ressources» Une équipe de recherche de l’Empa a développé la méthode de conception dite de « pression des ressources » dans le cadre du PNR 73 Économie durable. Cette nouvelle approche vise à orienter les décisions de conception vers des produits et des services plus durables.

PRISMA Cette communauté d’intérêts d’entreprises de l’industrie alimentaire, de la branche des biens de consommation et de l’industrie des emballages vise à réaliser l’économie circulaire dans le domaine des emballages.

Prozirkula Ce centre de compétences s’engage en faveur de l’intégration des principes de l’économie circulaire dans les processus d’achats publics et privés. Il propose du conseil, du transfert de savoir et de la mise en réseau voir aussi l’article Marchés publics: levier pour l’économie circulaire)

PAP Plateforme de connaissances de la Confédération sur les achats publics responsables.

Boussole durabilité Plateforme de connaissances financée par le SECO et exploitée par la Fondation Pusch et par l’öbu (Association pour une économie durable).

La bourse aux idées: initiatives et projets d’économie circulaire

Agriculture et alimentation

Star’Terre production régionale, commercialisation régionale, circuits courts, plateforme alimentaire intercantonale dans la région du Léman (cf. article Un trait d’union entre la terre et les start-up).

Culture maraîchère Meier Frères, Primanatura AG, Hinwil (ZH) serres n’émettant pas de CO2 grâce aux rejets de chaleur de l’usine d’incinération des déchets et au captage du CO2 aérien – cycles fermés.

Bösiger Gemüsekulturen AG, Niederbipp (BE) culture maraîchère circulaire.

Aquaponie combinaison circulaire de la pisciculture et de l’agriculture indépendante du sol ; la Haute école zurichoise des sciences appliquées ZHAW mène des activités de recherche et d’enseignement dans ce domaine et propose des cours aux personnes débutantes ou intéressées.

Agriculture énergétique Maison tropicale de Frutigen installation circulaire d’aquaculture et de pisciculture.

Projets de lutte contre le gaspillage alimentairestart-up et app Too good to go, plateforme United against Waste.

Économie circulaire dans le Seeland (projet NPR 2021-2023) des restaurants, des boulangeries et des établissements de restauration collective essaient de fermer les cycles de la chaîne de création de valeur ajoutée avec d’autres acteurs (maraîchers, consommateurs).

Centravo AG, Lyss (BE) cette entreprise valorise depuis 25 ans des composants d’origine animale que les boucheries n’utilisent pas.

Fine Funghi AG cette entreprise zurichoise produits des champignons bios à partir des déchets (son de blé) d’un moulin à céréales.

RethinkResource cette start-up a développé le marché B2B Circado afin de valoriser certains sous-produits industriels de la production alimentaire.

Ricoter Préparation de terres SA créée en 1981, cette entreprise produit du terreau à Aarberg (BE) et à Frauenfeld (TG) à partir des déchets organiques des raffineries de sucre.

Brauerei Locher, Appenzell (AI) projet agroindustriel.

ortoloco, coopérative fermière, Dietikon (ZH) 500 personnes l’exploitent en cogestion en tant que productrices et producteurs, consommatrices et consommateurs.

Communautés d’achat dans lesquelles les consommateurs coopèrent directement avec les producteurs : notamment Tante Emmen, Koop Teiggi Kriens, plateforme Crowd Container, CI food coops.

Qwstion cette marque zurichoise de sacs a lancé un nouveau matériau textile «tissé» à partir des fibres du bananier.

Construction et immobilier 

Construction circulaire (Beat Bösiger, bluefactorydéconstruction, béton recyclé, utilisation de matériaux locaux, durables, renouvelables, etc., matériaux bitumineux de démolition.

Eberhard Bau AG cette entreprise est une pionnière du recyclage des déchets de chantier depuis quatre décennies; elle transforme les gravats en matériaux secondaires sans perte de qualité.

Autres spécialistes du recyclage de déchets de chantier Ronchi SA, Gland (VD), Sotrag SA, Etoy (VD), Kästli Bau AG, Rubigen (BE), BOWA Recycling, Susten.

Neustark, Berne cette entreprise bernoise est spécialisée dans la pétrification du CO2 atmosphérique dans du béton recyclé.

Planification intégrée et gestion commune de zones industrielles et artisanales projets au Locle (NE), à St-Imier (NE), à Val-de-Ruz (NE), dans le district de la Singine (BE, zones d’activités), à Sierre (VS, Écoparc de Daval cf. article Objectif en vue grâce à un rythme plus lent), Schattdorf (UR), etc.

enoki, Fribourg cette start-up fribourgeoise conçoit et planifie des quartiers et des villes plus circulaires.

Terrabloc, Genève l’entreprise genevoise Terrabloc produit des matériaux de construction et d’isolation à partir de glaise.

VADEME ce projet Interreg vise une solution coordonnée pour les déchets de chantier minéraux dans les régions de Genève et d’Annecy (cf. article VADEME, valoriser les déchets minéraux).

ORRAP projet Interreg (2016-2019) pour le recyclage de matériaux bitumineux de démolition dans la région de Bâle.

Approches organisationnelles et stratégiques

AlpLinkBioEco ce projet Interreg qui s’est achevé en avril 2021 a ébauché un générateur de chaînes de création de valeur ajoutée et un master plan pour une économie circulaire dans l’espace alpin fondée sur des matières premières naturelles et locales.

Sharely cette start-up exploite une plateforme de location d’objets quotidiens.

Make furniture circular une initiative de la Fondation Pusch et du Fonds pionnier Migros qui promeut les «meubles circulaires».

Réseaux de réparation et de recyclage diverses initiatives régionales de promotion de lieux de réparation et de recyclage, ce qui inclut aussi les journées de la seconde main, les boutiques de seconde main, les ateliers de réparation, les lieux d’upcycling, etc.

Économie circulaire dans le Parc naturel régional Chasseral relocalisation de chaînes de création de valeur ajoutée, préservation et mise en valeur de ressources naturelles locales.

Feuille de route économie circulaire du canton de Fribourg stratégie cantonale.

Plateforme 1PEC bourse aux idées pour promouvoir l’économie circulaire en Valais.

Économie circulaire Haut-Valais économie circulaire dans une zone rurale isolée (projet soutenu par le Programme d’encouragement pour le développement durable, ARE, 2022).

Share Gallen atelier de réseautage et marché public à St-Gall (projet du Programme d’encouragement pour le développement durable, ARE, 2018).

Énergies renouvelables

Installations de production de biogaz par exemple Kägiswil (OW) et installation Kompogas de Wauwil (LU), toutes deux soutenues par la NPR, ainsi que BiogasTicino SA dans la plaine de Magadino.

Satom SA, Monthey (VS) méthanisation de déchets organiques.

Programme cantonal vaudois de «promotion de la filière bois» (projet NPR), le canton met directement en avant le bois comme source d’énergie renouvelable.

Recherche d’un nouvel équilibre touristique

Pirmin Schilliger

Dix des onze communes de la région Prättigau/Davos sont directement concernées par la loi sur les résidences secondaires (LRS). Cette région n’a pas enregistré de chute économique substantielle à la suite de la LRS, ni dans le tourisme, ni dans le bâtiment. Il y a toujours plus qu’assez de mandats pour ce dernier secteur dans le domaine des rénovations.

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Dans le sillage du développement en général et des hausses de prix pour les résidences secondaires, les résidences principales sont aussi devenues sensiblement plus chères. Klosters et Davos essaient de rectifier le tir et apportent un soutien ciblé à la construction de résidences principales en cédant des parcelles communales en droit de superficie et en participant à des projets de construction de logements. L’obligation de déclarer la réaffectation de résidences principales créées selon l’ancien droit en résidences secondaires a en outre pour but d’aider à détecter de bonne heure les évolutions indésirables sur le marché de l’immobilier. Par des contrats de droit de superficie ou des mesures d’aménagement du territoire, les communes soutiennent les projets touristiques de nouveaux hôtels et de résidences secondaires dédiées à la location.

© regiosuisse

À l’aide d’approches innovantes, elles essaient de mieux exploiter l’infrastructure touristique, par exemple avec le projet «Alles-aus-einer-Hand» soutenu par la Nouvelle politique régionale (NPR), dans le cadre duquel une jeune entreprise rénove des logements de vacances dont les propriétaires lui ont attribué l’usufruit et les loue à des vacanciers. L’offre du projet-modèle «Alpine Sabbatical» s’adresse aux gens qui prennent un congé sabbatique, donc prolongé dans la région. Elle comprend vingt hébergements et des forfaits spécifiques pour ce type de séjours. Avec le projet-modèle «Stratégie logements pour seniors et autres nouveaux résidents», les régions Prättigau/Davos et Albula essaient en outre d’intégrer davantage les propriétaires de résidences secondaires dans la vie communale et, dans le cas idéal, de convertir les résidents secondaires en résidents principaux.

projets-modeles.ch

alpinesabbatical.ch

neustarter.info

regiosuisse.ch/npr

Vous trouverez ici la version complète en allemand.

Autres articles

Les «résidents secondaires» de Hasliberg

Jana Avanzini

Les résidences secondaires sont un sujet brûlant, aussi à Hasliberg (BE). Lorsque l’initiative sur les résidences secondaires a été acceptée en 2012, le village situé sur le versant sud du Col du Brünig a dû revoir sa copie. C’est ainsi qu’est née en 2016 l’association Réseau Hasliberg, qui compte aujourd’hui 250 membres.

Maja Bachmann, qui a grandi à Hasliberg, en est membre fondatrice. Elle est une membre parfaite pour cette association: spécialiste en tourisme, ancienne indigène longtemps absente et actuellement «Zweitheimische», à savoir résidente secondaire. Ce mot que l’on entend assez souvent à Hasliberg montre bien ce que vise l’association: faire sortir les propriétaires de résidences secondaires de la masse anonyme des visiteurs. Ces propriétaires qui constituent la majeure partie des membres veulent aussi s’engager dans la vie du village.

L’association apporte un soutien financier et conceptuel au village et à son développement. Ce soutien inclut des contributions financières à des projets locaux, financées par les cotisations des membres et souvent aussi par des dons supplémentaires. «C’est ainsi que nous avons pu soutenir le parc de freestyle, le jardin d’enfants en forêt, un bus du soir, la pump track, des semaines de projets à l’école, le projet ‹Maison des générations Hasliberg› ou encore des drones permettant aux chasseurs de sauver les faons», énumère Maja Bachmann. On donne personnellement un coup de main pour l’entretien du réseau de sentiers pédestres et pour le nettoyage des pistes de ski ou du lac destiné à la baignade.

Des «résidents secondaires» aident à réparer un foyer. De gauche à droite: Beat Kiser, Jos Willi (conseiller municipal de Hasliberg), Vreni Haefeli et Brigitta Kiser. © regiosuisse

Le président de la commune Arnold Schild considère que ce réseau constitue une chance et que la commune bénéficie beaucoup de son engagement. Bien entendu, il y a aussi des voix critiques à Hasliberg et des questions qui ne font pas l’unanimité, mais le réseau continue de croître, de même que la conscience de partager et de développer ensemble un territoire. 

netzwerk-hasliberg.ch

regiosuisse.ch/projects-nrp

regiosuisse.ch/npr

Vous trouverez ici la version complète en italien.

Autres articles

Boîte à outils Économie circulaire

L’approche de l’économie circulaire recèle un potentiel important en termes d’innovations, ainsi que de nouveaux modèles d’affaires et de coopération. Elle contribue à minimiser les incidences sur l’environnement tout en créant une plus-value économique. Elle offre de multiples opportunités pour le développement durable des régions, des villes et des communes. Mais comment fonctionne l’économie circulaire? Comment initier des projets d’économie circulaire? Quel rôle peuvent jouer les organismes de développement pour le faire? La nouvelle boîte à outils Économie circulaire de regiosuisse propose des réponses, décrit des méthodes et présente des exemples.

regiosuisse.ch/economiecirculaire

Évolution de la stratégie touristique

Le Conseil fédéral a adopté sa nouvelle stratégie touristique le 10 novembre 2021. Celle-ci définit les axes de la future politique touristique de la Confédération. Les objectifs de la stratégie touristique actuelle ont fait leurs preuves et sont maintenus: améliorer les conditions-cadres, promouvoir l’entrepreneuriat, utiliser les opportunités du numérique, renforcer l’attrait de l’offre et la présence sur le marché. Ils sont complétés par un nouvel objectif: contribuer au développement durable. Pour mettre en oeuvre sa stratégie touristique, la Confédération continue à miser sur les quatre instruments de promotion éprouvés de la politique du tourisme: Innotour, la Société Suisse de Crédit
Hôtelier (SCH), Suisse Tourisme (ST) et la Nouvelle politique régionale (NPR). Il est en outre prévu de moderniser et de renforcer la promotion fédérale des investissements réalisée par la SCH et la NPR.

seco.admin.ch/tourisme

Les résidences secondaires: un défi et une opportunité

Pirmin Schilliger & Urs Steiger
En vigueur depuis cinq ans, la loi sur les résidences secondaires (LRS) se révèle être aujourd’hui un instrument efficace pour un développement touristique plus durable, comme le montrent plusieurs études commandées par le Secrétariat d’État à l’économie (SECO) et par l’Office fédéral du développement territorial (ARE). La mise en œuvre des nouvelles dispositions légales est toutefois une tâche extrêmement exigeante. Si les régions et les communes concernées veulent garder ouverte à l’avenir la voie du succès touristique, elles ne peuvent faire l’économie de processus d’adaptation exigeants et innovants. C’est ce que révèlent les nombreux projets au contenu très varié lancés ces derniers temps.
Ambiance automnale à Flims (GR) © regiosuisse

Les électeurs suisses ont accepté le 11 mars 2012 l’initiative populaire visant à limiter les résidences secondaires et les lits dits «froids», à savoir les logements utilisés seulement pendant peu de temps. Environ 400 communes, presque exclusivement alpines, étaient concernées par son exigence de stopper le développement des résidences secondaires lorsque leur proportion dépassait 20 % du parc de logements. Cette décision a été un choc violent pour ces communes. Et les endroits ayant fortement misé sur la construction de résidences secondaires ont redouté une énorme chute de leur économie.

Tout n’est pas si grave

Mais la situation n’a pas si mal tourné, d’autant plus qu’il a fallu un certain temps pour que l’exécution se mette à peu près en place après l’acceptation de justesse de l’initiative. Les expertes et les experts des bureaux de conseil bhp, IC Infraconsult et Rütter Soceco 1 ainsi que de la Haute école de Lucerne (HSLU) 2 ont étudié en détail, sur mandat du seco et de l’are, l’évolution effective du marché des résidences secondaires de 2013 à 2019. L’analyse a fourni des résultats remarquables. «Immédiatement après l’acceptation de l’initiative, l’actualité économique de nombreuses régions de montagne a été marquée par un boom de la construction», conclut le Prof Stefan Lüthi de l’«Institut für Betriebs- und Regionalökonomie» (IBR) de la HSLU, lequel a étudié les conséquences de l’initiative pour les entreprises. La raison essentielle de cette évolution est que les projets qui avaient encore été autorisés avant fin 2012 n’étaient pas soumis à l’interdiction de construire. On a donc partout construit en hâte ce qui était déjà autorisé. De nouvelles demandes de permis de construire ont en outre continué à être déposées sous le régime des dispositions transitoires. C’est ainsi qu’un nombre considérable de nouvelles résidences secondaires ont continué d’arriver sur le marché en 2013 et 2014 dans de nombreux endroits.

Les effets de la législation

Ce n’est que lorsque la mise en œuvre de la loi sur les résidences secondaires (LRS) et de l’ordonnance sur les résidences secondaires (ORSec) s’est concrétisée à partir de 2015 que le nombre des autorisations a baissé et s’est stabilisé nettement au-dessous de la moyenne historique. En 2019, année qui a précédé le covid-19, environ 2000 autorisations de construire pour de nouvelles résidences secondaires ont encore été délivrées dans les communes affectées par la LRS – environ trois fois moins que durant le boom des années 2006 à 2008. «Globalement, la construction d’appartements de vacances est en forte baisse depuis l’initiative sur les résidences secondaires», conclut provisoirement Stefan Lüthi. L’initiative sur les résidences secondaires n’a donc pas entraîné une consommation de surface nulle, mais a réduit sensiblement la consommation et a favorisé une utilisation plus mesurée du sol.

De toute évidence, l’organisation de protection de l’environnement Helvetia Nostra voit les choses autrement si on considère les 1600 recours contre des demandes de permis de construire déposés entre 2013 et 2019. À ce jour, 687 recours ont été approuvés entièrement ou partiellement; 541 autres ont été déclarés sans fondement, car la demande de construire avait été retirée. Les recours se sont d’abord concentrés sur des projets situés dans le canton du Valais. Mais leur nombre y a toutefois nettement diminué au cours du temps, grâce à une pratique d’exécution mieux rodée.

Maisons de vacances à la Lenk (BE) © regiosuisse

Le secteur de la construction et de l’immobilier est sous pression

Il n’est plus guère question aujourd’hui de la catastrophe économique redoutée à l’origine à cause de la LRS. L’espace alpin comme l’ensemble de la Suisse a enregistré une croissance des emplois au cours de cette période. La LRS n’a pas non plus eu d’influence démontrable sur la demande touristique dans l’hôtellerie et la parahôtellerie. «Sans grande surprise, c’est le secteur de la construction et de l’immobilier qui a ressenti le plus durement les conséquences de la LRS», dit Stefan Lüthi. Or même dans ce secteur économique, la baisse a été inférieure aux pronostics. Les activités de construction ont certes chuté d’environ 20 % dans les lieux phares du marché des résidences secondaires. Mais les entreprises plus grandes et à l’assise plus large se sont rabattues sur de nouveaux segments de marché. Elles ont par exemple étendu leur territoire d’activité en plaine. En outre, davantage d’argent a été investi au cours des dernières années dans l’entretien et la rénovation du parc des résidences secondaires. Le secteur de la construction a également profité du boom des autorisations et de la construction, qui a même entraîné une offre excédentaire, ainsi que des dérogations permettant la construction de résidences secondaires en relation avec des établissements d’hébergement organisé. À cela s’ajoutent de nombreux projets de rénovation hôtelière, pour lesquels 20 à 33 % de la surface utile principale des bâtiments hôteliers peuvent être utilisés, à certaines conditions, comme résidences secondaires.

Un train de mesures aux effets rapides

On doit aussi à diverses autres mesures étatiques le fait que le développement économique ait mieux évolué que ce que les régions affectées par la LRS redoutaient. Ces mesures incluent le train de mesures de politique du tourisme que le Parlement a explicitement adopté en 2015 pour atténuer les effets négatifs de la LRS. Une de ces mesures était le programme d’impulsion pour le tourisme qui a libéré des moyens supplémentaires pour les années 2016 à 2019: 10 millions de francs pour le programme d’encouragement Innotour, 38 millions de francs pour la Nouvelle politique régionale (NPR) et un maximum de 150 millions de francs pour des prêts NPR supplémentaires. Le prêt additionnel de 100 millions de francs accordé en 2011 à la Société Suisse de Crédit Hôtelier (SCH) a en outre été prolongé jusqu’en 2019 vu qu’il n’avait pas été complètement utilisé.

«De nombreux projets d’adaptation déclenchés par ces mesures visent une exploitation plus intensive des résidences secondaires et des hôtels sous-occupés, conformément à la devise: lits chauds plutôt que froids», commente Stefan Lüthi. L’effet secondaire souhaité est d’accélérer la transition structurelle en cours du tourisme saisonnier au tourisme quatre saisons. De nouveaux modèles d’affaires sont nés depuis 2013 dans l’économie privée, surtout dans le secteur de la construction et de l’immobilier (cf. ci-dessous). Ils montrent, avec les projets d’adaptation soutenus par la Confédération, les cantons et les communes, qu’il existe toujours dans l’espace alpin, même avec la LRS, une voie prometteuse vers un avenir touristique durable.

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Nouvelles possibilités et opportunités avec la LRS

Le bureau de conseil IC Infraconsult a essayé de catégoriser les projets d’adaptation et les nouvelles solutions d’après leurs aspects thématiques. Il a ensuite sélectionné pour chaque catégorie plusieurs bonnes pratiques dont quelques exemples sont présentés ci-dessous 3.

  • Instruments réglementaires et fiscaux Taxes de séjour de Grächen (VS) et Val de Bagnes (VS)

La commune de Grächen a modifié son règlement de la taxe de séjour au 1er mai 2018. Elle perçoit depuis lors, sur les logements de vacances, un forfait annuel dont la somme correspond à 46 nuitées de l’ancienne taxe de séjour. C’est une mesure simple dont les autorités attendent un effet de levier important vu que la proportion de résidences secondaires s’élève à 68 %. Pour les résidences secondaires sous-utilisées, le nouveau système est synonyme d’un renchérissement massif de la taxe. Elle incite les propriétaires à les louer le plus souvent possible à des tiers. Toutefois, le nouveau modèle de calcul n’a eu jusqu’à présent que la moitié du succès escompté. Conformément aux attentes, les recettes de la taxe de séjour ont certes doublé, mais les nuitées ont stagné jusqu’à aujourd’hui. Roman Rogenmoser, ceo de l’Entreprise touristique Grächen SA, dresse tout de même un bilan positif: «Le modèle fait ses preuves. Les charges administratives de facturation sont aujourd’hui inférieures et notre organisation touristique dispose de recettes à peu près constantes, tant dans les bonnes que les mauvaises périodes.» Roman Rogenmoser reste sceptique quant à une meilleure occupation des logements de vacances: pour de nombreux propriétaires de résidences secondaires, une location externe n’entre par principe pas en ligne de compte. Il évoque donc un modèle de comportement que seules des incitations financières plus importantes permettraient probablement de modifier. C’est ce qu’essaie de faire la commune de Val de Bagnes en Valais. Les taxes de séjour dues pour les locations à des tiers sont déduites de la taxe de séjour forfaitaire pour la résidence secondaire. Leur occupation a augmenté dans le Val de Bagnes depuis l’instauration du nouveau système tarifaire.

  • Instruments d’aménagement et stratégiques Stratégie territoriale «St-Moritz 2030»

La LRS, les directives d’aménagement cantonales et la pression locale ont poussé St-Moritz à lancer en 2017, avec la population et les hôtes, un processus d’élaboration d’une vision et d’une stratégie pour le développement de la station, sous le titre «St-Moritz 2030». Le principal défi de la station engadinoise est le niveau des prix du marché mmobilier pour lequel les nombreuses résidences secondaires chères (proportion de 57 %) servent de référence. Ceci a pour conséquence que les prix des surfaces résidentielles et artisanales ne cessent d’augmenter et deviennent de plus en plus inabordables pour les habitants et les commerçants. Depuis l’adoption en 2019 de la stratégie «St-Moritz 2030», la commune soutient activement des projets de construction qui fournissent des logements ou des surfaces commerciales à des prix abordables, que ce soit au stade de la planification, le long des procédures, à l’aide d’incitations réglementaires ou grâce à une politique foncière plus active. La commune essaie en outre d’accroître l’offre de lits chauds en dialoguant avec les propriétaires et en promouvant des modèles de commercialisation et d’hébergement appropriés. Le conseiller municipal Reto Matossi est convaincu que ces processus ont contribué à donner un ancrage stratégique au thème des logements abordables. «Nous devons maintenant apporter la preuve d’une mise en œuvre réussie», déclare-t-il, par exemple à l’aide de terrains communaux et d’immeubles privés qui pourraient être mobilisés pour des logements abordables.

  • Nouvelles structures d’exploitation et de gouvernance Erni Bau SA, Flims (GR)

Après l’entrée en vigueur de la LRS, cette entreprise de construction qui a son siège dans un fief de résidences secondaires, a renforcé sa stratégie de diversification en développant des segments de marché supplémentaires (par ex. rénovations énergétiques, transport ferroviaire), de nouveaux débouchés géographiques (ensemble des Grisons, SG, VS) et de nouveaux modèles d’affaires. Ceux-ci incluent la constitution d’un portefeuille immobilier, qui réunit déjà plus de cent appartements à louer. «Nous sommes aujourd’hui en bonne voie avec la stratégie choisie», déclare le directeur Marc Grünenfelder, aussi parce que l’entreprise avait déjà auparavant une assise stratégique diversifiée. Elle bénéficie en outre de la proximité territoriale du centre urbain de Coire, où la Erni Bau SA avait réussi à s’implanter au cours des dernières années.

En revanche, les entreprises de construction plus petites des destinations touristiques périphériques n’ont souvent pas pu éviter de redimensionner leur exploitation. Le chiffre d’affaires,
le bénéfice et le nombre d’employés de la Freidig Bau SA à Lenk (Simmental) ont par exemple chuté de 20 à 30 % à cause de la LRS, sans tenir compte de la baisse de 2020 due à la covid-19.

  • Communication et gestion des connaissances Projet Innotour «Marketing de destination par le biais des propriétaires de logements de vacances» à Davos/Klosters (GR)

Le projet mené à l’«Institut für Systemisches Management und Public Governance » (IMP-HSG) de l’Université de Saint-Gall sous la direction du Prof Christian Laesser montre systématiquement comment les propriétaires de résidences secondaires pourraient contribuer davantage au marketing de destination par le biais d’un système d’incitations et de services appropriés. Les diverses mesures et propositions qui se fondent sur des tests de marché et des ateliers réalisés dans plusieurs destinations touristiques incluent notamment des événements réguliers d’information et de rencontre, des prix réduits pour des manifestations et des infrastructures e loisirs, un appui organisationnel lors d’événements privés ou professionnels et des bons pour les nouveaux propriétaires.

  • Offres de prestations et outils de plateforme Plateforme WarmesBett.ch

Ce projet dans la Surselva a déjà été lancé en 2010 par la Derungs Quinter Immobilien SA, Lumbrein (GR). Cette plateforme constitue aujourd’hui un modèle pour d’autres plateformes régionales analogues. Avec WarmesBett.ch, la Derungs Quinter SA propose aux propriétaires de résidences secondaires un service intégral afin qu’ils puissent louer leurs objets de façon professionnelle et sans travail à accomplir sur place. Ce service comprend tout: de la réservation au nettoyage en passant par le contrat et la remise des clés. La plateforme propose aujourd’hui 80 objets à louer. «C’est intentionnellement que nous n’avons pas épuisé le marché, parce qu’il ne serait guère possible de maîtriser une croissance supplémentaire en termes de logistique et de personnel», précise le directeur Gian Derungs. Trouver suffisamment de personnel de nettoyage fiable pour les nombreuses interventions de courte durée constitue un défi majeur. «Nous nous heurtons à nos limites lorsque les locataires changent en une fois dans 50 ou 60 appartements chaque samedi de février ou de début mars», fait remarquer Gian Derungs.
Il dresse un bilan positif malgré les possibilités limitées de mise à l’échelle: «Le modèle d’affaires a globalement fait ses preuves.» Le coronavirus a donné une impulsion supplémentaire: le nombre des nuitées générées par le biais de WarmesBett.ch s’est élevé à plus de 19 000 en 2020, soit 40 % de plus que l’année précédente à offre de lits égale.

  • Projets de construction et immobiliers Swisspeak Resort, Meiringen (BE)

Comme chacun le sait, la LRS autorise encore, sous certaines conditions, de construire des résidences secondaires ou de tourisme neuves. Cette nouvelle situation génère de nouveaux concepts d’hébergement. Le Swisspeak Resort de Meiringen, un projet à 30 millions de francs qui compte 79 logements et 426 lits, a été inauguré fin 2019 après deux ans de travaux. Il se dresse sur une zone touristique spéciale créée dans les années 1990 où rien ne s’était passé durant 15 ans, jusqu’à ce que la Resalpina Sàrl prenne l’initiative. Soutenue par la NPR lors de la phase de conception, la Resalpina Sàrl a développé le centre de vacances jusqu’à la onstruction afin de le vendre finalement au Mountain Resort Fund sicav. Ce fonds est géré par la Interhome SA, qui a déjà enregistré une occupation de 80 % durant la première année d’exploitation. La Resalpina Sàrl planifie neuf autres centres de vacances. Mais ces projets ne se réaliseront probablement pas aussi facilement qu’à Meiringen. Les quatre projets les plus avancés – à Laxeralp (VS), Klosters, Arosa et Savognin (GR) – sont actuellement bloqués par des recours.

Ce sont surtout les remontées mécaniques qui manifestent un vif intérêt pour les nouveaux concepts de centres de vacances : plus de 40 % des entreprises de transport sont maintenant actives dans ce domaine. Le concept d’intégration verticale où un fournisseur vise à avoir une offre de vacances complète est certes déjà ancien, mais a encore été stimulé par la LRS. Le Weisse Arena Gruppe de Laax (GR) fait partie des pionniers avec son rocksresort.

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Sur la bonne voie

Même si les personnes concernées ne partagent pas toutes le même enthousiasme au sujet de la LRS, toutes les parties prenantes jugent la nouvelle loi très positive du point de vue de l’aménagement du territoire et de l’écologie. Le consensus est fort pour dire qu’elle stoppe le mitage dans les communes concernées, qu’elle guide le développement de la parahôtellerie sur des rails durables, qu’elle renforce et continue d’améliorer les qualités touristiques dans les communes concernées.

Quelques régions et communes comme Davos/Prättigau (GR) ou le val d’Anniviers (VS) ont réagi très activement à la LRS, alors que d’autres points chauds – par exemple Grindelwald – sont restés étonnamment calmes. La pression et la disposition à s’adapter sont visiblement très variables selon la région. Les destinations touristiques qui souhaitent continuer à croître dans la parahôtellerie cherchent de nouvelles recettes. Il est clair pour tous les acteurs impliqués qu’il n’existe pas de solutions simples. Le chemin du futur succès touristique passe presque toujours uniquement par un ensemble de mesures et de projets coordonnés.

Intensifier les activités de communication

Les autrices et les auteurs des analyses d’efficacité ont constaté que le savoir en matière de mise en œuvre de la LRS n’atteint pas toujours les communes concernées et les personnes responsables. Ils recommandent donc de rehausser le niveau de connaissances parmi ces acteurs et ainsi d’accroître la sécurité de planification dans la mesure du possible. Les expertes et les experts recommandent en outre à la Confédération, aux cantons et aux communes concernées d’améliorer les conditions de financement des projets d’adaptation par des mesures supplémentaires et des services ciblés, ainsi que d’accroître la sécurité de planification.

Afin d’accélérer l’adaptation à la loi sur les résidences secondaires, mais aussi de pouvoir coordonner les changements structurels qu’elle implique et exploiter les opportunités qu’elle offre, il faudrait élargir les compétences tant des autorités responsables des constructions que des promoteurs et des maîtres d’ouvrage, et développer de nouvelles compétences. Selon les études, le meilleur moyen d’y parvenir est d’emprunter les canaux de communication établis des associations professionnelles et des organisations de promotion économique, de faire appel au soutien des offices fédéraux impliqués (SECO, ARE) et de mobiliser les instruments de développement régio­nal et touristique que sont Innotour, la NPR et la Société Suisse de Crédit Hôtelier (SCH).

Après avoir pris connaissance du rapport au Conseil fédéral sur les analyses d’impact de
la LRS, la Confédération a pris note du besoin d’en optimiser la mise en œuvre et d’améliorer les connaissances sur le sujet. Elle planifie des premières mesures dans ce sens. Elle ne voit cependant pas la nécessité de modifier la LRS, car les processus d’adaptation sont encore en cours.

Tous les efforts devraient favoriser la transition structurelle en cours du tourisme saisonnier au tourisme quatre saisons et continuer ainsi à stimuler le processus de transformation des lits froids en lits chauds. Si cette démarche réussit, on réussira également à donner aux destinations une orientation plus durable, plus viable et plus résiliente. 

are.admin.ch/residencessecondaires

regiosuisse.ch/npr

sgh.ch

seco.admin.ch/innotour

Sur les sentiers tessinois de trekking

Peter Jankovsky

Le val Maggia dispose d’un potentiel important pour un développement régional fondé sur le paysage. Ses nombreux visiteurs ainsi que sa population locale peuvent en bénéficier. Pour mettre en valeur ce potentiel par des projets adéquats, cette vallée tessinoise se réfère au concept de paysage régional « Progetto paesaggio comprensoriale ». Celui-ci formule environ 70 nouvelles idées de projets d’infrastructures et paysagers, lesquels sont maintenant mis en œuvre progressivement.

Un master plan spécifique est en vigueur pour la partie supérieure du val Maggia. Des investissements de 25 millions de francs y sont prévus au cours des quatre premières années. Ils concernent environ vingt projets touristiques ou autres projets d’infrastructures, dont quelques-uns – comme le master plan lui-même – ont soutenus par le biais de la Nouvelle politique régionale (NPR). La réalisation de cette vision a aussi pour but de fournir du travail aux petites entreprises régionales.

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Le projet phare est un itinéraire de trekking, le sentier de haute montagne de 200 kilomètres « Via Alta Vallemaggia ». Il part des collines situées au bord du lac Majeur, s’étend des deux côtés de la vallée, propose deux variantes au-delà des crêtes du val Maggia en direction du Nord et se termine en haute montagne près du glacier Basòdino.

Ce projet est en cours de mise en œuvre. L’itinéraire est établi. À cet effet, on a utilisé ou remis en état des chemins existants, ou construit de nouveaux tronçons. Maintenant, des travaux de rénovation et d’agrandissement sont en cours sur une quinzaine de cabanes de montagne. Le succès de l’offre de trekking a déjà été au rendez-vous l’été dernier : les cabanes de montagne ont été très bien fréquentées malgré, bien sûr, une offre de lits limitée par les prescriptions liées au corona­virus. Cet été, il n’est pas exclu que les nuitées des randonneurs dans les cabanes de montagne doublent et atteignent 1500. L’inauguration officielle de la «Via Alta» est prévue pour le 24 juillet prochain.

invallemaggia.ch/it/progetti

viaaltavallemaggia.ch

regiosuisse.ch/npr

Vous trouverez ici la version complète en allemand.

Autres articles

Programme «Smart Villages/Smart Regions»

La numérisation concerne tous les domaines de la vie. Elle offre aussi de nouvelles possibilités aux communes et aux régions de montagne. Dans le cadre des mesures pilotes npr en faveur des régions de montagne le Secrétariat d’État à l’économie (SECO) et le Groupement suisse pour les régions de montagne (SAB) ont lancé le programme « Smart Villages/Smart Regions ». Il offre des conseils et un soutien financier aux communes et aux régions qui élaborent, dans le cadre d’un processus participatif, des mesures permettant d’exploiter les possibilités du numérique pour le développement économique, social et écologique. L’objectif de ces mesures est de concevoir un plan d’action incluant des projets concrets de mise en œuvre et adopté par l’exécutif communal. Plus d’une douzaine de communes et de régions profitent déjà des possibilités offertes par ce programme. D’autres peuvent y participer.

Informations supplémentaires sur le programme et la participation

regiosuisse.ch/mesures-pilotes-npr-regions-montagne

Paysage et développement régional: un défi qu’il vaut la peine de relever

Pirmin Schilliger & Urs Steiger
La beauté et la spécificité du paysage constituent un facteur économique central dans de nombreuses régions rurales ou de montagne de la Suisse mais aussi dans les agglomérations. Elles constituent la base existentielle de nombreux sites. La question qui s’impose est de savoir jusqu’à quel point ces régions peuvent se développer économiquement sans que leurs paysages ne perdent leurs qualités naturelles et architecturales. La Confédération propose un mode de gestion respectueux du paysage avec les parcs d’importance nationale. Au cours des dernières années, des projets porteurs d’avenir ont aussi été lancés dans le cadre de la Nouvelle politique régionale (NPR), des Projets modèles pour un développement territorial durable et d’autres instruments de promotion, étatiques ou privés. Mettre le paysage en valeur est toutefois une tâche exigeante qui impacte à long terme les domaines les plus divers de la vie et de l’économie.
Stefan Steuri, du Parcnaturel du Gantrisch © regiosuisse

La région du Gantrisch était un paysage peu connu il y a encore une décennie. Ceci a changé au cours des dernières années. Cette région préalpine boisée, avec les cours d’eau encaissés de la Sense et de la Schwarzwasser, la chaîne du Gantrisch et du Gurnigel, ses sites marécageux, le Schwarzsee ainsi que le paysage sauvage de la Brecca, fait partie depuis 2012 du cercle restreint des parcs naturels régionaux de Suisse, sous la marque «Parc naturel régional du Gantrisch» (RNG). Comme 18 autres régions, le RNG est soumis à l’ordonnance sur les parcs d’importance nationale (OParcs) et considéré comme une région modèle pour le développement régional durable. L’ordonnance sur les parcs permet à la Confédération de soutenir financièrement la création et la gestion de parcs dans des territoires à forte valeur naturelle et paysagère.

Offres attractives

«La création du Parc a déclenché toute une série de projets dans notre région», déclare Ramona Gloor, porte-parole du RNG. Des offres touristiques mettent aujourd’hui en valeur la région du Gantrisch comme paysage alpin d’activités de plein air, région de vélo et de VTT ou parc aventure. Une autre attraction est le Gäggersteg, passerelle rénovée récemment, depuis laquelle les visiteuses et les visiteurs observent de tout près comment la forêt s’est développée depuis la tempête Lothar de fin 1999.

Ramona Gloor qualifie la création et la gestion du Parc de «tâche exigeante». Lors des week-ends de beau temps par exemple, les sites marécageux naturels et les paysages fluviaux sauvages subissent rapidement la pression des loisirs de proximité. L’équipe du Parc naturel du Gantrisch relève ce défi par un guidage ciblé des visiteurs et avec l’appui des gardes forestiers qui aiguillent les visiteurs sur les bons chemins. Ramona Gloor conclut: «Nous ne voulons pas attirer plus de visiteurs dans la région du Gantrisch avec des offres toujours plus nombreuses. Le tourisme doit être fondé sur les principes de la durabilité et correspondre aux valeurs de notre Parc.»

Le Parc naturel en tant que marque phare

L’agriculture et la sylviculture et le commerce local bénéficient économiquement du Parc naturel. À l’heure actuelle, plus de 300 produits sont commercialisés sous le label «Parcs suisses». L’organisation du Parc est elle-même un mandant et un employeur important. Elle fonctionne en outre comme plateforme de mise en réseau pour les acteurs impliqués. «Depuis la création du Parc naturel, un vent de renouveau souffle dans notre région. Le Parc a aidé la région du Gantrisch à trouver une identité propre», constate Ramona Gloor. Cette région des Préalpes bernoises et fribourgeoises proche de la nature s’est établie comme région autonome et comme marque touristique. Elle est devenue un cas exemplaire de mise en valeur durable du paysage et de renforcement de sa qualité.

Les expertes et les experts du Centre interdisciplinaire pour le développement durable et l’environnement (CDE) de l’Université de Berne dressent ce bilan dans le rapport d’évaluation qu’ils ont rédigé à l’attention du canton de Berne, responsable du Parc. Ce rapport prouve chiffres à l’appui que le Parc contribue au renforcement et à la promotion de l’économie régionale: la valeur ajoutée touristique induite par le Parc naturel s’est élevée en 2018 à quelque 7,3 millions de francs, ce qui correspond à 87 emplois à plein temps; la valeur ajoutée supplémentaire créée à partir des produits régionaux s’est élevée à près de 9 millions de francs au cours de la période 2012-2018. Ces montants ne tiennent pas compte des prestations de revalorisation de la nature et du paysage fournies par les paysans et des organisations privées dans le Parc telles que : maintien de prairies et de pâturages (débroussaillage), entretien des haies, nouvelles plantations, entretien des sites de nidification, rénovation de murs en pierres sèches, etc. Mais les expertes et les experts voient encore un potentiel de développement économique pour le RNG, par exemple avec le bois ou la restauration.

Il est possible de dresser un bilan aussi positif pour la plupart des 18 parcs suisses d’importance nationale qui occupent ensemble plus de 5200 kilomètres carrés, soit environ un huitième de la surface du pays. Le but que la Confédération poursuit avec les parcs d’importance nationale – conserver et valoriser une nature et des paysages de qualité en harmonie avec un développement économique régional durable – coïncide en grande partie avec les objectifs de la Nouvelle politique régionale (NPR).

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La Conception Paysage Suisse (CPS) comme ligne directrice

Les paysages de notre pays densément peuplé sont la plupart du temps des espaces animés, façonnés par l’homme, occupés et exploités de diverses façons: comme espaces dans lesquels la population vit, habite, travaille, se détend et s’adonne à des activités physiques, culturelles et économiques et aussi comme base territoriale de la biodiversité. Ce sont des paysages qui se sont développés au fil des siècles et qui ont été énormément transformés au cours des dernières décennies. Dans notre société marquée par la croissance de l’économie et de la mobilité, ils doivent satisfaire aux exigences les plus diverses. La Conception Paysage Suisse (CPS)1 actualisée, que le Conseil fédéral a adoptée en 2020, est la véritable ligne directrice pour une conciliation des intérêts. Elle définit le cadre d’une évolution du paysage cohérente et axée sur la qualité. La vision du Conseil fédéral est que la beauté et la diversité des paysages suisses, avec leurs particularités naturelles et culturelles régionales, offrent une qualité de vie et de site élevée aux générations tant actuelles que futures. Afin de réaliser cette vision, la CPS définit sept objectifs généraux de qualité paysagère ainsi que des objectifs sectoriels coordonnés avec ceux-ci pour les politiques sectorielles qui sont pertinentes pour le paysage. La CPS joue le rôle d’instrument de coordination des différentes lois et instruments traitant du paysage qui concernent la protection de la nature et du paysage, l’aménagement du territoire, la politique agricole, la défense nationale, la politique régionale ou le tourisme. Ainsi par exemple le développement régional doit mieux tenir compte de la diversité des paysages, et de leurs valeurs naturelles et culturelles régionales comme qualités essentielles. Une attention particulière doit être accordée à la qualité de chaque site, à ses caractéristiques uniques, et contribuer tant à leur préservation qu’à un développement économique durable.

Le canton en tant que coordinateur et pionnier

Développer des projets qui répondent aux exigences sociétales de qualité élevée du paysage, qui connaissent le succès économique et sont donc globalement durables est un défi pour leurs initiateurs. Il s’agit de définir le rayon d’action à l’intérieur duquel les charges et les produits économiques coïncident à peu près, mais aussi se retrouvent dans les multiples prescriptions, possibilités de soutien et niveaux d’action. La voie est maintenant ouverte par des exemples, des instruments et des offres de soutien couronnés de succès. Avec sa «Piattaforma paesaggio», le canton du Tessin a par exemple établi au sein de sa Section du développement territorial un service d’assistance qui coordonne les projets de ce type. Cette plateforme sert de guichet unique aux initiateurs de projets, qu’il s’agisse de communes, de corporations ou d’associations. Des expertes et des experts apportent leur aide pour le financement, conseillent et accompagnent les requérantes et requérants et les orientent vers d’autres possibilités de soutien, par exemple vers des organisations et des fondations privées. «L’engagement financier du canton est souvent une condition déterminante pour obtenir un autre soutien», explique Paolo Poggiati, président de la «Piattaforma paesaggio». De 2008 à 2018, celle-ci a traité 57 projets pour un volume total d’investissements d’environ 30 millions de francs. Surtout, elle fédère aussi les tâches de tous les services cantonaux impliqués (économie, forêt et agriculture, protection de la nature et du paysage, conservation des monuments historiques, etc.). «Les projets sont extrêmement importants surtout pour les vallées latérales et les régions de montagne reculées, souligne Paolo Poggiati. Les initiatives y ont ranimé des chaînes locales de création de valeur ajoutée et suscité de nouvelles formes de collaboration.»

Les bonnes pratiques du développement régional lié au paysage

Sur mandat de l’OFEV, PLANVAL AG a examiné les possibilités et les moyens pratiques de considérer le paysage comme un potentiel de développement régional durable, ainsi que la façon dont les régions peuvent profiter concrètement d’une thématique «paysage». Cette étude2  inclut plus de cent projets paysagers et classe leurs stratégies de mise en valeur du paysage en trois catégories: «marché» (lieu de résidence, tourisme, énergie), «compensation pour la préservation» ou «mixte» (parcs, agriculture). Elle approfondit enfin douze exemples types de Suisse dont le contenu couvre un large éventail de domaines d’activité. La mise en valeur réussit le mieux lorsque les potentiels spécifiques d’un paysage sont identifiés, exploités de manière ciblée et préservés. Dans la plupart des cas, ceci requiert l’interaction de plusieurs domaines tels que le tourisme, l’agriculture et protection de la nature. Une caractéristique centrale de ces exemples types est qu’un service veille à leur pilotage à long terme et à leur coordination. Les stratégies régionales se sont révélées très utiles à cet effet (cf. regioS 17). Pour la mise en pratique, l’étude esquisse un modèle doté de voies de développement divisibles en six phases. Elle souligne également l’orientation à long terme. Les participants font rarement l’expérience de succès rapides. Le succès exige au contraire ténacité, persévérance et patience.

© regiosuisse Basé sur: «Landschaft als Leitthema für eine nachhaltige Regionalentwicklung». Eine Analyse von Musterbeispielen. Schlussbericht. PLANVAL, sur mandat de l’OFEV. Berne, 2019.

«100 % Valposchiavo»

Le développement du paysage dans le val Poschiavo, où se déroule actuellement la deuxième étape du projet «100 % Valposchiavo», le montre de façon impressionnante. Le but de ce projet est que, d’ici 2028, toutes les paysannes et tous les paysans de la vallée non seulement cultivent leurs exploitations de manière biologique, mais aussi transforment eux-mêmes tous leurs produits – produits laitiers et carnés, farine de sarrasin, fines herbes, fruits, etc. – et les commercialisent sous la marque «100 % Valposchiavo». La région crée ainsi une chaîne de création de valeur ajoutée intégrée. Avec un franc succès: «Plus de cent produits ont déjà le certificat», déclare Cassiano Luminati, directeur du Polo Poschiavo. Depuis 2015, la plupart des restaurants de la vallée ont à leur carte des spécialités préparées exclusivement avec des ingrédients locaux. La Confédération participe aux coûts de l’étape actuelle (2021-2028) à raison de 10,7 millions de francs dans le cadre du programme des projets de développement régional (PDR) de l’Office fédéral de l’agriculture. La transformation du val Poschiavo en une «bio smart valley» innovante a été planifiée de longue date. «La vallée compte parmi les pionniers de l’agriculture biologique», rappelle Cassiano Luminati. À l’heure actuelle, 95 % de la surface agricole est déjà exploitée de manière biologique – un pourcentage unique en Suisse! L’inscription en 2008 de la ligne ferroviaire de la Bernina au patrimoine mondial de l’UNESCO a constitué une étape décisive pour le développement de la vallée. «Nous avons ensuite développé de manière participative une stratégie régionale centrée sur les ressources matérielles et immatérielles de notre région», poursuit Cassiano Luminati. L’objectif est de faire du paysage unique du val Poschiavo le fondement économique de son développement régional, en empruntant la voie d’une symbiose entre agriculture biologique et tourisme durable. La vallée se trouve au beau milieu d’un projet à long terme que la population mettra en œuvre pas à pas. À cet effet, celle-ci utilise habilement les nombreux instruments que la politique met à sa disposition. Avec son dernier projet, le projet-modèle «pérenniser les valeurs paysagères pour les générations futures», la vallée essaie de définir la voie de l’avenir à l’aide de «Perspectives 2040» communes. La mémoire historique de la vallée, la connaissance traditionnelle du paysage et les valeurs de la population locale doivent imprégner encore plus fortement les processus de développement régional.

Vue sur Poschiavo (GR, val Poschiavo) © regiosuisse

Inspiration historique

Quels que soient les instruments de promotion, environ deux tiers des projets de mise en valeur du paysage examinés dans l’étude de PLANVAL concernent le tourisme. Ce n’est pas un hasard, étant donné la densité unique de paysages attractifs en Suisse et l’évolution historique du pays. La «découverte des Alpes» par de jeunes voyageurs surtout anglais a pour ainsi dire été à l’origine du tourisme suisse. Sur le modèle du «Grand Tour» que Thomas Cook a mis sur pied pour la première fois en 1858 comme voyage organisé à travers la Suisse, le projet «Grand Tour of Switzerland» lancé par Suisse Tourisme en 2015 est centré sur la diversité paysagère. Cet itinéraire de 1640 kilomètres traverse, le plus souvent en voiture, les paysages les plus spectaculaires et les villes les plus attractives de Suisse. Il relie 5 cols alpins, 22 lacs, 12 sites classés au patrimoine mondial de l’UNESCO et 45 curiosités. Cette offre recourt aux infrastructures existantes de transport, de restauration et d’hébergement. Les seules nouveautés sont 650 panneaux indicateurs discrets et 48 cadres de photographie fixes qui entourent des éléments particuliers du paysage et invitent à les photographier. «Avec eux, nous mettons l’aspect iconographique des paysages et des localités au cœur de l’expérience», explique leur concepteur Matthias Imdorf, d’Erlebnisplan AG, qui était de la partie en tant que conseiller. Il est convaincu que la mise en valeur du paysage recèle encore «un potentiel presque infini».

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Utilité économique difficile à chiffrer

Les exemples de l’étude de PLANVAL démontrent de manière impressionnante qu’une utilisation et une gestion durables du paysage, axées sur la qualité et diversifiées, peuvent réussir à deux conditions: la connaissance des conditions-cadres légales complexes et une coordination adéquate des participants dans le sens d’une gouvernance optimale.

Dans de nombreux exemples, les avantages écologiques et esthétiques du paysage sont aussi évidents que les bénéfices immatériels tels que gain de prestige, culture de la coopération ou nouveaux réseaux socio-économiques. Un défi subsiste: faute de données, il est souvent difficile de savoir précisément quelle création de valeur ajoutée concrète il est effectivement possible d’atteindre avec des produits et des services liés au paysage. On ne peut déterminer qu’indirectement les avantages économiques que perd une région lorsqu’elle renonce à la mise en valeur du paysage. Il faut encore fournir certains travaux économiques de base sur ce point. «Il est certes possible de calculer assez précisément dans la plupart des cas l’utilité immédiate du paysage, par exemple pour l’agriculture et la sylviculture ou pour une région et une problématique concrète, mais les services culturels et touristiques du paysage sont difficiles à chiffrer globalement», constate une méta-étude3 menée par des économistes de la HES-SO Genève.

Il n’existe pas forcément de lien direct entre la valeur écologique d’un paysage, par exemple comme point chaud de biodiversité, et sa valeur économique. Un parc urbain très fréquenté est peut-être plus précieux économiquement qu’une région naturelle périphérique. Afin de chiffrer quand même la valeur et les prestations d’un paysage, l’économie du paysage se sert de méthodes indirectes, par exemple de la valeur des biens immobiliers, pour évaluer la vue sur un lac ou sur des montagnes. Une étude de l’OFEV4 de 2014 estime de cette façon la valeur récréative de la forêt suisse à deux à quatre milliards de francs par an. Une étude5 de l’EPFZ et du Réseau des parcs suisses publiée en 2018 chiffre la création de valeur ajoutée touristique à 22 millions de francs par an pour le Parc paysager de la vallée de Binn et à 106 millions pour le Parc Ela.

Globalement, les évidences en termes d’évaluation économique du paysage sont donc encore insatisfaisantes à l’heure actuelle. Mais la mesurabilité de la création de valeur ajoutée induite par le paysage serait une condition importante pour aborder de manière plus ciblée le développement régional lié au paysage. L’expert en tourisme Jürg Schmid voit surtout dans le tourisme proche de la nature des possibilités de croissance supérieures à la moyenne. Elles pourraient être exploitées sans porter atteinte à la qualité des paysages. Selon lui, «les parcs naturels régionaux et les régions inscrites au patrimoine mondial présentent l’essence de la nature suisse et de la diversité régionale. Mais il manque des offres qui donnent envie aux visiteurs et plus spécifiquement aussi des expériences destinées au marché du voyage haut de gamme qui transforment l’important potentiel en création de valeur ajoutée».

Il existe donc des potentiels, des instruments et de bons modèles pour exploiter et promouvoir la grande qualité paysagère des régions de Suisse. Ce qu’il faut surtout, ce sont des personnes engagées et endurantes, qui ont de bonnes idées, qui identifient les potentiels et qui incitent les différents prestataires à participer.

Cadre légal et instruments de promotion

Législation pertinente pour le paysage: Constitution fédérale (Cst.), loi sur l’aménagement du territoire (LAT), loi fédérale sur la protection de la nature et du paysage (LPN), ordonnance sur les parcs (OParcs), loi sur l’agriculture (LAgr), loi sur les forêts (LFo), loi sur la protection des eaux (LEaux), loi fédérale sur les chemins pour piétons et les chemins de randonnée pédestre (LCPR), loi sur la chasse (LChP), loi fédérale sur la pêche (LFSP), loi sur l’énergie (LEne), loi sur les routes nationales (LRN), loi sur les chemins de fer (LCdF), Conception Paysage Suisse (CPS), etc.

Instruments de promotion de la Confédération: Nouvelle politique régionale(NPR), politique fédérale des parcs, conventions-programmes dans le domaine de la protection de la nature et du paysage, aides financières en vertu de l’art. 13 LPN (voies de communication historiques, localités caractéristiques et conservation des monuments historiques), projets de développement régional (PDR), projets de qualité du paysage (PQP), projets-modèles pour un développement territorial durable (MoVo), promotion touristique (Innotour), Fonds Suisse pour le Paysage, etc.

gantrisch.ch

valposchiavo.ch

grandtour.myswitzerland.com

regiosuisse.ch/npr

parks.swiss

bafu.admin.ch/parcs

blw.admin.ch/pdr

regiosuisse.ch/aides-financieres

Bibliographie et informations supplémentaires

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Le paysage: capital d’une région de montagne

Lukas Denzler

Avec leur paysage naturel, les Préalpes zurichoises contrastent à maints égards avec l’agglomération trépidante de Zurich. L’association Pro Zürcher Berggebiet a identifié cet atout et souhaite, avec le Canton, mettre davantage en valeur le paysage dans le cadre de la Nouvelle politique régionale (NPR). Dix communes de l’Oberland zurichois et de la vallée de la Töss ainsi que deux communes thurgoviennes et une commune saint-galloise sont membres de l’association. Dans ce périmètre NPR intercantonal, le canton de Zurich est responsable du programme vis-à-vis de la Confédération.

L’orientation fondamentale de la NPR dans le canton de Zurich a consisté dès le début à accroître la valeur ajoutée régionale à partir des qualités paysagères. Avec l’objectif « Ruhelandschaft (paysage reposant) », il est prévu de positionner les Préalpes zurichoises comme lieu de repos, de temps pour soi et de santé. Une étude de base de la Haute école zurichoise des sciences appliquées (ZHAW) sur le potentiel des Préalpes zurichoises – une première étape importante du projet – confirme le potentiel qu’offre l’intégration des valeurs existantes dans les chaînes régionales de création de valeur ajoutée. Des thèmes comme le repos, le temps pour soi et la santé répondent aux besoins sociaux de détente, de décélération et d’équilibre. Durant la période NPR actuelle, il est prévu de relier les offres existantes avec les nouvelles offres, par exemple celles du prieuré bénédictin de Fischingen, une oasis de paix pour les cours et les séminaires et aussi un petit bijou pour les manifestations culturelles. Pour lancer des projets concrets, il est également important de rendre visible le potentiel qui s’offre avec ce paysage reposant pour les acteurs régionaux et la population locale. Une meilleure compatibilité du travail et de l’habitat, par exemple grâce à de nouveaux espaces de coworking, doit également contribuer à développer l’Oberland zurichois comme espace complémentaire des régions urbaines.

prozb.ch

zh.ch/lares

regiosuisse.ch/npr

La version complète est disponible en allemand et en italien.

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