La région de l’Albula: des idées pour une région de montagne attractive

De nombreuses régions rurales cherchent comment façonner leur avenir. Les thèmes auxquels elles sont confrontées sont souvent liés à l’exode rural, aux emplois, à la couverture santé et à l’approvisionnement en marchandises. Comment aborder ces questions de manière durable et orientée vers l’avenir? La région de l’Albula, qui compte environ 8000 habitants, a traité ces questions dans le cadre de trois ateliers publics. Mirko Pianta, directeur général et développeur régional, raconte comment il a vécu cette démarche participative et les résultats obtenus.

«Les participants aux discussions ont apporté un large éventail d’opinions et d’idées.»

Directeur et développeur régional Mirko Pianta

regiosuisse: Le développement régional est votre domaine d’expertise. A quels défis êtes-vous confronté dans la région de l’Albula?  

Mirko Pianta: La région est située au centre des Grisons, non loin de la capitale Coire et des grandes destinations touristiques que sont la Haute-Engadine et Davos. Cela seul représente déjà un défi, sans compter bien sûr les quelque deux millions de véhicules qui traversent la région chaque année. Il serait souhaitable que nous puissions en garder une partie dans la région et en tirer un bénéfice économique. L’innovation est donc également nécessaire ici. Sa diversité culturelle rend la région de l’Albula particulièrement intéressante: les trois sous-régions qui la composent ont en effet des traditions linguistiques et culturelles différentes. Il s’agit des sous-régions de Surses, où l’on parle principalement le romanche, et des régions de l’Albulatal et de Lenzerheide, où l’on parle l’allemand et le romanche. Ces dernières sont pour la plupart autonomes sur le plan économique, notamment en raison des distances parfois importantes qui les séparent. Autrement dit, il faut trouver un dénominateur commun qui réponde aux intérêts régionaux et favorise les besoins individuels et l’autonomie. Une démarche passionnante.

En collaboration avec le Groupement suisse pour les régions de montagne (SAB), vous avez récemment organisé, dans le cadre d’un projet européen, un atelier participatif comportant deux volets. L’objectif était de trouver des idées pour améliorer encore la qualité de la région. Vingt personnes ont participé à ces débats. Quels ont été les «thèmes les plus brûlants» qui y ont été soulevés?

Le manque de logements, indubitablement. Un manque qui explique en partie le déclin démographique. Le deuxième sujet était les soins de santé et la crainte que les physiothérapeutes, psychologues et autres spécialistes, par exemple, ne quittent la région pour s’installer dans des endroits plus prospères.

Qu’est-ce qui était particulièrement nouveau pour vous?

Le besoin d’une plateforme d’information centrale ne m’avait jamais frappé à ce point auparavant. L’idée est relativement simple: il s’agit de grouper sur un même site tous les événements de la région, les offres et les cours de toutes sortes ainsi que les offres touristiques. Une telle plateforme serait un atout tant pour les habitants que pour les visiteurs. Ont également été suggérées dans ce contexte la création de lieux de rencontre créatifs ou encore l’organisation d’un marché pour la vente de produits régionaux.

Quel a été à votre avis le principal avantage de cette approche participative?

Permettre aux gens de la région de s’exprimer et de faire part de leurs idées.  Cet atelier a en effet permis de recueillir un large éventail d’opinions. Ce format avait ceci de particulier que non seulement les habitants y étaient invités, mais aussi les personnes qui ont une résidence secondaire dans la région et celles qui font la navette pour venir y travailler. Ces personnes ont apporté un certain regard extérieur et nous avons pu répondre à leurs préoccupations.

Que n’avez-vous pas pu, en revanche, atteindre par cette méthode?

Certaines questions sont très complexes puisqu’elles touchent également des aspects juridiques et politiques. Cela vaut notamment pour le domaine du logement: nous avons envisagé par exemple la possibilité de créer des coopératives d’habitation. Cela étant, notre marge de manœuvre est limitée par certaines bases légales contraignantes. Je mentionnerai ici à titre d’exemple cette disposition légale qui oblige une commune à réduire le nombre de terrains à bâtir en cas de dépeuplement continu. Comment dès lors créer de nouveaux logements dans une région qui connaît un déclin démographique?

Y a-t-il des idées ou des propositions émises lors des discussions qui ont malgré tout d’ores et déjà pu être mises en œuvre?

Oui, nous y travaillons déjà. Nous organiserons par exemple, en automne 2025, le premier salon des métiers afin de promouvoir l’attractivité des employeurs de la région. Ce salon permettra aux futurs apprentis de découvrir les formations qui y sont proposées. Nous espérons inciter par ce biais les jeunes à rester dans la région, voire même, les enfants de futurs propriétaires de résidences secondaires venir faire leur apprentissage ici. Nous souhaitons également organiser une manifestation destinée spécifiquement aux employeurs afin de leur montrer comment rendre les emplois dans les entreprises locales plus attractifs et mieux les mettre en valeur.

Quelles idées pourraient permettre d’améliorer durablement la qualité de vie et l’approvisionnement dans votre région?

Le sujet important est certainement le logement pour la population locale. L’attractivité d’une région en dépend en effet grandement, car les possibilités d’y trouver des logements permettent de lutter contre l’exode rural. Nos jeunes doivent avoir la possibilité de travailler et d’exercer une activité économique ici même. Il faut parallèlement créer des infrastructures économiques adéquates, notamment via l’aménagement du territoire et la mise en place d’un réseau.

Que souhaitez-vous, en tant que développeur régional, avoir atteint dans 10 ans dans la région?

Notre vision porte sur le long terme. Nous souhaitons par exemple atteindre une croissance démographique de 10 % d’ici 2050. Ce qui devrait donner en principe 10 % d’emplois supplémentaires. Voilà notre objectif. Les thèmes abordés lors de l’atelier et la mise en œuvre prévue nous permettent d’être optimistes. Je m’engage donc résolument sur cette voie.

Merci pour cet entretien.

Les ateliers organisés dans la région de l’Albula ont été réalisés dans le cadre du projet ESPON RURALPLAN, qui explore des stratégies de développement pour les régions rurales qui connaissent un déclin démographique. Le projet dans la région de l’Albula a été cofinancé par le programme européen ESPON (Réseau européen d’observation pour le développement territorial et la cohésion) avec des fonds de la Nouvelle politique régionale (NPR).


IA pour PME – vers le futur numérique avec le soutien de la NPR

Rendre l’intelligence artificielle (IA) accessible aux petites et moyennes entreprises de Suisse centrale, tel est l’objectif de l’association Local AI Community (LAC). Grâce à des conseils spécifiques, à la mise en réseau et à des ateliers pratiques, les entreprises peuvent acquérir les connaissances nécessaires pour utiliser l’IA de manière ciblée et rentable. Une offre qui a été rendue possible grâce au soutien financier de la Nouvelle politique régionale (NPR), qui a été investi dans l’infrastructure et la mise en place d’un hub d’intelligence artificielle (IA). Jetez un coup d’œil à notre vidéo pour voir comment cela fonctionne.

Remarque: L’association s’appelait encore  LAC2 au moment de l’enregistrement, raison pour laquelle nous avons repris cette dénomination dans la vidéo.  

Plus de compétence dans le domaine de l’IA pour des entreprises de Suisse centrale  

L’association à but non lucratif LAC entend soutenir les entreprises et les institutions de Suisse centrale afin qu’elles comprennent mieux l’IA et l’utilisent le plus efficacement possible. Les PME ne disposent en effet souvent pas des conditions nécessaires pour une exploitation optimale de cet outil informatique. C’est précisément là qu’intervient l’association, qui propose un transfert de connaissances ciblé, un réseau solide, des événements spécifiques et un accès aisé à des outils d’IA. L’innovation doit devenir une réalité, afin de renforcer durablement la compétitivité de la région et créer à long terme une communauté régionale dynamique dans ce domaine.

L’AI Hub de Lucerne n’est pas seulement un point de contact concret, il propose également plusieurs services et offres liés à l’IA dont les PME de la région économique de Lucerne peuvent bénéficier. On mentionnera notamment les services suivants:

  • Conseils individuels et coachings: des entreprises se voient suggérer les applications d’IA qui peuvent leur être utiles.  
  • Ateliers pratiques: des collaborateurs sont formés, qui peuvent tester ensuite certaines applications.
  • Accès à des modèles d’IA préentraînés
  • «AI Sandbox»: un environnement de test pour une validation de principe.
  • Plateforme d’échange: mise en réseau d’expertes et d’experts, d’entreprises et de jeunes talents.   

Jamie Shelley, AI Hub Manager chez LAC, déclare à propos de cette offre: «Nous misons sur des applications concrètes. Les entreprises locales profitent directement de notre savoir-faire et de notre réseau. Nous voulons créer des synergies et promouvoir l’innovation dans la région même.»

Le soutien de la NPR: un facteur de succès décisif

La création de LAC a été rendue possible grâce aux subventions de la Nouvelle politique régionale (NPR). «La NPR nous a permis de passer de la parole aux actes», déclare Patricia Feubli, présidente de l’association. Les subventions ont joué un rôle-clé dans la création de l’infrastructure nécessaire, la mise en place de l’AI Hub et de son équipe, ainsi que l’organisation d’événements de réseautage et de formation continue.

Nicole Bachmann, du service NPR, le confirme: «Ce projet est important pour le canton, car il facilite l’accès des PME de Suisse centrale aux technologies innovantes et renforce la compétitivité de la région à long terme.»

L’IA dans la pratique: collaboration avec Schaltraum AG, une PME locale

L’entreprise Schaltraum, spécialisée dans l’automatisation des bâtiments et basée en Suisse centrale, est un bel exemple de l’efficacité du travail accompli par l’association LAC. Depuis décembre 2024, cette entreprise travaille en effet avec cette dernière pour intégrer le potentiel de l’IA dans ses processus opérationnels. «La mise en réseau des entreprises, de la science et de l’expertise qu’offre LAC nous a convaincus», déclare Jean-Christophe Martin, directeur général de Schaltraum AG. «Nous pouvons ainsi accumuler ensemble des connaissances et nous préparer pour l’avenir.» D’autres coachings et ateliers sont prévus dans le cadre de cette coopération, notamment sur le thème de «l’IA au bureau». «Je me réjouis de poursuivre cet échange fructueux et de développer de nouvelles solutions», ajoute encore Jean-Christophe Martin.

Avec LAC et son accompagnement professionnel, les entreprises de Suisse centrale disposent d’un précieux contact pour découvrir les possibilités de l’IA et faire leurs premiers pas dans le futur numérique.

Photo: LAC

Destinations touristiques: le SECO et les cantons soutiennent la réorientation des offres

Le tourisme d’hiver est pourtant vital pour de nombreuses destinations touristiques. Il faut donc s’attendre, avec le changement climatique, à des saisons hivernales plus courtes dans de nombreux endroits, et ce même si l’on recourt à l’enneigement artificiel. Un certain nombre de projets en cours, soutenus par le Secrétariat d’État à l’économie (SECO) dans le cadre des instruments de promotion que sont la Nouvelle politique régionale (NPR), Interreg et Innotour, aident les destinations à s’adapter au changement climatique.

L’image est éloquente: des prairies vert-brun entourées d’un ruban blanc. Un spectacle auquel de nombreux domaines skiables, en particulier de moyenne et basse altitude, ont dû s’habituer ces dernières années. La durée d’enneigement a diminué de moitié depuis 1970 en dessous de 800 m et de 20% à 2000 m. Le bilan des effets du changement climatique sur l’enneigement en Suisse est donc pour le moins désolant. Si l’on en croit les différents scénarios climatiques de MétéoSuisse, cette évolution se poursuivra dans les années et les décennies à venir. Autrement dit, exploiter de manière rentable des domaines skiables situés en dessous de 1500 m environ sera de plus en plus difficile (Remontées Mécaniques Suisses, 2024). Une situation qui s’explique non seulement par une limite des chutes de neige toujours plus élevée, mais aussi par la diminution du nombre de jours suffisamment froids durant lesquels on peut envisager un enneigement artificiel. À Engelberg, par exemple, à 1037 m d’altitude, le nombre de jours de gel (où la température maximale est inférieure à 0 °C) a presque diminué de moitié depuis les années 1970: d’un peu plus de 40 jours elle est en effet passée à un peu plus de 20 jours (MétéoSuisse, 2024). Une telle situation ne s’explique toutefois pas uniquement par les changements climatiques, la concurrence internationale croissante et l’évolution démographique faisant également partie de l’équation. C’est ainsi que l’on a constaté dans l’ensemble une baisse de plus de 30 % du nombre de journées-skieurs dans les stations de ski suisses depuis le début des années 1990 (Remontées Mécaniques Suisses, 2024c). 

Les projets présentés ci-dessous montrent comment les destinations touristiques peuvent faire face au manque de neige et présentent des solutions possibles, ainsi que les opportunités et les risques qui en découlent.

Projet Innotour «Boussole pour les sports de neige»: garantir l’enneigement malgré un climat qui se réchauffe

Remontées Mécaniques Suisses a lancé le projet «Boussole pour les sports de neige» en collaboration avec l’Association suisse des managers en tourisme (ASMT), projet soutenu par Innotour et qui a pour objectif d’aider les destinations touristiques à faire face aux changements des conditions d’enneigement. Il s’agit de développer dans ce cadre un outil permettant aux régions de sports d’hiver de notre pays d’évaluer leur enneigement actuel et futur et de définir les mesures qui s’imposent, ce sur la base des données et des projections climatiques actuelles et en collaboration avec l’ETH Zurich et l’Institut pour l’étude de la neige et des avalanches (SLF). Les mesures envisageables comprennent également l’optimisation de l’offre de sports d’hiver, notamment via le recours à l’enneigement artificiel et l’adaptation de la durée de la saison, mais aussi des offres qui ne dépendent pas de l’enneigement, comme la culture et la gastronomie. Une fiche d’information sur les scénarios climatiques pour l’hiver 2050 est d’ores et déjà disponible (Remontées Mécaniques Suisses, 2024). Le projet «Boussole pour les sports de neige» couvre la période 2024 – 2026; d’autres résultats publics sont attendus pour l’été 2025 (Remontées Mécaniques Suisses, 2024b).

Projet Interreg «BeyondSnow»: pour sortir du tourisme hivernal classique

De nombreuses stations de sports d’hiver situées en dessous de 1500 mètres d’altitude devront revoir leur stratégie pour devenir moins dépendantes des activités hivernales classiques. Le projet Interreg «BeyondSnow» (2022-2025, financé dans le cadre de la Nouvelle politique régionale (NPR)) soutient dans cette transition neuf destinations dans six pays alpins fortement touchés par le manque de neige. Le domaine de Sattel-Hochstuckli, dans le canton de Schwyz, fait office de destination pilote pour la Suisse. La situation financière difficile que cette dernière connaît l’a contrainte de fermer deux des trois téléskis en 2023. «Cette issue est évidemment très triste», déclare Peter Niederer, vice-directeur du Groupement suisse pour les régions de montagne (SAB), également à l’origine du projet. «Sattel-Hochstuckli est l’un des plus anciens domaines skiables des Préalpes et le ski fait partie intégrante de son histoire.» Les acteurs locaux sont systématiquement impliqués dans «BeyondSnow». C’est ainsi que la population locale a participé à l’élaboration de 22 mesures pour assurer la pérennité de la destination. L’accent est mis sur le tourisme 4 saisons, les investissements dans des événements et des coopérations, ainsi que la réduction des coûts fixes. L’infrastructure de ski doit quant à elle pouvoir être utilisée de manière flexible lorsque les conditions d’enneigement le permettent. Les stations de ski qui participent au projet peuvent également profiter d’échanger leurs expériences en la matière. Sattel-Hochstuckli envisage par exemple d’organiser un événement Ultra Trail, inspiré par Métabief, une autre station de ski du Jura français qui participe elle aussi à «BeyondSnow». À l’avenir, un outil numérique d’aide à la décision accessible au public devrait également être développé pour aider d’autres destinations touristiques à anticiper l’évolution de l’enneigement et à s’y adapter en misant sur la réorientation et la diversification (SAB, 2024). 

Sattel-Hochstuckli en février 2023. La destination doit se réorienter suite à une série d’hivers avec peu de neige (photo Thomas Egger, SAB).

Projet Interreg: «TransStat»: vers un tourisme de ski durable pour les Alpes de demain

Le projet Interreg «TransStat» (2022-2025), auquel participe neuf destinations alpines dans cinq pays, poursuit un objectif similaire à celui de «BeyondSnow». Il s’agit dans ce cas de tester, avec ces destinations et en collaboration avec les acteurs locaux, une procédure afin de développer des scénarios d’avenir souhaitables pour un tourisme (de ski) durable et viable. Ces scénarios doivent servir de base au processus de transition qu’entendent engager les destinations concernées. TranStat développe à cette fin un réseau physique et numérique de sites confrontés à ce type de changement afin de partager des connaissances et des expériences spécifiques. Formuler des recommandations politiques pour l’ensemble de l’espace alpin et pour les contextes régionaux fait également partie des objectifs de ce projet.

Projet Innotour «Destinations climatiquement neutres»: pour une approche globale

Les destinations de montagne sont touchées par de nombreux autres changements induits par le réchauffement climatique. Le projet «Destinations climatiquement neutres» (2024-2026), parrainé par Graubünden Ferien et financé par Innotour, a donc opté pour une approche globale. «Nous voulons que nos destinations relèvent de manière proactive les défis liés au changement climatique et se positionnent en conséquence pour l’avenir», déclare Martina Hollenstein Stadler, responsable du développement durable chez Graubünden Ferien. «Il ne s’agit pas uniquement du thème omniprésent qu’est l’enneigement, mais aussi des autres opportunités et risques que le changement climatique ne manque pas d’entraîner». C’est ainsi que, les étés devenant de plus en plus chauds dans les villes et les agglomérations du Plateau suisse, les touristes en quête de fraîcheur devraient être de plus en plus nombreux à rallier les destinations de montagne (Serquet & Rebetez, 2011). Cela étant, il convient également de tenir compte des précipitations qui ne cessent d’augmenter et qui risquent d’entraîner plus d’inondations et de coulées de boue. Le projet doit contribuer à ce que les destinations participantes développent leur modèle économique touristique afin qu’il soit viable à long terme.» On a analysé pour les trois destinations pilotes du canton des Grisons (Lenzerheide, Engadine Samnaun Val Müstair et Prättigau), comment le changement climatique les affecte et quels sont les risques et les opportunités prioritaires. Selon Martina Hollenstein, l’équipe du projet a élaboré avec les destinations concernées une feuille de route spécifique et accompagnera la première phase de mise en œuvre. Et Martina Hollenstein de souligner: «Ce n’est pas un sprint qu’il faut courir pour être prêt à faire face au climat, c’est un marathon. Nous considérons donc que notre rôle est d’initier un processus qui va bien au-delà de la fin du financement Innotour.» La capacité d’une destination à exploiter les opportunités qui se présentent à elle est également un facteur clé de sa réussite à long terme.

Les participants à l’atelier organisé dans la destination Engadin Samnaun Val Müstair identifient les offres et les infrastructures qui sont affectées par le changement climatique. (Photo: Raphael Portmann).

La Nouvelle politique régionale (NPR) soutient les projets de réorientation touristique

Mais un changement peut aussi être une chance: la Nouvelle politique régionale (NPR), financée par la Confédération et les cantons, offre aux destinations et aux entreprises de très nombreuses possibilités dans ce contexte. La NPR soutient par exemple des études de faisabilité pour des projets de réorientation touristique, comme pour le Fideriser Heuberge dans le Prättigau. Elle peut également soutenir la réorientation stratégique des chemins de fer de montagne, comme par exemple la Wiriehornbahnen AG. La NPR met en outre à disposition des fonds pour la planification de mesures concrètes visant à développer le tourisme estival, comme l’offre de VTT de la destination Engelberg-Titlis, ou pour des stratégies touristiques globales, comme à Kandersteg.

Le changement climatique pose de grands défis au tourisme en Suisse. Le SECO aide ce secteur à les relever grâce aux projets décrits ci-dessus, dont certains sont également présentés dans le dernier Insight, le magazine Innotour. Outre la promotion de projets, la politique du SECO en matière de tourisme vise également à soutenir l’adaptation au changement climatique, par exemple par le développement et le transfert de connaissances dans le cadre du «Forum Tourisme Suisse».

Innotour promeut l’innovation, la coopération et le développement des connaissances dans le domaine du tourisme suisse. Innotour concentre son soutien au niveau national. Cela signifie que la majorité des fonds sont utilisés pour des projets à vocation nationale et pour des tâches de coordination. L’instrument des projets modèles permet également de soutenir des projets au niveau régional et local.

Interreg offre aux régions la possibilité de se développer via des projets transfrontaliers concrets. L’UE, les pays limitrophes, les cantons, la Confédération et des privés financent la coopération dans de nombreux domaines. La participation suisse est financée dans le cadre de la Nouvelle politique régionale (NPR). Les fonds fédéraux proviennent du Fonds de développement régional et doivent être utilisés pour des projets qui contribuent à renforcer la compétitivité des régions. En revanche, les cantons peuvent également investir leurs fonds d’équivalence dans des projets qui ne servent pas directement à augmenter la valeur ajoutée ou à développer l’économie régionale. 

Avec la Nouvelle politique régionale (NPR), la Confédération et les cantons soutiennent le développement économique des régions de montagne, des autres zones rurales et des régions frontalières. La NPR est entrée en 2024 dans sa troisième période pluriannuelle qui dure huit ans (2024-2031). Les anciens axes prioritaires «Industrie» et «Tourisme» sont maintenus. Les petites infrastructures peuvent désormais bénéficier de contributions à fonds perdu sous certaines conditions. Outre l’économie locale, qui complète l’orientation vers l’exportation de la NPR, le développement durable et la numérisation sont des thèmes transversaux qui revêtent une importance particulière.

Liens et sources

MétéoSuisse, 2024. Indicateurs climatiques.

NCCS, National Centre for Climate Services, 2024. CH 2018 – Scénarios climatiques pour la Suisse.

Suisse Tourisme, 2024, Tourisme d’hiver et réchauffement climatique.

Groupement suisse pour les régions de montagne (SAB), 2024. Projet BeyondSnow.

Secrétariat d’Etat à l’économie SECO, 2024, Innotour – Projets soutenus.

Graubünden Ferien, 2024.  Projet Klimafitte Destinationen, dernière consultation: 15.12.2024.

SRF News, Schweizer Radio und Fernsehen, 2024. Tourismus im Misox: Auf die Flut folgen die Annullationen, dernière consultation: 10.01.2025.

Remontées Mécaniques Suisses, 2024. Fiche d’information «Scénarios climatiques hivernaux pour la Suisse d’ici à 2050» , dernière consultation: 10.01.2025.

Remontées Mécaniques Suisses, 2024b. Questions et réponses sur le changement climatique et les phénomènes météorologiques, dernière consultation: 10.01.2025.

Remontées Mécaniques Suisses, 2024c. Bilan de la saison 2023/24. Fréquentation des domaines skiables, dernière consultation: 21.01.2025.

Interreg Alpine Space, 2024. TransStat – Transitions to Sustainable Ski Tourism in the Alps of Tomorrow, dernière consultation: 21.01.2025.

Kämpf, Richard, 2024. Proaktiver Umgang mit dem Klimawandel. EventEmotion, dernière consultation: 21.01.2025.

Littérature scientifique

Serquet, G., Rebetez, M. Relationship between tourism demand in the Swiss Alps and hot summer air temperatures associated with climate change. Climatic Change 108, 291–300 (2011). https://doi.org/10.1007/s10584-010-0012-6

Podcast: «Ticino a Te» – Créer de la valeur au niveau régional, pour aujourd’hui et demain

Fin 2024, le Tessin s’est vu décerner le «Cercle régional» pour son développement d’une chaîne de valeur régionale spécifique. Le canton est en effet parvenu à ancrer avec succès des produits régionaux dans la gastronomie et l’hôtellerie locales, notamment avec les projets «Ticino a Te» et «Ticino a Tavola». Sibilla Quadri, directrice du Centre de compétences agroalimentaires du Tessin (CCAT), présente les projets dans le podcast «La région au micro». Elle y explique pourquoi il est de toute première importance de réunir tous les milieux concernés autour d’une même table et comment les projets peuvent profiter des ressources et des expériences existantes.

«Nous sommes le maillon de la chaîne de valeur des produits alimentaires tessinois.»

Tous les acteurs réunis autour d’une table

 «Ticino a Te» («le Tessin pour toi») s’engage depuis 2016en faveur de la coopération intersectorielle entre les acteurs importants de la chaîne de création de valeur, à savoir de l’agriculture, de la gastronomie, de l’hôtellerie tessinoises et de la distribution. La responsable du projet, Sibilla Quadri, insiste sur l’importance de cette mise en réseau pour toutes les parties concernées: «Nous donnons de la visibilité aux producteurs locaux, ce qui leur permet de viser une clientèle plus large. Les consommatrices et consommateurs peuvent découvrir ainsi, via notre réseau, quels produits sont fabriqués et par qui dans leur région.»

Différentes initiatives sont en cours dans le cadre de «Ticino a Te», dont «Ticino a Tavola» («le Tessin à table»), une initiative de GastroTicino et de l’Union des paysans tessinois. Il s’agit d’une collaboration avec 103 établissements de restauration tessinois. Les partenaires s’engagent à proposer systématiquement au moins un menu à trois ou quatre plats composés à 60 % de produits tessinois, les vins tessinois devant quant à eux représenter au moins 40 % de leur offre. A noter que quelque 400 000 repas sont servis chaque année dans le cadre de «Ticino a Tavola», ce qui génère 3,5 millions de francs, dont une grande partie est reversée à l’agriculture et au secteur de la transformation alimentaire tessinois.

«Connaître l’origine d’un produit pour l’apprécier davantage.»

Plus qu’une question de prix

Lorsqu’on lui demande si les produits régionaux peuvent rivaliser avec les produits industriels en termes de prix, Quadri répond: «Si un produit industriel a été fabriqué dans les mêmes conditions qu’un produit local, les prix sont souvent comparables. Je pense par exemple à l’élevage respectueux des animaux ou à la rémunération des travailleurs. Cela dit, on compare très souvent des produits qui ont été fabriqués dans des conditions complètement différentes. Je ne pense donc pas qu’ils puissent être comparés si facilement.

Pour mettre en évidence ces différences au niveau de la production, l’une des missions importantes de «Ticino a Te» est d’informer le public. C’est ainsi que «Ticino a Te» s’engage, en collaboration avec 90 cantines scolaires, à ce que les élèves puissent avoir des produits régionaux dans leur assiette. «Il est en effet important que les enfants apprennent à apprécier la valeur des produits du terroir, car ce sont eux les clients de demain», déclare Sibilla Quadri. Ce projet n’oublie pas non plus les citadins, lesquels sont également informés de l’origine de leurs aliments. «Connaître l’origine d’un produit, c’est l’apprécier davantage», résume-t-elle encore.

Un effet à long terme

Ce n’est pas un hasard si la contribution du Tessin à la chaîne de valeur régionale a été récompensée à plusieurs reprises: le jury du «Cercle régional» a particulièrement apprécié l’enthousiasme qui se dégage de « Ticino a Te » et a été impressionné par les résultats obtenus par le projet malgré des moyens financiers limités. Outre les fonds cantonaux, «Ticino a Te» a également bénéficié au départ de subventions NPR de la Confédération. À partir de la cinquième année, le Centre des compétences agroalimentaires du Tessin n’a été financé que par le canton lui-même.

Stefano Rizzi, directeur du département de l’économie du canton du Tessin, explique[MH1]: «Nous avons soutenu le Centre des compétences agroalimentaires du Tessin en tant que projet pilote de politique économique régionale. L’objectif était de mettre en réseau tous les acteurs de la région afin de promouvoir le développement de projets innovants susceptibles de valoriser la richesse de l’industrie agroalimentaire tessinoise. Compte tenu des effets positifs de cette initiative, notamment sur la compétitivité du secteur primaire, le canton a décidé de la soutenir par une contribution annuelle.» 

Sibilla Quadri souligne l’importance du soutien initial: «C’est grâce aux fonds de la NPR et du canton que le projet a pu être mis sur pied. Il est important pour nous que notre travail continue à aider le Tessin à long terme – cela demande beaucoup d’efforts et surtout des ressources financières». 

Le Centre de compétences agroalimentaires du Tessin (CCAT) gère, encadre et développe des projets dans le secteur agroalimentaire. Il dispose d’un vaste réseau de contacts et crée des synergies entre les projets. Grâce à l’expérience acquise dans le cadre du développement de «Ticino a Te» et à la collaboration avec le secteur de la gastronomie, un solide partenariat a été noué, qui sera utile pour d’autres projets de développement régional, notamment les PDR.

Photos: Centre de compétences agroalimentaires du Tessin (CCAT)

Un espace de création pour la région du lac de Constance

C’est à Arbon qu’est née l’espace de création «ZIKpunkt». Un espace où des entreprises, des organisations et d’autres acteurs de la région se réunissent pour développer et réaliser des projets en commun. L’association ZIKpunkt est un puissant générateur d’idées, notamment pour l’économie régionale. Gilbert Piaser, directeur de la région Oberthurgau, explique dans cette vidéo la vision à la base du ZIKpunkt et son importance, et comment le projet a bénéficié du soutien de la Nouvelle politique régionale (NPR).

«Notre région va de l’avant, grâce à la NPR»

Gilbert Piaser souhaitait rendre tangible son engagement en tant que directeur de la région de Haute-Thurgovie: «Lorsque des locaux se sont libérés sur le site de l’ancienne usine Saurer, nous avons saisi l’occasion et avons lancé le projet «ZIKpunkt». Les initiateurs ont misé dès le début sur les subventions de la NPR. 

La région de Haute-Thurgovie a déjà mis en œuvre plusieurs projets grâce à ce soutien. «Notre région va de l’avant, grâce à la NPR», déclare Gilbert Piaser à ce propos. Pour ce qui est de l’initiative ZIKpunkt, les fonds octroyés par la NPR ont été utilisés pour l’essentiel durant la phase de conception et de mise en place, ce qui a permis de mener un important travail de fond. 

Une plateforme pour l’innovation

Le ZIKpunkt est géré par une association spécialement créée à cette fin, association dont font également partie les initiateurs du projet et d’autres membres du comité, nouvellement élus. Une association qui poursuit des objectifs ambitieux pour la région, à savoir: 

  • renforcer la place économique
  • freiner l’exode des professionnels hautement qualifiés 
  • attirer et former des professionnels qualifiés

Le ZIKpunkt tient lieu de plateforme d’innovation. L’association lance des projets innovants en collaboration avec des entreprises, des communes, des organisations et des institutions de la région. On se concentre ici spécifiquement sur la mise en œuvre. «Nous sommes là quand quelqu’un veut réaliser quelque chose de concret», souligne Gilbert Piaser, «le ZIKpunkt est un espace de création et non pas un think tank».

Grouper les compétences et créer des postes à temps partiel

Au début des activités du ZIKpunkt, nous avons testé différents formats afin d’acquérir de l’expérience et d’en tirer des enseignements utiles. Et le résultat est là selon Gilbert Piaser: «La première année, nous avons procédé par tâtonnements. Une approche qui nous a permis de voir ce qui fonctionne vraiment et ce qui ne fonctionne pas au ZIKpunkt». 

Des mandats concrets s’en sont suivis en 2024. Le ZIKpunkt soutient notamment, avec un secrétariat professionnel et un accompagnement spécifique, l’association «PhytoValley Switzerland» spécialisée dans la médecine naturelle. La croissance des domaines d’activité a en outre permis de créer deux nouveaux postes à temps partiel pour l’administration et la direction. Le ZIKpunkt a donc tout en main pour lancer d’autres projets innovants et développer l’économie régionale sur le long terme.

Journées lucernoises des abeilles: tout sur la chaîne de création de valeur des abeilles

Si tout le monde ou presque connaît le miel, la propolis et les bougies en cire, les abeilles et leurs produits ne se limitent pas à ça. Et c’est justement l’objectif des Journées lucernoises qui leur sont consacrées à Sempach, à savoir: présenter l’ensemble de la chaîne de création de valeur de cet insecte. Son programme prévoit un congrès de quatre jours, manifestation qui s’adresse aux spécialistes et aux acteurs économiques, ainsi qu’à la population en général, laquelle se verra proposer des informations aussi riches que variées et des produits apicoles régionaux.

L’effervescence qui régnait lors de la «Magie des abeilles» faisait penser à une ruche en pleine activité. Si la conférence de la veille s’adressait aux apiculteurs professionnels, la deuxième journée intitulée «La magie des abeilles» n’a en effet pas manqué d’attirer le grand public, jeune et moins jeune. Les quelque 600 invités ont pu découvrir à cette occasion – et de manière impressionnante – l’importance des abeilles pour notre vie, la grande diversité des thèmes qui y sont liés et la riche palette des produits apicoles. Les abeilles jouent indubitablement un rôle central en tant que pollinisateurs de plantes naturelles et utiles. Elles font partie à ce titre des animaux de rente les plus importants, leur travail de pollinisation favorisant non seulement la biodiversité, mais aussi, quoique indirectement, la richesse des espèces. 

«Les Journées lucernoises des abeilles ont été un véritable succès. Cette manifestation sera reconduite l’année prochaine où nous proposerons donc à nouveau une «Magie des abeilles». 

Beat Lichtsteiner, chef de projet des Journées lucernoises des abeilles

Beaucoup de choses à voir, à déguster, à essayer et à vivre lors de la «Magie des abeilles»:

  • colonie d’abeilles dans une vitrine en plexiglas et volière 
  • dégustation de différents miels
  • cuisine et pâtisserie avec du miel ou de l’hydromel (boisson fermentée à base de miel)
  • dégustation de bière, d’eau-de-vie et de whisky au miel
  • fabrication de toiles cirées
  • cosmétiques et produits de santé naturels à base de produits apicoles 
  • respirer par l’air des ruches, une thérapie pour les asthmatiques et la désensibilisation
  • jardins aménagés de manière naturelle
  • installation et entretien de ruches sauvages 

Régional, durable et respectueux de l’environnement

Le concept de la «Magie des abeilles» mise particulièrement sur la présentation de produits régionaux, ce qui est tout à fait dans l’esprit du développement durable et de la sensibilisation à l’environnement. Les produits régionaux se caractérisent en effet par une consommation minimale d’énergie grise. Leur production, leur transport et leur consommation sur place ont un impact environnemental nettement moins important que les produits qui viennent de loin. Consommer des produits régionaux renforce en outre l’économie locale et soutient souvent les petites entreprises familiales. 

Vidéo: Journées lucernoises des abeilles

L’idée d’une extension progressive

Le concept – professionnel – d’un «Congrès pour le renforcement de la chaîne de création de valeur des abeilles» a pu être réalisé grâce au soutien financier de la Nouvelle politique régionale ainsi qu’à des financements et des prestations propres. Ce concept prévoit un développement progressif en trois phases. Cette approche permettra d’acquérir de précieuses connaissances et d’améliorer au fur et à mesure l’organisation de la manifestation. La première phase, mise en œuvre avec succès en 2024, comprenait donc l’organisation d’un congrès sur deux journées. La première journée s’adressait aux professionnels de la chaîne de création de valeur, à savoir les apiculteurs, et diffusait des connaissances approfondies à un public de spécialistes. La deuxième journée a été conçue comme une sorte de festival destiné au grand public.

Favoriser des partenariats locaux

En sus des deux journées de congrès, il est prévu d’introduire dans un deuxième temps, une troisième journée dont le but est de mettre en réseau l’économie régionale et privée avec la cohorte des apiculteurs. Il s’agit donc ici de promouvoir la coopération et d’ancrer davantage la chaîne de création de valeur dans ces groupes cibles, en vue de favoriser la création de partenariats. Cette troisième journée devrait également permettre le dialogue entre les professionnels du domaine et les acteurs politiques. 

La troisième phase comprendra une quatrième journée, laquelle s’adressera aux enfants et aux écoles. L’objectif est de sensibiliser ces derniers à des thèmes tels que la biodiversité et le monde des insectes, tout en abordant les notions de durabilité et de  production régionale. Des partenaires seront recherchés en temps opportun pour participer à l’élaboration de ce format.

«Grâce à la contribution de la NPR, nous avons pu mettre en œuvre cette idée rapidement et avec un haut niveau de qualité. Une contribution relativement modeste peut avoir un effet de levier important dans ce genre de projet».

Beat Lichtsteiner, chef de projet des Journées lucernoises des abeilles

Base de données des projets regiosuisse

Le Vacherin Mont-d’Or a retrouvé toute sa saveur régionale

Patricia Michaud

C’est l’une des fiertés vaudoises et sa production est désormais 100 % locale: depuis 2021, les embléma­ tiques boîtes en épicéa renfermant le Vacherin Mont­ d’Or sont fabriquées à la vallée de Joux. Cette relocali­ sation, après dix ans d’«infidélités» de l’autre côté de la frontière, renforce le poids de l’AOP du célèbre fro­ mage, selon les porteurs du projet.

Son goût fruité et sa texture crémeuse font de sa dégustation une expérience culinaire intense. Produit artisanalement entre la mi­août et la mi­mars à la vallée de Joux (VD) et au pied du Jura vaudois, le Vacherin Mont­d’Or est l’un des fromages romands les plus connus. Sa célébrité, ce produit la doit no­ tamment à la boîte ronde en épicéa qui lui sert de cocon et le rend reconnaissable au premier coup d’œil dans le rayon frais des épiceries.

À la vallée de Joux, cette spécialité fait figure de fierté régionale, au même titre que l’horlogerie et la microtechnique. Il y a vingt ans, les membres de l’Interprofession du Vacherin Mont­d’Or – créée en 1999 afin de sauvegarder les intérêts de ce fromage et d’en défendre la production – ont obtenu la consécration ultime: une AOP (appellation d’origine protégée). Et pourtant, durant plus de dix ans, son si caractéristique – et sympathique – emballage a dû être produit hors de la région. Et même hors du pays, en France voisine. Certes avec du bois local – la forêt du Risoud, la plus grande d’un seul tenant en Europe, se situant à proximité de la frontière – mais dans un atelier français, le seul fabricant suisse de boîtes ayant pris sa retraite en 2010.

«Les années passant, la retraite arrivait également pour ce fabricant français», rapporte Pascal Monneron, gérant de l’Interprofession Vacherin Mont­d’Or AOP. Se posa alors sérieuse­ ment la question de la pérennité de l’approvisionnement en boîtes, ainsi que de la conservation d’un savoir­faire ancestral. En 2018, le comité de l’Interprofession a nommé une commis­ sion chargée de plancher sur la question. Etant donné que «l’utilisation de l’image de proximité et du travail artisanal sont primordiaux pour la communication à nos consommateurs», il a été décidé de faire d’une pierre deux coups et de relocaliser la production des boîtes dans la vallée de Joux, ce afin que l’en­ semble de la filière du Vacherin Mont-d’Or soit assuré sur place.

Financement public-privé

© regiosuisse

Une seule société de la région, une PME nommée Boîte du Risoud, était capable de reprendre la fabrication du pré­cieux contenant. «Elle maîtrisait déjà l’assemblage des divers composants de la boîte mais était dépendante de scieurs et de producteurs français», explique Magali Estève de la plateforme Star’Terre, qui a participé à l’accompagnement du projet de relocalisation. «L’idée centrale – qui avait d’ailleurs déjà émergé lors de l’enregistrement de ce fromage en tant qu’AOP – était que les affineurs puissent redevenir maîtres de toute la chaîne.» Parmi les principaux défis rencontrés figuraient ceux de «créer du dialogue entre les différents acteurs, de rapatrier le savoirfaire et de trouver des solutions concrètes en matière de sto­ ckage et de congélation». De congélation? «Oui, sinon le bois perd son humidité, donc sa souplesse.»

Devisé à près de 800 000 francs, le projet de relocalisation de la fabrication des boîtes en épicéa – via la création d’une Sàrl baptisée Valartibois – a été porté par huit des onze affineurs membres de l’Interprofession, ainsi que par la direction de l’en­ treprise Boîte du Risoud. Des coups de pouce financiers régio­ naux sont venus appuyer la démarche, notamment celui d’une fondation et du canton de Vaud. Le projet a également reçu un soutien dans le cadre des mesures pilotes NPR (Nouvelle poli­tique régionale) en faveur des régions de montagne, ainsi que d’autres aides fédérales. Bref, un financement public-privé avec un accent fortement local, comme on en rencontre de plus en plus souvent en terre helvétique.

Patrimoine forestier valorisé

Des machines datant pour certaines des années 1940 ont été installées dans les futurs locaux de Valartibois, situés à L’Abbaye. Ou plutôt réinstallées, puisqu’elles y avaient déjà servi par le passé. Elles permettent de confectionner les quatre com­ posants des boîtes à fromage – le couvercle, le fond et les deux targes (ou pliures) – à partir de grumes d’épicéas provenant du périmètre de L’AOP. Ces pièces sont ensuite transportées au Brassus, où elles sont assemblées. La capacité de montage quo­ tidienne de cet atelier est de 6000 boîtes. Pour mémoire, le Vacherin Mont­d’Or a la particularité d’être conservé dans un double emballage boisé: avant d’être glissé dans son contenant, il est ceinturé d’une sangle – elle aussi en épicéa – qui lui confère son goût si particulier.

Huit nouveaux postes ont été créés afin d’assurer en flux tendu la production annuelle des quelque 700’000 boîtes, soit environ 70% des contenants renfermant les 580 tonnes d’onctueux fromage fabriquées chaque saison. Dans la foulée, 300 m3 de bois sont valorisés. Justement, lors de la cérémonie d’inauguration de Valartibois en septembre 2021, aussi bien le syndic de L’Abbaye Christophe Bifrare que la députée au Grand conseil vaudois Carole Dubois se sont réjouis de la contribution de cette entreprise à la valorisation du patrimoine forestier régional. Il a été rappelé à cette occasion que chaque minute, 1 m3 de bois pousse dans le canton de Vaud.

Davantage de résilience

Certes, les fromagers doivent désormais débourser 3% de plus pour leurs écrins «made in vallée de Joux». Reste qu’en terme de marketing, ce sont non seulement les fabricants de Vacherin, mais aussi toute la région, qui profitent du retour au pays de la production des boîtes. «Cette relocalisation donne davantage de sens et de poids à l’AOP », estime Magali Estève. Par ricochet, il est possible de communiquer sur des valeurs «qui vont bien au­delà du côté local, puisqu’il est question de terroir, de patrimoine, de tradition, d’histoire».

Côté finances, près de deux ans après le lancement de Valartibois, quel est le bilan? «La société ne dégage aucun bénéfice», admet Pascal Monneron. «Par contre, étant donné qu’elle est gérée par les affineurs, donc par ses propres clients, ces der­ niers conservent la maîtrise du prix de revient de la boîte, ce qui constitue un sérieux avantage.» Magali Estève, elle, met le doigt sur un autre avantage économique de taille qu’offre cette relo­ calisation. «En permettant la maîtrise de toute la filière, on a rendu la chaîne de production plus résiliente; en cas de futurs chocs, elle sera mieux à même de résister.».

Projet NPR dans la base de données regiosuisse

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Les produits régionaux: une niche robuste qui a encore un potentiel de croissance

Pirmin Schilliger & Urs Steiger

Qu’y a­t­il derrière le succès des produits régionaux? Quelles sont leurs perspectives d’avenir? Ces deux questions et bien d’autres ont été discutées lors de la table ronde de «regioS» par une experte et deux experts: Eliane Kern, responsable de la communication et des événements de «Feld zu Tisch», une plateforme B2B de commercialisation de produits régionaux dans la région de Bâle; Peter Sta­ delmann, responsable des produits régionaux de la réserve de biosphère unesco de l’Entlebuch; et Urs Bolliger, directeur et responsable des marchés de Culinarium, association responsable de la marque «regio.garantie» en Suisse orientale.

Les taux de croissance élevés des produits régionaux au cours des dix dernières années témoignent d’une success story impressionnante. Quelle est la contribution des canaux de soutien de la Confédération à ce succès: Nouvelle politique régionale (NPR), projets de développement régional (PDR), politique agricole ou promotion touristique d’Innotour?

Urs Bolliger: Les marques affiliées à l’Association suisse des produits régio­ naux (ASPR), y compris notre marque Culi­narium de Suisse orientale, bénéficient surtout du programme de promotion des ventes de l’Office fédéral de l’agriculture (OFAG), en cours depuis 2001. Les projets de ce programme mettent l’accent sur des mesures de marketing et de communica­ tion. Entre 30 et 50% des fonds qui y sont investis proviennent de la Confédération.

Eliane Kern: Le soutien de l’OFAG au projet de développement régional (PDR) «Genuss aus Stadt und Land» est aussi déterminant pour la mise sur pied de «Feld zu Tisch».

Peter Stadelmann: La réserve de biosphère de l’Entlebuch fait d’abord partie de la politique des parcs, laquelle relève de la compétence de l’Office fédé­ ral de l’environnement (OFEV). Celui­ci n’aide certes pas les parcs à développer des produits, mais nous bénéficions aussi d’aides fédérales, par le biais des canaux de soutien de l’ofAG précités. Le soutien d’un PDR pour monter la plate­ forme de commercialisation Biosphäre Markt AG destinée à la région est particulièrement important. Sans l’aide éta­ tique, il n’aurait guère été possible de mettre cette organisation sur pied et de la positionner sur le marché.

Peter Stadelmann © regiosuisse

Quel est à ce jour votre plus grand succès régional?

Eliane Kern: Au cours des deux dernières années, nous avons réussi à construire un réseau dans la région de Bâle, notamment avec un format que nous appelons «speed dating» pour la vente directe régionale. Avec ce format, des productrices et des producteurs ainsi que des acheteuses et des acheteurs se rencontrent et font connaissance, de sorte que les relations commerciales directes s’établissent presque automatiquement. C’est à cette occasion par exemple que le magasin Lokal de Bâle, qui fait le com­ merce de produits régionaux, rencontre une productrice de tempeh de Liestal ou un producteur de pois chiches de Wens­ lingen, pour ne citer que deux exemples des nombreuses relations commerciales directes. Les tables rondes que nous orga­ nisons régulièrement pour perfectionner nos idées et nos outils rencontrent aussi un vif intérêt. En dialoguant avec les pro­ ducteurs et les acheteurs, nous prenons connaissance de leurs besoins immédiats, par exemple en matière d’exigences tech­ niques, et pouvons ensuite cibler d’autant mieux notre action.

Peter Stadelmann: Du point de vue de la réserve de biosphère de l’Entlebuch, la création de Markt AG constitue l’étape la plus importante des dernières années. Pour les producteurs régionaux, cette organisation est devenue un sésame déci­ sif pour faire affaire avec les grands distri­ buteurs. Un service centralisé est essentiel pour générer des ventes dans ce domaine. En fin de compte, les grands distributeurs ne souhaitent pas devoir négocier indivi­ duellement avec chaque fromager et chaque boucher. Le seuil d’accès à la col­ laboration s’abaisse nettement lorsqu’il y a un seul interlocuteur pour toute la région. À côté de ce succès plutôt organi­ sationnel, plusieurs autres réussites liées à un produit me viennent à l’esprit. Je pense par exemple au pur épeautre, que nous avons commencé à cultiver il y a 14 ans à l’initiative d’un transformateur. Depuis lors, cette culture est florissante dans la région, surtout parce que tous les ache­ teurs – donc le meunier, le boulanger, le fabricant de pâtes – et les consomma­ trices et consommateurs finaux sont prêts à payer le supplément que nécessitent tout simplement les coûts de production plus élevés à notre altitude.

Urs Bolliger: L’élément central et décisif de notre success story est la colla­ boration avec Migros, qui a lancé le pro­ gramme « De la région, pour la région» il y a déjà des années. Nous collaborons avec Migros Suisse orientale depuis 2003, tout comme les membres de notre organisa­ tion faîtière collaborent, au sein de l’Asso­ ciation suisse des produits régionaux (AsPR), avec les autres coopératives Migros de toute la Suisse. Je considère comme une étape très importante le fait que Migros ait défini la régionalité avec nous et que les directives soient respectées par tous les participants. Quand on regarde les statistiques des chiffres d’affaires, Migros est définitivement le véritable moteur des ventes avec son programme « De la région, pour la région».

Urs Bolliger © regiosuisse

Malgré tous les succès, vous avez aussi dû apprendre certaines choses à vos dépens. Dans quel domaine par exemple?

Urs Bolliger: La collaboration avec la restauration est plus difficile qu’avec le commerce de détail. La restauration a vraiment été bouleversée par toute l’his­ toire du coronavirus. Elle est en outre soumise depuis longtemps à une vio­ lente pression sur les prix, de sorte que nous nous creusons la tête sur la manière dont nous pourrions collaborer avec des charges acceptables. On trouve certes des restaurants qui travaillent beaucoup avec les produits régionaux depuis assez longtemps. Mais il y a mal­ heureusement un grand nombre d’éta­ blissements qui essaient de donner l’im­ pression par le biais de leur carte qu’ils misent un peu sur les produits régionaux. Si on y regarde de plus près, la plupart des offres sont tout sauf régionales.

Eliane Kern: La question de savoir comment nous pourrions mieux colla­ borer avec la restauration nous occupe aussi dans la région de Bâle. En outre, nous avons dû beaucoup apprendre à nos dépens lors du développement du logiciel pour notre plateforme B2B. Nous imaginions que ce serait plus simple et espérions pouvoir recourir à une solu­ tion existante. Nous nous retrouvons maintenant à devoir promouvoir un développement interne au niveau natio­ nal, donc une solution open source qui puisse également être utilisée par des porteurs de projets analogues. La dura­bilité et les coûts relativement élevés de la micrologistique alimentaire nous donnent aussi du fil à retordre.

Monsieur Stadelmann, où se si- tuent les obstacles dans l’Entlebuch?

Peter Stadelmann: Pour que la création de Markt AG ne devienne pas un obstacle, il a fallu de nombreux entre­ tiens et beaucoup de tact. Nous avons par exemple dû gagner à notre cause les fro­ mageries, qui avaient jusque­là agi en toute autonomie et créé leur propre petite marque. Cela signifiait que chaque fromagerie devait confier une grande part de la responsabilité com­ merciale à la nouvelle organisation, Markt AG, qui a ensuite repris la coordi­ nation et la vente. Ce changement est un processus long et difficile lors duquel tout ne fonctionne pas sans accroc. Notre présence commune signifie que l’entreprise individuelle doit mettre sa propre marque de côté et qu’elle doit soudain collaborer en matière de com­ mercialisation avec des entreprises qu’elle percevait jusqu’alors surtout comme des concurrentes.

Le fonctionnement avec la restauration est-il meilleur dans l’Entlebuch que par exemple en Suisse orientale ou à Bâle?

Peter Stadelmann: Non, travailler avec la restauration est aussi très pénible dans l’Entlebuch. La guerre des prix est violente et les nombreux petits producteurs de notre région ne par­ viennent pas toujours à couvrir la demande, par exemple lors de grands banquets. La disposition des restaura­ teurs et des clients à utiliser l’animal entier au lieu de ne manger que des steaks et des escalopes est en outre limi­ tée. Il faut en général une révision des conceptions pour qu’un bas morceau régional se retrouve parfois à la carte.

Eliane Kern: La sensibilité aux prix est effectivement déterminante dans la restauration pour décider où on achète en fin de compte les denrées ali­ mentaires. À cela s’ajoutent des critères comme la praticité et l’efficience du marché. Quels sont les cycles de livrai­ son? Quelle durée s’écoule entre la com­ mande et la livraison? Quelle est la dis­ ponibilité de l’offre? Avec quelle fiabilité et quelle efficience la chaîne d’approvi­ sionnement fonctionne­t­elle? Nous pouvons certes garantir pas mal de choses sur notre marché B2B, mais nous devons concéder que certains défis sont plus faciles à relever par un commerce plus grand que par une micrologistique.

Eliane Kern © regiosuisse

Existe-t-il des solutions judi- cieuses pour ces cas?

Urs Bolliger: On ne doit pas perdre de vue les relations. Les produits régionaux font certes l’objet d’un matra­ quage médiatique, mais les clients qui les demandent explicitement au restau­ rant restent une minorité. Nous parlons d’une part de marché totale des produits régionaux située entre 5 et 10 % sur l’en­ semble des canaux de vente. J’ai déjà observé plusieurs fois un phénomène sem­ blable avec le bio. Quand on demande au consommateur moyen: «Quelle est à votre avis la part du bio dans les ventes?», la réponse est «certainement 50% ». En réalité, la part de marché des produits bios se situe entre 15 et 18%. La percep­ tion du consommateur ne correspond pas à sa consommation effective. Je le remarque surtout lorsque je discute avec des boucheries qui ont aussi un service traiteur. Il semble certes souhai­ table d’avoir des produits régionaux dans cette offre, mais pratiquement per­ sonne n’est prêt à réclamer explicite­ ment la régionalité. Nous devons nous rendre compte que nous occupons une niche avec la régionalité. La solution devrait consister à se concentrer sur cette niche et à essayer d’y travailler avec succès à l’aide de concepts fiables. Mais nous ne pouvons pas nous attendre à ce que les arbres poussent jusqu’au ciel.

Les produits régionaux n’ont-ils donc que peu de chances sur le marché de masse?

Urs Bolliger: La bonne collabora­ tion avec Migros montre que nous pou­ vons tout à fait marquer des points dans le commerce de détail, tant en qualité qu’en quantité. Nous parlons ici d’un chiffre d’affaires d’environ un milliard de francs que Migros réalise mainte­ nant chaque année par le canal «De la région, pour la région». Or nous colla­ borons également avec d’autres détail­ lants. Le dernier exemple est Aldi Suisse avec la marque «Saveurs suisses». Nous sommes actuellement en pourparlers avec d’autres détaillants, et des possibi­ lités de vente supplémentaires se des­ sinent dans d’autres domaines. C’est ainsi que les cff ont remis au concours cette année l’exploitation de leurs quelque 4000 automates, à condition qu’au moins 10% des articles soient des produits régionaux. Le résultat est qu’un grand exploitant d’automates qui a reçu l’adjudication des cff pour les pro­chaines années nous a contactés. Il existe donc de nouveaux canaux de vente par lesquels encore davantage d’authenticité régionale peut parvenir au consommateur.

Madame Kern, comment évaluez- vous les possibilités de conquérir un marché plus large?

Eliane Kern: Nous cherchons actuellement le contact très ciblé avec la restauration collective. Réussir à accroître les ventes au niveau souhaité dans ce segment dépend toutefois de l’extension de notre infrastructure de production. On demande dans ce cas des produits préparés et donc plus commodes. Nous procédons à une mise en œuvre pro­ gressive et essayons de découvrir au moyen d’analyses de marché ce qui peut vraiment fonctionner.

Comment la réserve de biosphère de l’Entlebuch se positionne-t-elle sur ce marché plus large?

Peter Stadelmann: Si nous avions la recette pour conquérir le marché de masse avec les produits régionaux, je ne la dévoilerais pas. En fin de compte, notre travail consiste à ramer constam­ ment avec de petits projets. Le canton de Lucerne, centré jusqu’à présent sur l’élevage, lance depuis peu une cam­ pagne en faveur du bio et une offensive pour les cultures spéciales. Nous cher­ chons actuellement la collaboration dans ce domaine, tout en ayant conscience qu’il y règne une concur­ rence acharnée. De mon point de vue, il est essentiel d’essayer de placer au bon endroit sur le marché les produits parti­ culiers qu’une région peut proposer. L’Entlebuch est constitué d’herbages en zone de montagne 1 ou plus haute: nous sommes soumis à de fortes limitations en termes de diversité et de productivité. Il me semble d’autant plus important de penser à accroître encore la qualité plutôt que la quantité. Nous devons nous dé­ marquer avec nos produits régionaux de façon à être uniques à tous égards.

Les consommatrices et les consom- mateurs s’imaginent que «régional» est synonyme de circuits courts, de durabi- lité, de produits sains et souvent encore bios. Les productrices et les producteurs peuvent-ils répondre à ces attentes?

Urs Bolliger: Selon des sondages, les consommatrices et les consomma­ teurs n’attendent pas forcément du pro­ duit régional qu’il soit aussi «bio». C’est néanmoins un fait que le consomma­ teur voit parfois dans les produits régio­ naux des arguments positifs qui n’y sont pas. Les produits régionaux jouissent en principe d’une confiance très élevée, ce qui nous oblige au plus grand soin. Les prestations écologiques requises (PER), telles qu’elles sont stipulées en détail dans les directives sur les marques régionales, sont déterminantes pour les critères de qualité de tous les produits regio.garantie.

Eliane Kern: Nous constatons que certains produits régionaux sont expé­ diés à l’échelle nationale. Cela ne signi­ fie pas forcément que ces produits sont moins durables, car d’autres critères, tels que réfrigération, pèsent beaucoup plus lourd dans un bilan CO2 que les kilomètres parcourus. Nous travaillons néanmoins à nous améliorer dans tous les domaines de la durabilité. Cet aspect est et reste un défi important qui requiert un changement de système, lequel ne se produira pas simplement d’un jour à l’autre.

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Petit-déjeuner de la région pour les clients des hôtels

Pirmin Schilliger

Le petit-déjeuner suisse ne se limite pas au muesli: les établissements hôteliers qui misent sur les produits frais régionaux et les spécialités locales pourraient marquer des points auprès de leurs clients grâce à des expériences gustatives et sensorielles incomparables.

C’est avec cet objectif que l’association professionnelle HotellerieSuisse, la Société suisse des cuisiniers (SSC), l’École hôtelière de Thoune et le Culinarium Alpinum, un centre de compétence en restauration régionale alpine à Stans (NW), ont lancé en 2021 un projet Innotour d’une durée de deux ans. La Confédération l’a soutenu à raison d’environ 100 000 francs. L’une des huit entreprises participantes était l’hôtel destiné aux séminaires de la Chartreuse d’Ittingen en Thurgovie. Son directeur Valentin Bot déclare: «Presque tout est fait maison dans notre buffet du petit-déjeuner.»
La plupart des ingrédients qu’utilise cet hôtel trois étoiles proviennent de paysans de la région ou directement de son propre domaine de cent hectares. Il confère à la chartreuse un haut niveau d’autosuffisance, avec sa boulangerie, sa fromagerie et sa boucherie.

Afin de faciliter l’accès des hôtels participants au petit-déjeuner régional, les étudiants de l’École hôtelière et de l’école professionnelle ont élaboré des bases théoriques lors de la première phase du projet. Ils ont inventorié les spécialités disponibles dans les différentes régions, analysé l’offre et la demande et réalisé des analyses commerciales. Les établissements pilotes devaient ensuite montrer à quoi pourrait ressembler leur propre petit-déjeuner régional. Le résultat de leurs efforts est un aperçu étonnamment diversifié du paysage des petits-déjeuners suisses. Chaque restaurant trouvera dans une brochure toutes les informations nécessaires pour surprendre ses hôtes par une cuisine régionale dès le petit- déjeuner.

La version complète est disponible en allemand et en italien.

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La mobilité dans une destination durable

Pirmin Schilliger

Dans la région de vacances Engadine-Samnaun-Val Müstair, la mobilité durable constitue un facteur d’attractivité important et un signe distinctif touristique. C’est dans ce sens que la région a lancé une série de projets pionniers et pilotes au cours des dernières années. Selon leur objectif, ces projets sont soutenus par la NPR, Interreg ou Innotour. L’ouverture du tunnel de la Vereina par les Chemins de fer rhétiques en 1999 a constitué un saut quantique en termes de desserte de la région à grande échelle. Depuis cette date, l’organisation de marketing touristique Tourismus Engadin Scuol Samnaun Val Müstair AG (TESSVM) et la Regiun Engiadina Bassa / Val Müstair (EBVM), responsable du développement régional, s’efforcent avec les communes d’améliorer aussi les offres de mobilité à l’intérieur de la région. La dernière démarche en ce sens a eu lieu en 2022 avec la carte d’hôte qui permet à tous les vacanciers de circuler librement dans les transports publics régionaux. Dans sa version PLUS, cette carte donne aussi le droit de se déplacer dans l’espace frontalier des trois pays que sont la Suisse, l’Autriche et l’Italie, par exemple à destination de Mals (Val Venosta, Tyrol du Sud) ainsi que de Nauders et de Landeck (Tyrol) en passant par le col de Resia ou le col de l’Ofen. Depuis plus de dix ans, la région de vacances s’occupe aussi du transport des bagages pour ses hôtes sur le « dernier kilomètre », donc entre la gare et l’hôtel ou l’appartement de vacances.

© regiosuisse

En Basse-Engadine, les offres principales du tourisme estival incluent des itinéraires cyclables et des chemins de randonnée sur une longueur de plus de 2300 kilomètres. En coordination avec le projet cantonal graubünden bike soutenu par la NPR, la région développe diverses offres destinées aux cyclistes et aux randonneurs avec le master plan VTT TRAI(L)S VALS. Un autre projet se consacre aux infrastructures dédiées aux vélos électriques, notamment au développement d’un réseau de stations de recharge des batteries.

Les efforts visant à rendre la mobilité plus durable portent leurs fruits. Aujourd’hui, un vacancier sur quatre se rend en Basse-Engadine en transports publics. C’est un pourcentage relativement élevé, mais le véritable objectif est encore loin d’être atteint. Les deux organisations TESSVM et EBVM ont attribué à la mobilité durable le statut de mission stratégique permanente.

engadin.com/fr/cartes-hôtes

regiunebvm.ch

tourcert.org

regiosuisse.ch/fr/base-de-donnees-des-projets

Vous trouverez ici la version complète en allemand.

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