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Paysage et développement régional: un défi qu’il vaut la peine de relever

Pirmin Schilliger & Urs Steiger
La beauté et la spécificité du paysage constituent un facteur économique central dans de nombreuses régions rurales ou de montagne de la Suisse mais aussi dans les agglomérations. Elles constituent la base existentielle de nombreux sites. La question qui s’impose est de savoir jusqu’à quel point ces régions peuvent se développer économiquement sans que leurs paysages ne perdent leurs qualités naturelles et architecturales. La Confédération propose un mode de gestion respectueux du paysage avec les parcs d’importance nationale. Au cours des dernières années, des projets porteurs d’avenir ont aussi été lancés dans le cadre de la Nouvelle politique régionale (NPR), des Projets modèles pour un développement territorial durable et d’autres instruments de promotion, étatiques ou privés. Mettre le paysage en valeur est toutefois une tâche exigeante qui impacte à long terme les domaines les plus divers de la vie et de l’économie.
Stefan Steuri, du Parcnaturel du Gantrisch © regiosuisse

La région du Gantrisch était un paysage peu connu il y a encore une décennie. Ceci a changé au cours des dernières années. Cette région préalpine boisée, avec les cours d’eau encaissés de la Sense et de la Schwarzwasser, la chaîne du Gantrisch et du Gurnigel, ses sites marécageux, le Schwarzsee ainsi que le paysage sauvage de la Brecca, fait partie depuis 2012 du cercle restreint des parcs naturels régionaux de Suisse, sous la marque «Parc naturel régional du Gantrisch» (RNG). Comme 18 autres régions, le RNG est soumis à l’ordonnance sur les parcs d’importance nationale (OParcs) et considéré comme une région modèle pour le développement régional durable. L’ordonnance sur les parcs permet à la Confédération de soutenir financièrement la création et la gestion de parcs dans des territoires à forte valeur naturelle et paysagère.

Offres attractives

«La création du Parc a déclenché toute une série de projets dans notre région», déclare Ramona Gloor, porte-parole du RNG. Des offres touristiques mettent aujourd’hui en valeur la région du Gantrisch comme paysage alpin d’activités de plein air, région de vélo et de VTT ou parc aventure. Une autre attraction est le Gäggersteg, passerelle rénovée récemment, depuis laquelle les visiteuses et les visiteurs observent de tout près comment la forêt s’est développée depuis la tempête Lothar de fin 1999.

Ramona Gloor qualifie la création et la gestion du Parc de «tâche exigeante». Lors des week-ends de beau temps par exemple, les sites marécageux naturels et les paysages fluviaux sauvages subissent rapidement la pression des loisirs de proximité. L’équipe du Parc naturel du Gantrisch relève ce défi par un guidage ciblé des visiteurs et avec l’appui des gardes forestiers qui aiguillent les visiteurs sur les bons chemins. Ramona Gloor conclut: «Nous ne voulons pas attirer plus de visiteurs dans la région du Gantrisch avec des offres toujours plus nombreuses. Le tourisme doit être fondé sur les principes de la durabilité et correspondre aux valeurs de notre Parc.»

Le Parc naturel en tant que marque phare

L’agriculture et la sylviculture et le commerce local bénéficient économiquement du Parc naturel. À l’heure actuelle, plus de 300 produits sont commercialisés sous le label «Parcs suisses». L’organisation du Parc est elle-même un mandant et un employeur important. Elle fonctionne en outre comme plateforme de mise en réseau pour les acteurs impliqués. «Depuis la création du Parc naturel, un vent de renouveau souffle dans notre région. Le Parc a aidé la région du Gantrisch à trouver une identité propre», constate Ramona Gloor. Cette région des Préalpes bernoises et fribourgeoises proche de la nature s’est établie comme région autonome et comme marque touristique. Elle est devenue un cas exemplaire de mise en valeur durable du paysage et de renforcement de sa qualité.

Les expertes et les experts du Centre interdisciplinaire pour le développement durable et l’environnement (CDE) de l’Université de Berne dressent ce bilan dans le rapport d’évaluation qu’ils ont rédigé à l’attention du canton de Berne, responsable du Parc. Ce rapport prouve chiffres à l’appui que le Parc contribue au renforcement et à la promotion de l’économie régionale: la valeur ajoutée touristique induite par le Parc naturel s’est élevée en 2018 à quelque 7,3 millions de francs, ce qui correspond à 87 emplois à plein temps; la valeur ajoutée supplémentaire créée à partir des produits régionaux s’est élevée à près de 9 millions de francs au cours de la période 2012-2018. Ces montants ne tiennent pas compte des prestations de revalorisation de la nature et du paysage fournies par les paysans et des organisations privées dans le Parc telles que : maintien de prairies et de pâturages (débroussaillage), entretien des haies, nouvelles plantations, entretien des sites de nidification, rénovation de murs en pierres sèches, etc. Mais les expertes et les experts voient encore un potentiel de développement économique pour le RNG, par exemple avec le bois ou la restauration.

Il est possible de dresser un bilan aussi positif pour la plupart des 18 parcs suisses d’importance nationale qui occupent ensemble plus de 5200 kilomètres carrés, soit environ un huitième de la surface du pays. Le but que la Confédération poursuit avec les parcs d’importance nationale – conserver et valoriser une nature et des paysages de qualité en harmonie avec un développement économique régional durable – coïncide en grande partie avec les objectifs de la Nouvelle politique régionale (NPR).

© regiosuisse

La Conception Paysage Suisse (CPS) comme ligne directrice

Les paysages de notre pays densément peuplé sont la plupart du temps des espaces animés, façonnés par l’homme, occupés et exploités de diverses façons: comme espaces dans lesquels la population vit, habite, travaille, se détend et s’adonne à des activités physiques, culturelles et économiques et aussi comme base territoriale de la biodiversité. Ce sont des paysages qui se sont développés au fil des siècles et qui ont été énormément transformés au cours des dernières décennies. Dans notre société marquée par la croissance de l’économie et de la mobilité, ils doivent satisfaire aux exigences les plus diverses. La Conception Paysage Suisse (CPS)1 actualisée, que le Conseil fédéral a adoptée en 2020, est la véritable ligne directrice pour une conciliation des intérêts. Elle définit le cadre d’une évolution du paysage cohérente et axée sur la qualité. La vision du Conseil fédéral est que la beauté et la diversité des paysages suisses, avec leurs particularités naturelles et culturelles régionales, offrent une qualité de vie et de site élevée aux générations tant actuelles que futures. Afin de réaliser cette vision, la CPS définit sept objectifs généraux de qualité paysagère ainsi que des objectifs sectoriels coordonnés avec ceux-ci pour les politiques sectorielles qui sont pertinentes pour le paysage. La CPS joue le rôle d’instrument de coordination des différentes lois et instruments traitant du paysage qui concernent la protection de la nature et du paysage, l’aménagement du territoire, la politique agricole, la défense nationale, la politique régionale ou le tourisme. Ainsi par exemple le développement régional doit mieux tenir compte de la diversité des paysages, et de leurs valeurs naturelles et culturelles régionales comme qualités essentielles. Une attention particulière doit être accordée à la qualité de chaque site, à ses caractéristiques uniques, et contribuer tant à leur préservation qu’à un développement économique durable.

Le canton en tant que coordinateur et pionnier

Développer des projets qui répondent aux exigences sociétales de qualité élevée du paysage, qui connaissent le succès économique et sont donc globalement durables est un défi pour leurs initiateurs. Il s’agit de définir le rayon d’action à l’intérieur duquel les charges et les produits économiques coïncident à peu près, mais aussi se retrouvent dans les multiples prescriptions, possibilités de soutien et niveaux d’action. La voie est maintenant ouverte par des exemples, des instruments et des offres de soutien couronnés de succès. Avec sa «Piattaforma paesaggio», le canton du Tessin a par exemple établi au sein de sa Section du développement territorial un service d’assistance qui coordonne les projets de ce type. Cette plateforme sert de guichet unique aux initiateurs de projets, qu’il s’agisse de communes, de corporations ou d’associations. Des expertes et des experts apportent leur aide pour le financement, conseillent et accompagnent les requérantes et requérants et les orientent vers d’autres possibilités de soutien, par exemple vers des organisations et des fondations privées. «L’engagement financier du canton est souvent une condition déterminante pour obtenir un autre soutien», explique Paolo Poggiati, président de la «Piattaforma paesaggio». De 2008 à 2018, celle-ci a traité 57 projets pour un volume total d’investissements d’environ 30 millions de francs. Surtout, elle fédère aussi les tâches de tous les services cantonaux impliqués (économie, forêt et agriculture, protection de la nature et du paysage, conservation des monuments historiques, etc.). «Les projets sont extrêmement importants surtout pour les vallées latérales et les régions de montagne reculées, souligne Paolo Poggiati. Les initiatives y ont ranimé des chaînes locales de création de valeur ajoutée et suscité de nouvelles formes de collaboration.»

Les bonnes pratiques du développement régional lié au paysage

Sur mandat de l’OFEV, PLANVAL AG a examiné les possibilités et les moyens pratiques de considérer le paysage comme un potentiel de développement régional durable, ainsi que la façon dont les régions peuvent profiter concrètement d’une thématique «paysage». Cette étude2  inclut plus de cent projets paysagers et classe leurs stratégies de mise en valeur du paysage en trois catégories: «marché» (lieu de résidence, tourisme, énergie), «compensation pour la préservation» ou «mixte» (parcs, agriculture). Elle approfondit enfin douze exemples types de Suisse dont le contenu couvre un large éventail de domaines d’activité. La mise en valeur réussit le mieux lorsque les potentiels spécifiques d’un paysage sont identifiés, exploités de manière ciblée et préservés. Dans la plupart des cas, ceci requiert l’interaction de plusieurs domaines tels que le tourisme, l’agriculture et protection de la nature. Une caractéristique centrale de ces exemples types est qu’un service veille à leur pilotage à long terme et à leur coordination. Les stratégies régionales se sont révélées très utiles à cet effet (cf. regioS 17). Pour la mise en pratique, l’étude esquisse un modèle doté de voies de développement divisibles en six phases. Elle souligne également l’orientation à long terme. Les participants font rarement l’expérience de succès rapides. Le succès exige au contraire ténacité, persévérance et patience.

© regiosuisse Basé sur: «Landschaft als Leitthema für eine nachhaltige Regionalentwicklung». Eine Analyse von Musterbeispielen. Schlussbericht. PLANVAL, sur mandat de l’OFEV. Berne, 2019.

«100 % Valposchiavo»

Le développement du paysage dans le val Poschiavo, où se déroule actuellement la deuxième étape du projet «100 % Valposchiavo», le montre de façon impressionnante. Le but de ce projet est que, d’ici 2028, toutes les paysannes et tous les paysans de la vallée non seulement cultivent leurs exploitations de manière biologique, mais aussi transforment eux-mêmes tous leurs produits – produits laitiers et carnés, farine de sarrasin, fines herbes, fruits, etc. – et les commercialisent sous la marque «100 % Valposchiavo». La région crée ainsi une chaîne de création de valeur ajoutée intégrée. Avec un franc succès: «Plus de cent produits ont déjà le certificat», déclare Cassiano Luminati, directeur du Polo Poschiavo. Depuis 2015, la plupart des restaurants de la vallée ont à leur carte des spécialités préparées exclusivement avec des ingrédients locaux. La Confédération participe aux coûts de l’étape actuelle (2021-2028) à raison de 10,7 millions de francs dans le cadre du programme des projets de développement régional (PDR) de l’Office fédéral de l’agriculture. La transformation du val Poschiavo en une «bio smart valley» innovante a été planifiée de longue date. «La vallée compte parmi les pionniers de l’agriculture biologique», rappelle Cassiano Luminati. À l’heure actuelle, 95 % de la surface agricole est déjà exploitée de manière biologique – un pourcentage unique en Suisse! L’inscription en 2008 de la ligne ferroviaire de la Bernina au patrimoine mondial de l’UNESCO a constitué une étape décisive pour le développement de la vallée. «Nous avons ensuite développé de manière participative une stratégie régionale centrée sur les ressources matérielles et immatérielles de notre région», poursuit Cassiano Luminati. L’objectif est de faire du paysage unique du val Poschiavo le fondement économique de son développement régional, en empruntant la voie d’une symbiose entre agriculture biologique et tourisme durable. La vallée se trouve au beau milieu d’un projet à long terme que la population mettra en œuvre pas à pas. À cet effet, celle-ci utilise habilement les nombreux instruments que la politique met à sa disposition. Avec son dernier projet, le projet-modèle «pérenniser les valeurs paysagères pour les générations futures», la vallée essaie de définir la voie de l’avenir à l’aide de «Perspectives 2040» communes. La mémoire historique de la vallée, la connaissance traditionnelle du paysage et les valeurs de la population locale doivent imprégner encore plus fortement les processus de développement régional.

Vue sur Poschiavo (GR, val Poschiavo) © regiosuisse

Inspiration historique

Quels que soient les instruments de promotion, environ deux tiers des projets de mise en valeur du paysage examinés dans l’étude de PLANVAL concernent le tourisme. Ce n’est pas un hasard, étant donné la densité unique de paysages attractifs en Suisse et l’évolution historique du pays. La «découverte des Alpes» par de jeunes voyageurs surtout anglais a pour ainsi dire été à l’origine du tourisme suisse. Sur le modèle du «Grand Tour» que Thomas Cook a mis sur pied pour la première fois en 1858 comme voyage organisé à travers la Suisse, le projet «Grand Tour of Switzerland» lancé par Suisse Tourisme en 2015 est centré sur la diversité paysagère. Cet itinéraire de 1640 kilomètres traverse, le plus souvent en voiture, les paysages les plus spectaculaires et les villes les plus attractives de Suisse. Il relie 5 cols alpins, 22 lacs, 12 sites classés au patrimoine mondial de l’UNESCO et 45 curiosités. Cette offre recourt aux infrastructures existantes de transport, de restauration et d’hébergement. Les seules nouveautés sont 650 panneaux indicateurs discrets et 48 cadres de photographie fixes qui entourent des éléments particuliers du paysage et invitent à les photographier. «Avec eux, nous mettons l’aspect iconographique des paysages et des localités au cœur de l’expérience», explique leur concepteur Matthias Imdorf, d’Erlebnisplan AG, qui était de la partie en tant que conseiller. Il est convaincu que la mise en valeur du paysage recèle encore «un potentiel presque infini».

© regiosuisse

Utilité économique difficile à chiffrer

Les exemples de l’étude de PLANVAL démontrent de manière impressionnante qu’une utilisation et une gestion durables du paysage, axées sur la qualité et diversifiées, peuvent réussir à deux conditions: la connaissance des conditions-cadres légales complexes et une coordination adéquate des participants dans le sens d’une gouvernance optimale.

Dans de nombreux exemples, les avantages écologiques et esthétiques du paysage sont aussi évidents que les bénéfices immatériels tels que gain de prestige, culture de la coopération ou nouveaux réseaux socio-économiques. Un défi subsiste: faute de données, il est souvent difficile de savoir précisément quelle création de valeur ajoutée concrète il est effectivement possible d’atteindre avec des produits et des services liés au paysage. On ne peut déterminer qu’indirectement les avantages économiques que perd une région lorsqu’elle renonce à la mise en valeur du paysage. Il faut encore fournir certains travaux économiques de base sur ce point. «Il est certes possible de calculer assez précisément dans la plupart des cas l’utilité immédiate du paysage, par exemple pour l’agriculture et la sylviculture ou pour une région et une problématique concrète, mais les services culturels et touristiques du paysage sont difficiles à chiffrer globalement», constate une méta-étude3 menée par des économistes de la HES-SO Genève.

Il n’existe pas forcément de lien direct entre la valeur écologique d’un paysage, par exemple comme point chaud de biodiversité, et sa valeur économique. Un parc urbain très fréquenté est peut-être plus précieux économiquement qu’une région naturelle périphérique. Afin de chiffrer quand même la valeur et les prestations d’un paysage, l’économie du paysage se sert de méthodes indirectes, par exemple de la valeur des biens immobiliers, pour évaluer la vue sur un lac ou sur des montagnes. Une étude de l’OFEV4 de 2014 estime de cette façon la valeur récréative de la forêt suisse à deux à quatre milliards de francs par an. Une étude5 de l’EPFZ et du Réseau des parcs suisses publiée en 2018 chiffre la création de valeur ajoutée touristique à 22 millions de francs par an pour le Parc paysager de la vallée de Binn et à 106 millions pour le Parc Ela.

Globalement, les évidences en termes d’évaluation économique du paysage sont donc encore insatisfaisantes à l’heure actuelle. Mais la mesurabilité de la création de valeur ajoutée induite par le paysage serait une condition importante pour aborder de manière plus ciblée le développement régional lié au paysage. L’expert en tourisme Jürg Schmid voit surtout dans le tourisme proche de la nature des possibilités de croissance supérieures à la moyenne. Elles pourraient être exploitées sans porter atteinte à la qualité des paysages. Selon lui, «les parcs naturels régionaux et les régions inscrites au patrimoine mondial présentent l’essence de la nature suisse et de la diversité régionale. Mais il manque des offres qui donnent envie aux visiteurs et plus spécifiquement aussi des expériences destinées au marché du voyage haut de gamme qui transforment l’important potentiel en création de valeur ajoutée».

Il existe donc des potentiels, des instruments et de bons modèles pour exploiter et promouvoir la grande qualité paysagère des régions de Suisse. Ce qu’il faut surtout, ce sont des personnes engagées et endurantes, qui ont de bonnes idées, qui identifient les potentiels et qui incitent les différents prestataires à participer.

Cadre légal et instruments de promotion

Législation pertinente pour le paysage: Constitution fédérale (Cst.), loi sur l’aménagement du territoire (LAT), loi fédérale sur la protection de la nature et du paysage (LPN), ordonnance sur les parcs (OParcs), loi sur l’agriculture (LAgr), loi sur les forêts (LFo), loi sur la protection des eaux (LEaux), loi fédérale sur les chemins pour piétons et les chemins de randonnée pédestre (LCPR), loi sur la chasse (LChP), loi fédérale sur la pêche (LFSP), loi sur l’énergie (LEne), loi sur les routes nationales (LRN), loi sur les chemins de fer (LCdF), Conception Paysage Suisse (CPS), etc.

Instruments de promotion de la Confédération: Nouvelle politique régionale(NPR), politique fédérale des parcs, conventions-programmes dans le domaine de la protection de la nature et du paysage, aides financières en vertu de l’art. 13 LPN (voies de communication historiques, localités caractéristiques et conservation des monuments historiques), projets de développement régional (PDR), projets de qualité du paysage (PQP), projets-modèles pour un développement territorial durable (MoVo), promotion touristique (Innotour), Fonds Suisse pour le Paysage, etc.

gantrisch.ch

valposchiavo.ch

grandtour.myswitzerland.com

regiosuisse.ch/npr

parks.swiss

bafu.admin.ch/parcs

blw.admin.ch/pdr

regiosuisse.ch/aides-financieres

Bibliographie et informations supplémentaires

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Le paysage: capital d’une région de montagne

Lukas Denzler

Avec leur paysage naturel, les Préalpes zurichoises contrastent à maints égards avec l’agglomération trépidante de Zurich. L’association Pro Zürcher Berggebiet a identifié cet atout et souhaite, avec le Canton, mettre davantage en valeur le paysage dans le cadre de la Nouvelle politique régionale (NPR). Dix communes de l’Oberland zurichois et de la vallée de la Töss ainsi que deux communes thurgoviennes et une commune saint-galloise sont membres de l’association. Dans ce périmètre NPR intercantonal, le canton de Zurich est responsable du programme vis-à-vis de la Confédération.

L’orientation fondamentale de la NPR dans le canton de Zurich a consisté dès le début à accroître la valeur ajoutée régionale à partir des qualités paysagères. Avec l’objectif « Ruhelandschaft (paysage reposant) », il est prévu de positionner les Préalpes zurichoises comme lieu de repos, de temps pour soi et de santé. Une étude de base de la Haute école zurichoise des sciences appliquées (ZHAW) sur le potentiel des Préalpes zurichoises – une première étape importante du projet – confirme le potentiel qu’offre l’intégration des valeurs existantes dans les chaînes régionales de création de valeur ajoutée. Des thèmes comme le repos, le temps pour soi et la santé répondent aux besoins sociaux de détente, de décélération et d’équilibre. Durant la période NPR actuelle, il est prévu de relier les offres existantes avec les nouvelles offres, par exemple celles du prieuré bénédictin de Fischingen, une oasis de paix pour les cours et les séminaires et aussi un petit bijou pour les manifestations culturelles. Pour lancer des projets concrets, il est également important de rendre visible le potentiel qui s’offre avec ce paysage reposant pour les acteurs régionaux et la population locale. Une meilleure compatibilité du travail et de l’habitat, par exemple grâce à de nouveaux espaces de coworking, doit également contribuer à développer l’Oberland zurichois comme espace complémentaire des régions urbaines.

prozb.ch

zh.ch/lares

regiosuisse.ch/npr

La version complète est disponible en allemand et en italien.

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Faire face aux crises grâce à la résilience

Pirmin Schilliger

Les priorités de la Nouvelle politique régionale (NPR) consistent certes à renforcer à long terme le développement économique des régions et à les aider à maîtriser leurs changements structurels, sans mettre l’accent sur l’intervention de crise. Mais la crise du coronavirus offre l’occasion de soumettre la stratégie actuelle à un examen critique. Voici les questions centrales: Avec quelles mesures et quels projets les régions peuvent-elles mieux se préparer aux chocs futurs et plus généralement à des changements radicaux? Que pouvons-nous éventuellement apprendre de l’étranger? Il semble clair que les aspects de la résilience devraient à l’avenir être systématiquement intégrés à la politique régionale. Mais quelle est leur signification précise?

«Au cours des dernières années, nous avons réussi à positionner solidement notre région comme destination touristique durable, ce qui nous a certainement été favorable pendant la crise – tout comme le fait d’avoir une proportion traditionnellement élevée de clients suisses», explique Martina Schlapbach, directrice de la Regiun Engiadina Bassa/Val Müstair. Ce sont surtout plusieurs projets NPR de promotion du tourisme durable qui ont contribué à amortir les conséquences de la crise. Un constat analogue est formulé dans l’Oberland bernois au sujet de la maîtrise de la crise actuelle: Stefan Schweizer, directeur de la Conférence régionale Oberland-Ost, est convaincu que, grâce à la NPR, la région a pu «réagir globalement avec un large soutien». Il pense également à de nombreux projets NPR réalisés ces derniers temps et visant un tourisme bien diversifié. Il soulève toutefois la question de savoir dans quelle mesure on peut se préparer à une situation aussi exceptionnelle que la crise du coronavirus.

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Tirer les conclusions correctes

Si la pandémie diminuait rapidement, de sorte que l’économie puisse se redresser promptement, on pourrait la qualifier de cas isolé ou d’événement exceptionnel qui ne devrait pas être surinterprété et dont il ne faudrait pas tirer de conclusions erronées. Mais les signes de la deuxième vague indiquent une autre direction: les élus, l’économie et la société sont toujours confrontés au défi d’unir leurs forces pour maîtriser la crise et limiter au mieux les dégâts sanitaires et économiques. Il s’agit en outre d’analyser rapidement et minutieusement les effets de cet événement et d’en tirer les conséquences correctes. La question qui se pose dans le cadre de la NPR est de savoir quelles sont les faiblesses fondamentales de la structure économique régionale révélées par la pandémie. Ce processus d’analyse s’impose spécialement dans les régions qui ont particulièrement souffert des conséquences de la pandémie. Leur vulnérabilité et leur degré d’exposition aux crises devraient être examinés avec la plus grande rigueur. Les acteurs impliqués sont notamment curieux de savoir comment une région peut mieux se préparer aux chocs futurs et aux changements radicaux. Ils se demandent également s’il est possible d’atténuer dès aujourd’hui les risques et les dangers associés ou peut-être même de les transformer en opportunités.

Un futur développement régional strictement aligné sur les critères de la résilience pourrait fournir une solution. Mais que signifie cette notion? Celle-ci vient du latin «resilire», qui veut dire «sauter en arrière» ou «rebondir». La «résilience» décrit la capacité d’un système à revenir à son état initial après des perturbations. On parle depuis longtemps de résilience en psychologie. Une personne résiliente résiste aux traumatismes et reste stable psychiquement même dans les situations de crise.

Il est aussi question de résilience en économie et en écologie depuis environ deux décennies. Tout comme un individu, un système complexe peut aussi maintenir ses structures et ses fonctions stables et intactes grâce à une adaptation constante même en phase de changements violents. Ce n’est pas un hasard si cette notion a toujours la cote en temps de crise – durant la crise financière de 2008, celle de l’euro en 2015 ou maintenant celle du coronavirus. Les pionnières mondiales des stratégies de développement territorial axées sur la résilience sont les cent grandes villes qui ont rejoint en 2011 le programme international «Global Resilient Cities Network» lancé par la Fondation Rockefeller. Le but proprement dit de ce programme consiste à rendre les villes plus résistantes aux événements climatiques extrêmes et au stress environnemental.

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Un modèle et d’autres approches

Le concept de résilience connu en urbanisme a récemment fait son apparition dans le domaine du développement des régions rurales. Il en est question en Autriche au plus tard en 2010, date de parution de l’étude du bureau ÖAR Regionalberatung GmbH intitulée «Comment les régions gèrent-elles les crises?» et réalisée sur mandat de la Chancellerie fédérale autrichienne. Les chercheurs en politique régionale de ce pays sont parvenus à la conclusion que les régions résilientes empruntent l’une des trois voies d’évolution possibles en situation de détresse: soit elles surmontent la crise sans changements négatifs (voie 1), soit elles sont en mesure de compenser les changements négatifs en peu de temps (2), voire même de les surcompenser (3). Dans le meilleur des cas, elles sortent donc renforcées de la crise. Dans ce sens, la résilience est l’antidote à la vulnérabilité. En situation de crise, une région résiliente est capable de mobiliser des forces de guérison insoupçonnées. Elle trouve rapidement la bonne réponse aux menaces et aux défis. Ces trois voies d’évolution reposent sur des indicateurs sociaux, écologiques et économiques clairement identifiables et mesurables, qui incluent notamment: l’évolution démographique, la satisfaction dans la vie, les dépenses pour la culture, la qualité de l’environnement, l’exposition aux risques, la valeur ajoutée, la mixité des entreprises, les créations d’entreprises, etc. Dans son étude, ÖAR Regionalberatung GmbH a développé un modèle global de résilience. Le cheminement à suivre pour devenir une région résiliente passe par des processus conscients de pilotage, d’organisation et de compensation. Ces processus combinent le principe fondamental du développement durable avec la diversification économique et sociale, la formation et la formation continue, l’orientation vers l’avenir ainsi que l’innovation et la culture de l’erreur.

Il existe maintenant d’autres approches que le modèle de l’ÖAR, qui montrent comment la résilience pourrait être établie dans les espaces ruraux ou périphériques. Gabi Troeger-Weiss, responsable de la chaire de développement régional à l’Université technique de Kaiserslautern, fait surtout de la recherche sur les risques spécifiques aux territoires. Elle étudie la façon dont les tendances démographiques, sociales, climatologiques et économiques (comme la numérisation) pourraient influer sur la résilience future de la région. L’association Développement rural du land de Bavière a lancé en 2019 dans l’Oberallgäu un projet pilote qui a pour but d’identifier les points d’ancrage où la résilience peut être prise en compte dans le développement régional. La Resilient Regions Association, qui a créé à cet effet une plateforme politiquement neutre à Malmö (Suède), aborde ce thème avec pragmatisme. Des représentantes et des représentants de hautes écoles, de l’économie, des communes, des régions et des entreprises se rencontrent régulièrement pour résoudre des problèmes régionaux sous l’angle de la résilience.

Daniel Deimling et Dirk Raith poursuivent une approche au contenu plus large. Ces deux chercheurs en politique régionale de l’Université de Graz préconisent une vision alternative de la résilience régionale comme futur paradigme du développement régional. Ce type de résilience ne devrait pas se limiter à une simple adaptation aux crises et aux chocs externes, mais bien plutôt avoir une dimension transformatrice et viser une re-régionalisation et une relocalisation. Il faudrait rendre les régions capables de s’adapter à des conditions cadres complètement différentes. Les régions périphériques pourraient ainsi briser le cercle vicieux de l’exode et de la dégradation des conditions de vie.

Vulnérabilité et résilience
Les notions de vulnérabilité et de résilience sont devenues une catégorie centrale de plusieurs disciplines académiques depuis les années 1980. Au-delà de la discipline de la géographie, les deux termes ont fait leur apparition dans le domaine du développement territorial, surtout à propos des dangers naturels et du changement climatique. Le cœur conceptuel de la théorie de la vulnérabilité et de la résilience réside dans une double approche structurelle: la vulnérabilité résulte de risques externes auxquels un territoire ou une région est exposé(e) ainsi que d’un manque de résilience, donc d’un manque de moyens pour maîtriser les menaces. L’analyse de la vulnérabilité et de la résilience territoriales et sociales se concentre donc sur l’interaction entre l’exposition aux risques et les possibilités de maîtriser leurs conséquences autant que possible sans dommages importants lorsque ces risques se réalisent.

Wisner B., Blakie P., Cannon T.: At Risk. Natural hazards, people’s vulnerability and disasters. London, 2004.

Résilience: l’avenir du développement régional et territorial durable

En Suisse, on parle de résilience depuis longtemps surtout dans la recherche, mais aussi dans la mise en œuvre de la NPR, quoiqu’inconsciemment. «De nombreuses mesures de la NPR visent à déployer un effet durable et stabilisateur. La plupart des projets lancés jusqu’à présent contribuent au moins à la résilience, même si on n’en parlait pas explicitement», déclare Johannes Heeb, responsable du domaine formation-regiosuisse. «Il manque toutefois à ce jour une approche systématique de la question», souligne-t-il. Mais des changements sont prévus. La résilience devient aussi un thème explicite dans la NPR, notamment sous la pression de la crise du coronavirus. Avec le module de formation continue en ligne «Développer des régions résilientes», formation-regiosuisse a précisément abordé ce thème cet automne. Ce webinaire s’adressait à tous les acteurs du développement régional. Il leur a permis de se familiariser avec les bases de la résilience et de développer des approches concrètes pour l’action pratique. «Nous transposons les concepts théoriques disponibles vers le niveau pratique régional», explique Johannes Heeb. Agilité, innovation, culture d’équipe et de projet ainsi que prévention sont utilisées comme éléments opérationnels dans la gestion de la résilience. «Notre objectif, souligne Johannes Heeb, est de rendre les régions capables de réagir de façon stabilisatrice aux changements et aux crises et d’exploiter ceux-ci comme stimulateurs de l’innovation et du développement futur.»

Rendre les régions plus résilientes repose donc sur un processus complexe. Un «baromètre de la résilience» comme celui qu’a développé l’Institut Pestel de Hanovre pourrait aider les régions à ne pas devoir prendre des décisions à l’aveugle dans leur effort de résilience. Cet instrument analyse et mesure la vulnérabilité d’une région au moyen de 18 indicateurs. Il aide à évaluer jusqu’à quel point une région reste capable d’agir en cas de crise. Il montre en outre comment cette capacité d’action peut être améliorée préventivement par l’acquisition de ressources, par le capital social et la flexibilité. Développé en priorité pour les régions de l’UE, ce «baromètre de la résilience» pourrait aussi devenir – une fois adapté aux conditions suisses – un instrument très utile pour les régions NPR.

Comment rendre une région plus résiliente?
En tant qu’instrument de prévention, la résilience vise à réduire la vulnérabilité ou l’exposition aux crises d’une région ainsi que les accumulations de risques. Les stratégies suivantes y contribuent:

  • diversification de l’économie au lieu d’une monostructure – donc plusieurs branches, entreprises de différentes tailles, relations commerciales, de travail et résidentielles diversifiées;
  • ressources humaines et capital social: niveau de formation élevé et personnel qualifié largement mobilisable, structure démographique et pyramide des âges équilibrées;
  • gouvernance régionale efficiente et organisée activement, avec des stratégies d’avenir fondées sur les atouts régionaux;
  • orientation vers l’avenir et détection précoce des évolutions à long terme (ce que la NPR vise par le biais de stratégies régionales, cf. regioS 17);
  • ouverture au changement, flexibilité, agilité, capacité d’innovation, multidisciplinarité;
  • capacité d’apprendre et de coopérer, réseaux de communication denses, feed-back rapide, curiosité et ouverture.

En fin de compte, la résilience n’est pas un état visé, mais un processus qui aboutit, à l’aide d’une méthodologie spécifique, au développement durable d’une région et à une meilleure gestion des crises.

Projet-modèle dans le Haut-Valais

Le bureau de conseil EBP, en collaboration avec le Centre régional et économique du Haut-Valais SA (RWO), fournit un travail de pionnier à cet égard. Il a développé un outil d’analyse de la résilience territoriale qui repose en partie sur les concepts internationaux précités (Fondation Rockefeller, Institut Pestel, Office fédéral allemand des routes, etc.). Le projet-modèle «La résilience des régions de montagne: la mise à profit des avantages du Haut-Valais» teste maintenant cet outil pour la première fois dans des régions de montagne suisses, plus précisément dans la commune de Mörel-Filet et dans le Lötschental. «Cet outil d’analyse repose sur un questionnaire comprenant 10 thématiques, 21 sous-thèmes et 80 indicateurs que nous examinons en détail non seulement au moyen de chiffres et de statistiques, mais aussi de questions qualitatives posées aux acteurs locaux», explique le chef de projet Christian Willi. L’objectif de ce projet-modèle est d’intégrer les résultats de l’analyse de résilience dans une stratégie régionale de développement pour les communes de montagne haut-valaisannes, avec un catalogue de mesures concrètes. L’analyse est dirigée par EBP. Les mesures de la stratégie de développement sont mises en œuvre surtout avec RWO et d’autres acteurs régionaux. Ce projet fait partie des projets-modèles 2020-2024 de la Confédération pour un développement territorial durable. «Les connaissances acquises grâce à ce projet pilote peuvent aussi être exploitées pour établir une culture de la résilience dans d’autres régions», souligne Christian Willi, pour que le souci de la résilience soit à l’avenir intégré systématiquement dans l’ensemble des stratégies régionales de développement ainsi que dans les mesures et projets associés.

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Bottom-up: agir à partir de chaque région

La crise du coronavirus a brutalement révélé la vulnérabilité des régions. Elle ne correspond toutefois qu’à l’un des nombreux scénarios de crise ou de menace. La question de la minimisation des risques et de la prévention est d’autant plus urgente pour l’avenir. Martina Schlapbach, de la Regiun Engiadina Bassa/Val Müstair, est convaincue qu’il est possible de rendre plus résiliente n’importe quelle région structurellement faible. Mais elle plaide en faveur de solutions adaptées à chaque région lors de la mise en œuvre. «On devrait tenir compte du fait que la faiblesse structurelle est perçue et définie tout autrement à l’intérieur d’une région qu’à l’extérieur. La résilience doit par conséquent correspondre précisément aux besoins de la population. La stratégie de développement actuelle a en tout cas fait ses preuves pendant la crise du coronavirus, poursuit-elle. Nous avons été confortés dans l’idée de renforcer encore à l’avenir la voie empruntée.» Cela signifie que la Regiun Engiadina Bassa/Val Müstair veut miser encore plus spécifiquement sur le tourisme durable. Le développement des infrastructures numériques et des plateformes virtuelles d’échanges devrait encore améliorer les conditions-cadre nécessaires à des modèles flexibles de travail, d’habitat et de vie. «Nous voulons aussi oser des expériences, en accord avec les besoins des entreprises et de la population», ajoute Martina Schlapbach.

Stefan Schweizer estime qu’«il est toujours judicieux de travailler à renforcer les possibilités d’action d’une région en situation de crise.» Il a toutefois des doutes au sujet du rapport coût/utilité. «Chaque région doit évaluer pour elle-même si le développement stratégique et la mise en œuvre opérationnelle de la résilience sont souhaitables, et dans quelle mesure.»

Dossier thématique regiosuisse «La résilience dans le développement régional»
Comment les régions peuvent-elles devenir plus résilientes afin d’être mieux préparées aux futurs chocs et à en ressortir plus fortes? Ce dossier propose une introduction à cette thématique et aux approches possibles pour une mise en œuvre dans les régions: regiosuisse.ch/resilience

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regiosuisse.ch/npr – projets-modeles.ch

Bibliographie

Resiliente Regionen. Zur Intelligenz regionaler Handlungssysteme. In: «Multidisziplinäre Perspektiven der Resilienzforschung», pag. 295–332. Robert Lukesch. Springer Fachmedien, Wiesbaden, 2016.

Regionale Resilienz. Zukunftsfähig Wohlstand schaffen. Dirk Raith, Daniel Deimling, Bernhard Ungericht, Eleonora Wenzel. Metropolis Verlag, 2017.

Wie gehen Regionen mit Krisen um? Eine explorative Studie über die Resilienz von Regionen. Robert Lukesch, Harald Payer, Waltraud Winkler-Rieder. Wien, 2010.

La résilience, un outil pour les territoires ? Clara Villar (Cerema) e Michel David (MEDDE/CGDD). IT-GO Rosko, 2014.

La résilience en trois actes: résistance, reset et relance.  Xavier Comtesse, Mathias Baitan.

Resilienza tra territorio e comunità, Approcci, strategie, temi e casi, Fondaziona cariplo, 21, 2015.

La resilienza territoriale: un concetto polisemico per lo sviluppo delle scienze regionali». Paolo Rizzi. Scienze Regionali, 1/2020.  

Resilienza e vulnerabilità nelle regioni europee. Paola Graziano und Paolo Rizzi. Scienze Regionali, 1/2020.

Autres Articles

La formule magique, c’est la diversification

Interviewée par regioS, Marie-Gabrielle Ineichen-Fleisch, secrétaire d’État et directrice du SECO, évalue la situation économique liée à la crise du coronavirus dans les zones ciblées
par la Nouvelle politique régionale (NPR). Elle met également en évidence les conséquences qui en découlent pour une politique régionale qui soit à l’avenir aussi résiliente et résistante aux crises que possible.

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Marie-Gabrielle Ineichen-Fleisch voit dans la structure économique, peu diversifiée à de nombreux endroits, une des raisons pour lesquelles la crise du coronavirus a durement frappé au cours de cette année l’économie de beaucoup de zones cibles de la NPR, en particulier les régions de montagne. La directrice du SECO le souligne: «La dépendance au tourisme, très malmené dans le monde entier, a été particulièrement problématique.» Elle constate en outre que les régions comptant une proportion élevée de frontalières et de frontaliers ainsi que l’industrie horlogère et métallurgique ont fortement souffert de la crise. En revanche, elle a observé avec satisfaction la manière dont les Grisons, le Jura et la région des Trois- Lacs, régions touristiques plus axées sur le marché suisse, ont réussi à compenser en partie les pertes du premier semestre grâce au boom estival. Elle fait l’éloge des initiatives par lesquelles différentes régions ont réagi à la crise. Ces initiatives incluent par exemple de nouvelles offres touristiques, des plateformes numériques de commercialisation ou des espaces de coworking supplémentaires.

Directrice du SECO Marie-Gabrielle Ineichen-Fleisch © regiosuisse

«La NPR n’est pas conçue comme un instrument de crise, fait remarquer la secrétaire d’État, elle a néanmoins pu contribuer, par des mesures à court terme, à renforcer l’économie régionale pendant la crise.» Marie-Gabrielle Ineichen- Fleisch pense notamment aux Systèmes régionaux d’innovation (RIS) soutenus par la NPR, qui ont transformé à brève échéance leurs coachings d’innovation bien établis en coachings de crise. L’offre de reporter l’amortissement des prêts NPR pendant la crise a certainement aussi aidé de nombreux porteurs de projets et leur a procuré les liquidités nécessaires en cette période difficile. La directrice du SECO est convaincue que la crise du coronavirus ne remet pas fondamentalement en cause l’orientation actuelle de la NPR. «La NPR est bien positionnée en ce qui concerne les défis actuels et les thèmes importants comme la numérisation et la durabilité», souligne-t-elle. Même si la résilience n’a pas été jusqu’à présent un thème explicite de la NPR, les efforts de renforcement et de diversification de l’économie ainsi que de qualification des acteurs régionaux dans les zones ciblées par la NPR ont amélioré la résistance aux crises. Marie-Gabrielle Ineichen-Fleisch n’exclut pas que certaines approches de la NPR soient réexaminées en fonction des toutes dernières expériences en vue du prochain programme pluriannuel de la Confédération 2024 2031 sur la NPR. La formule magique pour que les régions se dirigent vers un avenir résilient est la diversification, précise la directrice du SECO. La pandémie de covid-19 a justement montré qu’une région dont l’économie est aussi diversifiée que possible tend à mieux relever les défis d’une crise qu’une région dont la structure économique est trop spécialisée. «La diversification à l’intérieur d’une même branche peut bien entendu aussi avoir un effet important – le mot d’ordre étant de passer du tourisme hivernal au tourisme quatre saisons», complète la secrétaire d’État.

Vous trouverez ici la version complète en allemand.

Autres Articles


Éditorial

La pandémie de covid-19 est un coup dur pour l’économie suisse, en particulier pour le tourisme et l’industrie d’exportation, qui jouent un rôle central dans de nombreuses zones ciblées par la Nouvelle politique régionale (NPR). Comment ces régions ont-elles surmonté la crise jusqu’à présent ? Les projets et les mesures de la NPR les ont-ils aidées à résister à la crise ? En résulte-t-il des conséquences pour l’orientation future de la NPR ? Le numéro actuel de regioS traite de ces questions.

Le second article de fond de regioS 19 se penche sur le thème de la résilience, qui retient également l’attention au vu de la crise du coronavirus. Car on se demande non seulement comment la crise peut être surmontée, mais aussi de quoi les régions ont besoin pour devenir plus résistantes, faire face aux crises ou au moins pouvoir s’en remettre rapidement. La diversification de l’économie y contribue, estime Marie-Gabrielle Ineichen-Fleisch, secrétaire d’État et directrice du SECO, dans l’interview sur les défis de la crise du coronavirus. Associer la jeune génération au développement régional peut aussi être prometteur, de même que préparer les entreprises d’une région à la révolution numérique.

Selon la directrice du SECO, renforcer la résilience requiert non seulement de diversifier l’économie, mais aussi de continuer à promouvoir la qualification des acteurs régionaux. Le soutien de la NPR, notamment par le biais de la gestion des connaissances de regiosuisse, restera donc très demandé l’année prochaine.

Je vous souhaite une bonne lecture et de joyeuses fêtes.

Urs Steiger, Rédacteur de regioS

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Les régions à l’épreuve du coronavirus

Pirmin Schilliger & Urs Steiger
La maladie covid-19 a déclenché cette année une grave crise dans le monde entier et en Suisse. Celle-ci est encore loin d’être terminée, nous nous trouvons au contraire en plein dedans. Tous les domaines de la vie et de l’économie sont affectés, surtout les soins de santé. À de nombreux endroits de Suisse, la crise touche particulièrement le tourisme et l’industrie horlogère, qui constituent l’épine dorsale économique de nombreuses régions de montagne ou rurales. Il s’agit d’une dure épreuve pour un grand nombre de personnes. On ignore quelle en sera l’issue.
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Le confinement décrété mi-mars a subitement plongé le tourisme dans un état de choc. À l’échelle suisse, le nombre de nuitées a subi une chute drastique pratiquement d’un jour à l’autre: –62 % en mars, –80 % en avril et –78 % en mai par rapport aux mêmes mois de l’année précédente. Il s’est légèrement redressé en juin à la faveur des premiers assouplissements et a retrouvé le niveau de mars, soit de nouveau 62 % au-dessous du niveau de l’année précédente. Un grand nombre de clients non seulement étrangers, mais aussi suisses ont été absents des stations touristiques. L’occupation s’est légèrement redressée en juillet et août. Selon l’Office fédéral de la statistique (OFS), la diminution des nuitées s’est stabilisée au cours de ces deux mois d’été à –26 % et à –28 % en moyenne.

Vacances (forcées) en Suisse

Les différences régionales ont toutefois été considérables. Quelques régions ont pu tirer profit du fait que les Suissesses et les Suisses ont renoncé aux voyages à l’étranger et, à la place, ont passé leurs vacances dans les régions de montagne suisses. Par exemple, les hôtels du val Poschiavo ont très tôt affiché complet. En juillet par rapport à l’année précédente, la Surselva a vu les nuitées augmenter de 40 %, la Basse-Engadine de 43 % et le val Bregaglia même de 53 %. Dans les régions, cet essor s’est poursuivi jusqu’en automne. Toutefois, il y a aussi eu des perdants dans les régions en plein boom. «On a compté parmi eux surtout les restaurants, qui ont dû fermer complètement durant le confinement et qui par la suite n’ont pu reprendre le travail que dans une mesure limitée à cause des mesures de protection», explique Martina Schlapbach de la Regiun Engiadina Bassa/Val Müstair.

Dans les cantons d’Appenzell et du Tessin ainsi que dans certaines régions du Jura, le nombre de nuitées a aussi été nettement supérieur à celui de la même période de l’année précédente. La destination Saignelégier-Le Noirmont a presque réussi à doubler ses nuitées. Quelques points chauds comme le val Maggia, le val Verzasca ou la piscine de Porrentruy ont presque été submergés par beau temps. Le pays d’Appenzell ne parvenait plus guère à se défendre contre les randonneurs venus de toute la Suisse. Cette ruée a été exploitée avec délectation par les médias. Andreas Frey, directeur d’Appenzell Rhodes-Extérieures Tourisme, relativise toutefois: «Tout cela n’a posé aucun problème.» Il ne souhaite en tout cas pas parler de «surtourisme». «Lors de chaque jour de pointe, nous avons essayé de rediriger les groupes de randonnée vers des itinéraires moins fréquentés – avec un franc succès», souligne-t-il.

Les loueuses et les loueurs d’appartements de vacances ont également fait partie des gagnants. Les résidences isolées ont été particulièrement demandées. Sur la plateforme de Grisons Tourisme par exemple, qui regroupe une offre de 3000 appartements dans dix destinations, les réservations supplémentaires d’appartements dépassaient encore 70 % en octobre, alors que le maximum intermédiaire de l’été avait fléchi depuis longtemps dans de nombreuses autres régions.

(Presque) plus rien ne tourne dans le tourisme urbain

Le tourisme urbain s’est retrouvé grand perdant. Les clients internationaux ont fait défaut dans les centres urbains, et le tourisme d’affaires et de congrès s’est arrêté presque complètement. Zurich (–77 %), Genève (–75 %), Lucerne (–66 %), Bâle (–63 %) et Berne (–59 %) sont les villes qui ont perdu le plus de nuitées durant les mois d’été. Vu qu’elle s’est de nouveau aggravée en octobre après une brève amélioration au début de l’automne, la situation est maintenant très sombre. D’après un sondage d’HotellerieSuisse, deux tiers des hôtels urbains se préparent à des licenciements. Des centaines de grands hôtels urbains sont à deux doigts de la faillite.

En plus du tourisme urbain, les régions de montagne très axées sur les clients étrangers, notamment sur les groupes de voyageurs venant d’Asie, ont particulièrement souffert de la crise. La destination Engelberg-Titlis compte parmi ces régions. Le chiffre d’affaires des Titlis Bergbahnen est tombé durant les mois d’été à 20-30 % du niveau de l’année précédente. Le directeur Norbert Patt, qui a tout de suite réagi en prenant des mesures rigoureuses de réduction des coûts, a entre-temps annoncé des suppressions d’emplois. Le chemin de fer de la Jungfrau a aussi été subitement privé de ses clients internationaux, qui jusqu’à présent provenaient à 70 % d’Asie. Les responsables du marketing ont certes essayé de rectifier rapidement le tir en prenant des mesures comme le Jungfrau Corona-Pass qui permet de circuler librement sur le réseau du chemin de fer de la Jungfrau – avec pour résultat que le Jungfraujoch a tout à coup été à 95 % aux mains des Suisses. Mais contrairement aux clients asiatiques, les Suissesses et les Suisses ne sont venus que par beau temps. Ils ont en outre dépensé moins d’argent en moyenne que les touristes d’Extrême-Orient.

Comme dans la plupart des régions de Suisse, les buts d’excursion et les hôtels qui misent en priorité sur le marché suisse et sur le marché européen ont compté parmi les gagnants qu’il y a aussi eu dans l’Oberland bernois. «Les campings ont aussi tiré leur épingle du jeu, de même que la sous-région Haslital-Brienz, dont l’orientation est traditionnellement moins internationale», explique Stefan Schweizer, directeur de la Conférence régionale Oberland-Ost. Mais malgré les lueurs d’espoir estivales, le bilan touristique est aussi globalement négatif dans l’Oberland bernois. Par exemple, la région d’Interlaken a certes enregistré une augmentation de 192 % des clients suisses dans l’hôtellerie en juillet, mais le nombre total de nuitées a diminué de moitié parce que cette destination vit principalement de l’activité internationale lors d’une saison normale. D’autres stations célèbres comme Wengen, Davos aux Grisons ou Zermatt en Valais se trouvent dans une situation analogue.

Appenzell © regiosuisse

De mauvais souvenirs se réveillent dans le Jura

L’industrie horlogère est l’épine dorsale économique du Jura, tout comme le tourisme pour une grande partie des régions de montagne. Avec le tourisme, elle fait partie en Suisse des branches économiques qui souffrent le plus de la crise du coronavirus. Le chiffre d’affaires de l’industrie horlogère a chuté de 35 % au deuxième trimestre. La branche a certes réussi à se remettre légèrement de ce choc au troisième trimestre, mais la Fédération de l’industrie horlogère suisse s’attend à une diminution de 25 à 30 % pour l’ensemble de l’année. Jusqu’en octobre, la baisse des exportations de montres par rapport à l’année dernière dépasse un tiers.

Cette situation réveille de mauvais souvenirs dans les villes horlogères de l’Arc jurassien. Des villes comme Le Locle ont certes tiré les leçons de la «crise horlogère» des années 1970 et diversifié leur économie depuis lors, mais la dépendance par rapport à l’industrie horlogère est toujours grande à de nombreux endroits. La vallée de Joux en est l’exemple éclatant: cette vallée proche de la frontière française compte 7000 habitants, mais 8000 emplois, en majeure partie dans l’industrie horlogère. «La pandémie de coronavirus nous a durement touchés», déplore Éric Duruz, directeur de l’ADAEV (Association pour le Développement des Activités Économiques de la Vallée de Joux). Les fabriques d’horlogerie ont certes pris de bonne heure des mesures de protection pour le personnel, déjà avant que la Confédération n’en ait ordonné. Mais après le confinement, la plupart des entreprises sont restées à l’arrêt un mois et demi. À la vallée de Joux, la pandémie n’a pas non plus été qu’un lointain grondement de tonnerre, mais a fait un nombre de morts plus élevé que la moyenne. Les autorités des différents niveaux se sont coordonnées afin de maintenir à peu près les soins de santé dans la Vallée même pendant la phase la plus aiguë. «Les frontalières et les frontaliers sont essentiels pour notre économie et pour le système de santé», rappelle Éric Duruz. Il était donc crucial que la frontière avec la France reste ouverte pour ces pendulaires.

Même si tout n’est de loin pas encore terminé, l’espoir naît entre-temps à la vallée de Joux que la crise ne sera pas aussi grave que dans les années 1970, lorsque plus d’un quart des résidentes et des résidents ont quitté la Vallée. «Nous avons maintenant l’expérience de la crise et sommes plus résistants», affirme Éric Duruz. Il est convaincu que la Vallée sortira même renforcée de cette crise, «grâce à l’esprit d’innovation de notre population, à la solidarité, à une certaine obstination et à un esprit combatif inflexible».

L’état intermédiaire

Comment se terminera l’année 2020 en fin de compte? À quelle vitesse l’économie se redressera-t-elle? Le 12 octobre, les économistes du Secrétariat d’État à l’économie (SECO) se montraient encore confiants dans leur pronostic. Ils calculaient à cette date une diminution de 3,8 % du produit intérieur brut pour l’année en cours. Ce pronostic paraissait nettement plus optimiste qu’au printemps, lorsqu’ils ne voulaient pas exclure une chute pouvant atteindre 10 % dans le scénario du pire. Les conséquences de la pandémie seraient néanmoins toujours très graves, même avec le scénario plus clément d’octobre: une baisse du pib de 3,8 % équivaudrait à la plus forte récession depuis la crise pétrolière du milieu des années 1970.

Impacts de l’épidémie de covid-19  sur l’économie régionale
Dans le cadre du monitoring des régions, regiosuisse observe l’évolution économique des régions, y compris en ce qui concerne spécifiquement les impacts de la crise du coronavirus. La page regiosuisse.ch/crise-du-corona rend compte des résultats actuels.

La situation a radicalement changé entre-temps avec la deuxième vague. Il est par conséquent difficile de dresser un bilan et chaque pronostic devient rapidement obsolète. Fin octobre, lors de la clôture de la rédaction, quatre cinquièmes des entreprises actives dans le tourisme s’attendaient à une nouvelle détérioration de la situation au cours de la saison d’hiver. Comme chacun sait, celle-ci est beaucoup plus importante que la saison d’été pour les stations de ski. Martin Nydegger, directeur de Suisse Tourisme, prépare le secteur à une longue traversée du désert. «Il n’y aura un redressement complet qu’en 2023 ou 2024. Ce sera rude surtout pour les villes», soulignet-il. Martin Nydegger brosse un tableau un peu plus optimiste pour les stations classiques de sports d’hiver. Monika Bandi Tanner, codirectrice de l’Unité de recherche sur le tourisme au Centre de développement économique régional de l’Université de Berne, renvoie au fait que tout dépend de l’évolution de la situation sur le front de la pandémie ainsi que des mesures et des concepts de protection qu’elle entraînera dans les domaines skiables. Vu les nombreux facteurs d’incertitude, il est actuellement difficile de prévoir comment se terminera l’année 2020 pour le tourisme.

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Travail à distance et repli à la montagne

La structure économique trop spécialisée, très axée sur des domaines particulièrement touchés comme le tourisme ou l’industrie horlogère, n’est pas le seul facteur à avoir accru la vulnérabilité de nombreuses régions au cours de la crise actuelle. La taille des entreprises joue aussi un rôle, abstraction faite de leur appartenance à une branche donnée. Selon un sondage d’UBS, une entreprise sur cinq comptant moins de 10 employés et une entreprise sur dix comptant 10 à 49 employés ont dû suspendre leur activité pendant le confinement. En revanche, «seules» trois grandes entreprises sur cent ont dû fermer. Les répercussions ont été particulièrement négatives dans des cantons tels qu’Appenzell Rhodes-Intérieures, Grisons et Valais, qui présentent une part élevée de petites entreprises et de microentreprises. Sur la base de divers autres indicateurs, UBS parvient à la conclusion que les cantons de montagne sont en général beaucoup plus fortement affectés par la crise et qu’ils auront besoin d’une phase de récupération plus longue.

La pandémie a confirmé qu’une crise accélère et renforce les tendances existantes. Une étude de l’Université de Bâle, qui s’est penchée sur l’adoption du télétravail observée à de nombreux endroits, parvient à la conclusion que cette transformation a visiblement représenté un défi plus important pour l’économie des régions rurales et celle des régions urbaines. Cette étude néglige toutefois un point: pendant le confinement, nombre d’employés se sont retirés de la ville pour se réfugier à la montagne. Ils y ont transformé sans hésiter leur résidence de vacances en bureau à domicile. On ignore toutefois quel pourcentage des quelque 500 000 résidences secondaires a effectivement été utilisé de cette façon pendant le coronavirus. «Notre région a été très animée cet été, surtout à cause des nombreux travailleurs à distance», estime Rudolf Büchi, responsable du développement régional auprès de la Regiun Surselva. Un indice de leur présence est la forte augmentation de l’utilisation du Net et des minutes de conversations téléphoniques dans la région. «Face à cette tendance, la Surselva bénéficie clairement d’une très bonne infrastructure à large bande et d’appartements de vacances gérés activement, qui offrent d’excellentes conditions pour le travail à distance lorsqu’ils sont combinés avec des espaces de coworking tels que ceux du Rocks Resort Laax», explique Rudolf Büchi.

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La plupart des télétravailleurs sont certes retournés dans leurs résidences principales urbaines après le confinement. Mais nombre d’entre eux y auront pris goût et se demanderont s’ils souhaitent aussi utiliser en temps normal leur refuge de crise et de vacances comme lieu de travail. Ce choix irait tout à fait dans le sens des stratèges du développement qui voient l’avenir des régions de montagne dans l’économie résidentielle, favorisée par le travail à domicile et par les nouvelles formes de travail hybrides et flexibles, qui permettent et stimulent le fait de résider et de travailler loin des centres urbains (cf. regioS 18).

En tant qu’organisation, la NPR a continué de bien fonctionner même dans les moments les plus difficiles.

La NPR en mode de crise

Comment les responsables NPR des régions ont-ils réagi à la crise du coronavirus? Avaient-ils seulement une marge de manœuvre? Stefan Schweizer précise que la NPR n’a pas pour mission de déployer un activisme fébrile dans une situation exceptionnelle de ce genre ni de faire de l’intervention de crise ou même de l’aide d’urgence. La politique régionale vise au contraire à aider les régions à relever sur le long terme les défis des changements structurels. Rudolf Büchi s’exprime de manière analogue: «Nos possibilités d’accomplir quelque chose directement pour atténuer la crise du coronavirus sont limitées.» La plupart des régions NPR de Suisse ont donc renoncé à lancer des projets NPR à court terme pour lutter contre la crise.

Mais cela ne signifie pas que les acteurs soient restés inactifs, bien au contraire: la Regiun Engiadina Bassa/Val Müstair, la Regiun Surselva ainsi que les régions d’Imboden et de Viamala ont par exemple participé à une initiative interrégionale dans le canton des Grisons. C’est dans ce cadre qu’une plateforme a été mise en ligne comme place du marché numérique pour les produits et les services encore livrables pendant la crise. «Cette plateforme a été très appréciée et continue d’être très populaire. Nous examinons maintenant si elle devrait être exploitée à demeure au-delà de la crise du coronavirus», explique Martina Schlapbach, responsable du développement de la Regiun Engiadina Bassa/Val Müstair. Des plateformes semblables ont été lancées dans de nombreuses autres régions, par exemple mehr-uri.ch dans le canton d’Uri, plateforme financée par le biais de la NPR, ou favj.ch/c19/ pour la vallée de Joux, pour ne citer que deux autres exemples.

De nombreuses destinations touristiques ont lancé des actions publicitaires à court terme – surtout par le biais du budget rehaussé de Suisse Tourisme. Les stations et les hôtels qui vivaient jusqu’à présent de séminaires et de groupes se sont reconvertis aux touristes individuels de Suisse. Les restaurants ont agrandi leurs terrasses extérieures, «les autorités ayant tout à coup accordé des autorisations de façon beaucoup plus pragmatique», comme Andreas Frey, d’Appenzell Rhodes-Extérieures Tourisme, le constate avec satisfaction. Différents services ont été numérisés d’urgence afin de pouvoir être proposés et fournis conformément aux règles de distance. Le canton du Valais et The Ark, une fondation de promotion économique, ont lancé début mai à cet effet l’initiative Digitourism, à laquelle une trentaine de jeunes entreprises ont participé en soumettant des propositions. Un jury a enfin sélectionné huit projets, qui ont été mis en œuvre avec le soutien de CimArk, le bras armé des ris (Systèmes régionaux d’innovation) Suisse occidentale en Valais. Le dénominateur commun de tous ces projets est de viser à relancer le tourisme dans le canton à l’aide de solutions numériques. Un exemple: la start-up Guidos.bike a développé le guide touristique Guidos, numérique et personnalisé, en quelques semaines jusqu’à la commercialisation. Il s’agit d’un GPS intelligent qui se monte sur un vélo et qui accompagne l’utilisateur sur un tour défini individuellement. Plus de cinquante prestataires d’activités de plein air utilisent déjà ce guide touristique, ainsi que la grande station touristique de Verbier.

La crise comme opportunité

Les ris ont tout de suite réorganisé leurs programmes de coaching lors du confinement décrété en mars. Le ris Mittelland a immédiatement mis en ligne un site Internet qui énumérait toutes les informations importantes sur les offres de soutien de la Confédération, du canton de Berne et d’autres institutions en lien avec la pandémie. Les ris de toutes les autres régions du pays ont suivi cet exemple un peu plus tard. Les conseillères et les conseillers ont en outre réorienté leur priorité, passant du coaching en innovation à la gestion de crise. Ils ont également soutenu quelques entreprises qui s’efforcent d’exploiter la crise comme opportunité pour optimiser les processus et mener des projets de transformation et d’innovation. Voici l’exemple de Sensopro AG, Münsingen (BE): cette entreprise produit depuis quelques années des appareils de fitness qui servent à entraîner la coordination tout en ménageant les articulations ; elle a exploité la période plus calme à cause de la crise pour développer un nouveau produit qui pourrait être commercialisé encore cette année ; ce projet a bénéficié du soutien du coach ris Nicolas Perrenoud.

Les prestations de la NPR au cours de la crise ont aidé de nombreuses entreprises à mieux s’en sortir. Mais l’aide décisive qui a sauvé d’innombrables entreprises de la ruine est finalement venue du Conseil fédéral, qui a ficelé un paquet exceptionnel composé de chômage partiel facilité, d’allocations pour perte de gain et de crédits garantis accordés en urgence. Sans ce soutien, la situation serait sensiblement plus sombre dans de nombreuses régions. Les mesures de la NPR n’ont naturellement pu avoir que des effets complémentaires. La possibilité créée rapidement de reporter le remboursement des prêts NPR et de l’aide aux investissements dans les régions de montagne (LIM) a toutefois fait augmenter les liquidités de nombreux porteurs de projets et réduit ainsi la pression économique.

Étant donné les heures supplémentaires accomplies par de nombreux responsables NPR en cette période difficile, il ne faudrait pas oublier l’énorme défi qu’a représenté le maintien du fonctionnement opérationnel de la NPR durant le confinement. Nombre de séances, d’ateliers et de réunions ont dû être réorganisés d’urgence pour avoir lieu à distance ou ont dû être annulés. Pas mal de choses ont été retardées, parce que la communication numérique ne convient pas pour tout, ou ont dû être reportées à plus tard. Mais au total, les personnes impliquées dans la NPR ont appris énormément en peu de temps. En tant qu’organisation, la NPR a continué de bien fonctionner même dans les moments les plus difficiles.

regiosuisse.ch/crise-du-coronavirus-nprmehr-uri.chfavj.ch/c19/

Le virus comme accélérateur de l’innovation

Auswirkungen der Corona-Krise auf Schweizer KMU. Sebastian Gurtner, Nadine Hietschold. BFH Gestion, 2020 (en allemand).