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Destinations touristiques: le SECO et les cantons soutiennent la réorientation des offres

Le tourisme d’hiver est pourtant vital pour de nombreuses destinations touristiques. Il faut donc s’attendre, avec le changement climatique, à des saisons hivernales plus courtes dans de nombreux endroits, et ce même si l’on recourt à l’enneigement artificiel. Un certain nombre de projets en cours, soutenus par le Secrétariat d’État à l’économie (SECO) dans le cadre des instruments de promotion que sont la Nouvelle politique régionale (NPR), Interreg et Innotour, aident les destinations à s’adapter au changement climatique.

L’image est éloquente: des prairies vert-brun entourées d’un ruban blanc. Un spectacle auquel de nombreux domaines skiables, en particulier de moyenne et basse altitude, ont dû s’habituer ces dernières années. La durée d’enneigement a diminué de moitié depuis 1970 en dessous de 800 m et de 20% à 2000 m. Le bilan des effets du changement climatique sur l’enneigement en Suisse est donc pour le moins désolant. Si l’on en croit les différents scénarios climatiques de MétéoSuisse, cette évolution se poursuivra dans les années et les décennies à venir. Autrement dit, exploiter de manière rentable des domaines skiables situés en dessous de 1500 m environ sera de plus en plus difficile (Remontées Mécaniques Suisses, 2024). Une situation qui s’explique non seulement par une limite des chutes de neige toujours plus élevée, mais aussi par la diminution du nombre de jours suffisamment froids durant lesquels on peut envisager un enneigement artificiel. À Engelberg, par exemple, à 1037 m d’altitude, le nombre de jours de gel (où la température maximale est inférieure à 0 °C) a presque diminué de moitié depuis les années 1970: d’un peu plus de 40 jours elle est en effet passée à un peu plus de 20 jours (MétéoSuisse, 2024). Une telle situation ne s’explique toutefois pas uniquement par les changements climatiques, la concurrence internationale croissante et l’évolution démographique faisant également partie de l’équation. C’est ainsi que l’on a constaté dans l’ensemble une baisse de plus de 30 % du nombre de journées-skieurs dans les stations de ski suisses depuis le début des années 1990 (Remontées Mécaniques Suisses, 2024c). 

Les projets présentés ci-dessous montrent comment les destinations touristiques peuvent faire face au manque de neige et présentent des solutions possibles, ainsi que les opportunités et les risques qui en découlent.

Projet Innotour «Boussole pour les sports de neige»: garantir l’enneigement malgré un climat qui se réchauffe

Remontées Mécaniques Suisses a lancé le projet «Boussole pour les sports de neige» en collaboration avec l’Association suisse des managers en tourisme (ASMT), projet soutenu par Innotour et qui a pour objectif d’aider les destinations touristiques à faire face aux changements des conditions d’enneigement. Il s’agit de développer dans ce cadre un outil permettant aux régions de sports d’hiver de notre pays d’évaluer leur enneigement actuel et futur et de définir les mesures qui s’imposent, ce sur la base des données et des projections climatiques actuelles et en collaboration avec l’ETH Zurich et l’Institut pour l’étude de la neige et des avalanches (SLF). Les mesures envisageables comprennent également l’optimisation de l’offre de sports d’hiver, notamment via le recours à l’enneigement artificiel et l’adaptation de la durée de la saison, mais aussi des offres qui ne dépendent pas de l’enneigement, comme la culture et la gastronomie. Une fiche d’information sur les scénarios climatiques pour l’hiver 2050 est d’ores et déjà disponible (Remontées Mécaniques Suisses, 2024). Le projet «Boussole pour les sports de neige» couvre la période 2024 – 2026; d’autres résultats publics sont attendus pour l’été 2025 (Remontées Mécaniques Suisses, 2024b).

Projet Interreg «BeyondSnow»: pour sortir du tourisme hivernal classique

De nombreuses stations de sports d’hiver situées en dessous de 1500 mètres d’altitude devront revoir leur stratégie pour devenir moins dépendantes des activités hivernales classiques. Le projet Interreg «BeyondSnow» (2022-2025, financé dans le cadre de la Nouvelle politique régionale (NPR)) soutient dans cette transition neuf destinations dans six pays alpins fortement touchés par le manque de neige. Le domaine de Sattel-Hochstuckli, dans le canton de Schwyz, fait office de destination pilote pour la Suisse. La situation financière difficile que cette dernière connaît l’a contrainte de fermer deux des trois téléskis en 2023. «Cette issue est évidemment très triste», déclare Peter Niederer, vice-directeur du Groupement suisse pour les régions de montagne (SAB), également à l’origine du projet. «Sattel-Hochstuckli est l’un des plus anciens domaines skiables des Préalpes et le ski fait partie intégrante de son histoire.» Les acteurs locaux sont systématiquement impliqués dans «BeyondSnow». C’est ainsi que la population locale a participé à l’élaboration de 22 mesures pour assurer la pérennité de la destination. L’accent est mis sur le tourisme 4 saisons, les investissements dans des événements et des coopérations, ainsi que la réduction des coûts fixes. L’infrastructure de ski doit quant à elle pouvoir être utilisée de manière flexible lorsque les conditions d’enneigement le permettent. Les stations de ski qui participent au projet peuvent également profiter d’échanger leurs expériences en la matière. Sattel-Hochstuckli envisage par exemple d’organiser un événement Ultra Trail, inspiré par Métabief, une autre station de ski du Jura français qui participe elle aussi à «BeyondSnow». À l’avenir, un outil numérique d’aide à la décision accessible au public devrait également être développé pour aider d’autres destinations touristiques à anticiper l’évolution de l’enneigement et à s’y adapter en misant sur la réorientation et la diversification (SAB, 2024). 

Sattel-Hochstuckli en février 2023. La destination doit se réorienter suite à une série d’hivers avec peu de neige (photo Thomas Egger, SAB).

Projet Interreg: «TransStat»: vers un tourisme de ski durable pour les Alpes de demain

Le projet Interreg «TransStat» (2022-2025), auquel participe neuf destinations alpines dans cinq pays, poursuit un objectif similaire à celui de «BeyondSnow». Il s’agit dans ce cas de tester, avec ces destinations et en collaboration avec les acteurs locaux, une procédure afin de développer des scénarios d’avenir souhaitables pour un tourisme (de ski) durable et viable. Ces scénarios doivent servir de base au processus de transition qu’entendent engager les destinations concernées. TranStat développe à cette fin un réseau physique et numérique de sites confrontés à ce type de changement afin de partager des connaissances et des expériences spécifiques. Formuler des recommandations politiques pour l’ensemble de l’espace alpin et pour les contextes régionaux fait également partie des objectifs de ce projet.

Projet Innotour «Destinations climatiquement neutres»: pour une approche globale

Les destinations de montagne sont touchées par de nombreux autres changements induits par le réchauffement climatique. Le projet «Destinations climatiquement neutres» (2024-2026), parrainé par Graubünden Ferien et financé par Innotour, a donc opté pour une approche globale. «Nous voulons que nos destinations relèvent de manière proactive les défis liés au changement climatique et se positionnent en conséquence pour l’avenir», déclare Martina Hollenstein Stadler, responsable du développement durable chez Graubünden Ferien. «Il ne s’agit pas uniquement du thème omniprésent qu’est l’enneigement, mais aussi des autres opportunités et risques que le changement climatique ne manque pas d’entraîner». C’est ainsi que, les étés devenant de plus en plus chauds dans les villes et les agglomérations du Plateau suisse, les touristes en quête de fraîcheur devraient être de plus en plus nombreux à rallier les destinations de montagne (Serquet & Rebetez, 2011). Cela étant, il convient également de tenir compte des précipitations qui ne cessent d’augmenter et qui risquent d’entraîner plus d’inondations et de coulées de boue. Le projet doit contribuer à ce que les destinations participantes développent leur modèle économique touristique afin qu’il soit viable à long terme.» On a analysé pour les trois destinations pilotes du canton des Grisons (Lenzerheide, Engadine Samnaun Val Müstair et Prättigau), comment le changement climatique les affecte et quels sont les risques et les opportunités prioritaires. Selon Martina Hollenstein, l’équipe du projet a élaboré avec les destinations concernées une feuille de route spécifique et accompagnera la première phase de mise en œuvre. Et Martina Hollenstein de souligner: «Ce n’est pas un sprint qu’il faut courir pour être prêt à faire face au climat, c’est un marathon. Nous considérons donc que notre rôle est d’initier un processus qui va bien au-delà de la fin du financement Innotour.» La capacité d’une destination à exploiter les opportunités qui se présentent à elle est également un facteur clé de sa réussite à long terme.

Les participants à l’atelier organisé dans la destination Engadin Samnaun Val Müstair identifient les offres et les infrastructures qui sont affectées par le changement climatique. (Photo: Raphael Portmann).

La Nouvelle politique régionale (NPR) soutient les projets de réorientation touristique

Mais un changement peut aussi être une chance: la Nouvelle politique régionale (NPR), financée par la Confédération et les cantons, offre aux destinations et aux entreprises de très nombreuses possibilités dans ce contexte. La NPR soutient par exemple des études de faisabilité pour des projets de réorientation touristique, comme pour le Fideriser Heuberge dans le Prättigau. Elle peut également soutenir la réorientation stratégique des chemins de fer de montagne, comme par exemple la Wiriehornbahnen AG. La NPR met en outre à disposition des fonds pour la planification de mesures concrètes visant à développer le tourisme estival, comme l’offre de VTT de la destination Engelberg-Titlis, ou pour des stratégies touristiques globales, comme à Kandersteg.

Le changement climatique pose de grands défis au tourisme en Suisse. Le SECO aide ce secteur à les relever grâce aux projets décrits ci-dessus, dont certains sont également présentés dans le dernier Insight, le magazine Innotour. Outre la promotion de projets, la politique du SECO en matière de tourisme vise également à soutenir l’adaptation au changement climatique, par exemple par le développement et le transfert de connaissances dans le cadre du «Forum Tourisme Suisse».

Innotour promeut l’innovation, la coopération et le développement des connaissances dans le domaine du tourisme suisse. Innotour concentre son soutien au niveau national. Cela signifie que la majorité des fonds sont utilisés pour des projets à vocation nationale et pour des tâches de coordination. L’instrument des projets modèles permet également de soutenir des projets au niveau régional et local.

Interreg offre aux régions la possibilité de se développer via des projets transfrontaliers concrets. L’UE, les pays limitrophes, les cantons, la Confédération et des privés financent la coopération dans de nombreux domaines. La participation suisse est financée dans le cadre de la Nouvelle politique régionale (NPR). Les fonds fédéraux proviennent du Fonds de développement régional et doivent être utilisés pour des projets qui contribuent à renforcer la compétitivité des régions. En revanche, les cantons peuvent également investir leurs fonds d’équivalence dans des projets qui ne servent pas directement à augmenter la valeur ajoutée ou à développer l’économie régionale. 

Avec la Nouvelle politique régionale (NPR), la Confédération et les cantons soutiennent le développement économique des régions de montagne, des autres zones rurales et des régions frontalières. La NPR est entrée en 2024 dans sa troisième période pluriannuelle qui dure huit ans (2024-2031). Les anciens axes prioritaires «Industrie» et «Tourisme» sont maintenus. Les petites infrastructures peuvent désormais bénéficier de contributions à fonds perdu sous certaines conditions. Outre l’économie locale, qui complète l’orientation vers l’exportation de la NPR, le développement durable et la numérisation sont des thèmes transversaux qui revêtent une importance particulière.

Liens et sources

MétéoSuisse, 2024. Indicateurs climatiques.

NCCS, National Centre for Climate Services, 2024. CH 2018 – Scénarios climatiques pour la Suisse.

Suisse Tourisme, 2024, Tourisme d’hiver et réchauffement climatique.

Groupement suisse pour les régions de montagne (SAB), 2024. Projet BeyondSnow.

Secrétariat d’Etat à l’économie SECO, 2024, Innotour – Projets soutenus.

Graubünden Ferien, 2024.  Projet Klimafitte Destinationen, dernière consultation: 15.12.2024.

SRF News, Schweizer Radio und Fernsehen, 2024. Tourismus im Misox: Auf die Flut folgen die Annullationen, dernière consultation: 10.01.2025.

Remontées Mécaniques Suisses, 2024. Fiche d’information «Scénarios climatiques hivernaux pour la Suisse d’ici à 2050» , dernière consultation: 10.01.2025.

Remontées Mécaniques Suisses, 2024b. Questions et réponses sur le changement climatique et les phénomènes météorologiques, dernière consultation: 10.01.2025.

Remontées Mécaniques Suisses, 2024c. Bilan de la saison 2023/24. Fréquentation des domaines skiables, dernière consultation: 21.01.2025.

Interreg Alpine Space, 2024. TransStat – Transitions to Sustainable Ski Tourism in the Alps of Tomorrow, dernière consultation: 21.01.2025.

Kämpf, Richard, 2024. Proaktiver Umgang mit dem Klimawandel. EventEmotion, dernière consultation: 21.01.2025.

Littérature scientifique

Serquet, G., Rebetez, M. Relationship between tourism demand in the Swiss Alps and hot summer air temperatures associated with climate change. Climatic Change 108, 291–300 (2011). https://doi.org/10.1007/s10584-010-0012-6

RiCoNET – le Valais et le Piémont repensent l’utilisation de l’espace

Dans de nombreuses régions, des espaces, des lieux et des bâtiments sont utilisés de manière très limitée, quand ils ne sont pas laissés totalement vides. Le projet Interreg «Régénération territoriale et coopération pour la gouvernance transfrontalière» (RiCoNET) a justement pour objectif d’analyser le potentiel de ces espaces sous-utilisés et de trouver comment l’exploiter pleinement. La coopération italo-suisse aborde conjointement la réutilisation de ces espaces et peut ainsi inspirer d’autres régions.

Cristina Saviozzi, codirectrice du projet du côté suisse et chercheuse à l’Institut Tourisme de la HES-SO à Sion, donne dans cette interview un aperçu des défis et des succès de cette entreprise et explique pourquoi repenser les espaces et les bâtiments sera un sujet qui nous occupera de plus en plus à l’avenir.

Madame Saviozzi, quels objectifs poursuiviez-vous avec le projet RiCoNET?

RiCoNET s’est penché sur la revitalisation de locaux et d’espaces sous-utilisés dans les régions frontalières italo-suisses, en Valais et dans le Piémont pour être précis. Nous avons comparé pour ce faire les méthodes appliquées dans les deux pays. Des ateliers et des formations spécifiques portant sur cette thématique ont en outre été proposés. 

Qui a participé à ce projet?

Côté suisse, le projet a été dirigé par la HES-SO et côté italien par l’Université du Piémont oriental. Il a été mené en étroite collaboration avec la ville italienne de Biella et avec les communes valaisannes de Riddes et Isérables. Les partenaires suisses impliqués ont été soutenus par des fonds Interreg de la Nouvelle politique régionale et les partenaires italiens par des fonds Interreg de l’UE. Un projet de cette envergure n’aurait jamais vu le jour sans ce soutien.

RiCoNET s’est officiellement terminé en 2023. Le projet est-il malgré tout encore pertinent aujourd’hui? 

Absolument! Des locaux et des espaces sous-utilisés, il y en a partout. Biella est une ville, Riddes et Isérables sont de petites communes de montagne et pourtant, elles sont toutes les trois concernées par la même thématique. L’évolution de la société fait que les besoins changent et les lieux qui perdent leur utilité initiale sont de plus en plus nombreux.

L’atelier que nous avons organisé à Isérables l’a par exemple bien montré: les pratiques agricoles traditionnelles ont changé dans les régions de montagne, notamment en raison du changement climatique, et de nombreux greniers à céréales sont aujourd’hui vides. Nous avons réfléchi à cette occasion sur la manière dont ces bâtiments pourraient malgré tout offrir une valeur ajoutée, que ce soit en tant que sites culturels, attractions touristiques ou espaces polyvalents. 

RiCoNET reste actif et pertinent puisque nous continuons à mettre à disposition sur notre site web les ressources élaborées dans le cadre de nos ateliers et partagées lors de nos formations.

Pouvez-vous décrire en détail les mesures qui ont été prises dans le cadre de RiCoNET? 

Les ateliers organisés avec les étudiants des deux hautes écoles ont été l’occasion de visiter des locaux sous-utilisés dans les communes partenaires et de réfléchir à la manière dont ils pourraient être réutilisés. A Biella, nous avons par exemple imaginé revaloriser un bâtiment industriel désaffecté et l’utiliser pour des événements culturels et des réunions publiques. Nous avons également créé le «Living Lab RiCoNET», une plateforme de connaissances et d’échanges pour les méthodes et les idées de réaffectation des locaux inutilisés. 

À qui s’adresse cette plateforme?

Living Lab RiCoNET permet l’échange entre différents groupes cibles. C’est ainsi que les citoyens ont la possibilité d’identifier des locaux sous-utilisés et de faire des propositions quant à la manière de les revaloriser.

La plateforme s’adresse également à l’administration publique puisqu’elle met à sa disposition des ressources lui permettant d’envisager la réutilisation temporaire de ce genre de locaux. 

Elle accueille enfin également les professionnels de l’urbanisme et de l’architecture qui peuvent échanger des idées et envisager des projets de rénovation sur la base des discussions menées via le Living Lab.

RiCoNET était donc une collaboration entre la Suisse et l’Italie. Comment s’est- déroulée? 

La question des lieux et des espaces sous-utilisés préoccupe les deux pays. L’étroite collaboration mise en place dans le cadre de ce projet a permis d’échanger et d’agréger nos connaissances en la matière. Nous avons également pu organiser des tables rondes et y faire participer des étudiants en économie d’Italie et des étudiants en tourisme de Suisse. Et comme les trois communes partenaires du projet étaient très différentes sur le plan géographique et démographique, le développement territorial a pu être envisagé sous un angle très large.

Qu’est-ce qui a été particulièrement difficile?

Il a fallu organiser des formations en ligne plutôt qu’en présentiel en raison du Covid. Nous avons également dû étudier attentivement les textes juridiques des deux pays, car il n’existe pas de lois nationales ou internationales relatives à la reconversion des sites et des locaux, mais uniquement des règlements communaux.

De quoi êtes-vous particulièrement fiers? 

Les trois boîtes à outils élaborées dans le cadre de nos ateliers et que nous mettons à la disposition de l’administration publique et d’autres personnes intéressées sont une belle réussite et représentent le résultat tangible de notre travail. Sur un plan plus abstrait, nous sommes heureux d’avoir pu réunir des étudiants de deux pays aux cursus différents. Des échanges qui ont profité à tout le monde. Enfin, nous travaillons déjà sur un nouveau projet, qui porte également sur la transformation de locaux vides en espaces multifonctionnels dont peuvent profiter les communes.

Plus d’informations sur RiCoNET.

Photo: RiCoNET

AlpFoodway

Le numéro 15 de «regioS» avait parlé du projet AlpFoodway, qui se consacre depuis 2016 au patrimoine alimentaire  alpin de six pays. Le but de ce projet est de créer une base pour que ce patrimoine soit intégré au patrimoine culturel immatériel de l’UNESCO.

Guide numérique des offres de promotion économique

La promotion économique de la Confédération soutient la place économique suisse par le biais d’un large éventail d’offres de soutien et de promotion destinées aux entreprises et à d’autres organisations. Jusqu’à présent, les utilisatrices et les utilisateurs de ces offres étaient confrontés au défi de trouver rapidement la solution qui leur convenait. Le «Panorama de la promotion économique», nouvel outil interactif de conseil, a pour but de faciliter cette démarche: il suffit de quelques clics pour trouver les offres pertinentes. Ce guide numérique complète les rubriques existantes du site Internet du SECO. La palette actuelle comprend seize instruments de soutien et environ cinquante offres différentes.

promotion.guide/fr/

Mobilité durable dans les régions

Pirmin Schilliger & Urs Steiger
La mobilité joue incontestablement un rôle important pour le développement régional. Dans notre économie fondée sur la division du travail, l’accessibilité des espaces tant urbains que ruraux constitue un facteur décisif d’implantation.
© regiosuisse

Avec les programmes de développement stratégique (PRODES) des routes nationales et de l’infrastructure ferroviaire ainsi qu’avec les fonds de financement dédiés, la politique des transports fournit l’infrastructure de base. Elle soutient aussi le développement de solutions de transport et de mobilité durables par une série de programmes de promotion tels que le Programme en faveur du trafic d’agglomération (PTA), la Nouvelle politique régionale (NPR), Interreg, les projets-modèles pour un développement territorial durable (MoVo), Innotour ou le Bureau de coordination pour la mobilité durable (COMO). «regioS» esquisse ci-dessous les défis que pose le développement de solutions de transport et de mobilité porteuses d’avenir et décrit l’éventail des instruments de soutien à la disposition des acteurs régionaux.

Dans la société interconnectée à l’échelle globale, un système de transport performant et facile d’accès est incontestablement un avantage économique décisif et un facteur de compétitivité. Sans desserte efficace, les régions perdent rapidement l’accès aux centres et vice-versa. Avec l’engagement politique en faveur de l’occupation décentralisée du territoire, conformément à la loi sur l’aménagement du territoire (lat), la desserte des régions jouit d’une importance politique et sociale particulière qui contribue à la cohésion du pays au-delà de toutes les barrières sociales et culturelles. Selon le Plan sectoriel des transports, qui expose la stratégie de mobilité du Conseil fédéral, toutes les régions doivent «se développer dans une juste mesure».

Une mobilité qui garantisse l’égalité des chances en Suisse n’est pas simplement une belle promesse, mais un besoin national, que ce soit dans les villes-centres, les agglomérations, les espaces ruraux du Plateau ou les régions de montagne. «Ce n’est pas par hasard que la Suisse dispose aujourd’hui de l’un des réseaux de transport les plus denses au monde, avec environ 83 300 kilomètres de routes et 5200 kilomètres de lignes de chemin de fer», commente Nicole A. Mathys, cheffe de la section Bases à l’Office fédéral du développement territorial (are). Il n’y a guère de localités du pays qui ne soient pas desservies par les transports publics (TP). Le car postal se rend même chaque jour et au moins toutes les deux heures à Juf (GR), le village le plus haut d’Europe, qui compte quelque trente habitantes et habitants.

La population suisse fait grand usage de ces offres étendues: huit personnes actives sur dix font la navette entre leur domicile et leur lieu de travail durant environ une heure par jour ouvrable en moyenne. Le trafic de loisirs est encore plus important puisqu’il est responsable de près de la moitié (44 %) des distances quotidiennes parcourues, selon le microrecensement mobilité et transports (mrmt). Que ce soit pour travailler ou pour se divertir, la mobilité va en tout cas de soi pour la société moderne. Or les routes, les voies ferrées, les chemins et les moyens de transport d’aujourd’hui n’ont pas simplement jailli du sol, mais ont été construits au cours des décennies. Ils sont le résultat d’innombrables efforts à la croisée du territoire, de la technique, de la science, de la société et de la politique.

La tâche est extrêmement complexe

Développer les transports et la mobilité de manière pertinente pour l’avenir est une tâche complexe. Les «Perspectives d’évolution du transport 2050» du Département fédéral de l’environnement, des transports, de l’énergie et de la communication (detec) se fondent sur au moins sept tendances déterminantes, environ trois douzaines de facteurs d’influence essentiels et plus de cent variables. «Logiquement, de nombreux acteurs de la Confédération, des cantons, des régions et des communes sont associés à la conception de solutions de transport et de mobilité», observe Nicole A. Mathys, ce qui requiert des connaissances spécialisées dans différents domaines tels que transports, développement territorial, environnement, logement et énergie. Au niveau national, les transports relèvent de la compétence du detec. Mais les cantons et les communes ont aussi des obligations, surtout en matière de construction et d’entretien des routes cantonales et communales, de transports publics de proximité et régionaux ainsi que de développement de la mobilité douce. Pour développer une mobilité durable et porteuse d’avenir, il est demandé à tous ces intervenants d’harmoniser au mieux tous les intérêts de la société et de l’économie en tenant compte du développement territorial et de l’environnement.

Les Perspectives 2050 esquissent, à l’aide de différents scénarios, la direction dans laquelle la mobilité et les transports pourraient évoluer en Suisse d’ici à 2050 (voir encadré). Il semble clair que les transports dans leur ensemble continueront d’augmenter, mais plus lentement que la population. Les limites de capacité sont déjà atteintes aujourd’hui à différents endroits. Selon le Plan sectoriel des transports, les capacités de transport pour les personnes et les marchandises doivent donc à l’avenir être exploitées de manière plus efficiente et développées ponctuellement. Des améliorations énergétiques sont en outre nécessaires dans tous les systèmes de transport pour réduire à zéro net les émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2050 et ainsi lutter contre le changement climatique. Un processus de transformation est indispensable pour y arriver. «Les offres de mobilité du futur doivent devenir plus durables, plus transparentes, plus flexibles, plus interconnectées, plus confortables, plus conviviales et justement neutres en CO2», souligne Nicole A. Mathys. Il faut en outre réduire le transport individuel motorisé (tim) et développer encore les transports publics (TP).

© regiosuisse

Amélioration de la mobilité – avec moins de trafic

Il y a en Suisse de nombreuses possibilités de soutien dans le domaine de la mobilité durable, comme le démontre l’aperçu des programmes de soutien. Ceux-ci ne se concentrent pas, au niveau régional, sur de grands projets d’infrastructure tels que le tunnel du Rosenberg sur l’A1 à Saint-Gall, l’aménagement du tronçon ferroviaire du pied du Jura ou l’acquisition de nouveaux moyens de transport – car ces projets relèvent en priorité de la compétence de la Confédération dans le cadre de la politique des transports. Les efforts de promotion régionaux soutiennent surtout de nouvelles solutions de mobilité et offres de prestations qui visent à optimiser les systèmes existants. Ils concernent aussi bien le trafic professionnel et pendulaire que le trafic touristique et de loisirs. «Des initiatives de réduction du trafic et de modification des comportements sont nécessaires, en faveur d’un développement des pistes cyclables et des chemins pour piétons ainsi que d’un report vers les TP», explique Nicole A. Mathys. À cela s’ajoutent des mesures d’aménagement du territoire qui accroissent la qualité résidentielle et l’attractivité du milieu bâti et permettent ainsi à la population de couvrir la majeure partie de ses besoins vitaux dans son environnement immédiat. Les besoins de mobilité, qui continuent malgré tout de croître avec le bien-être, devraient être couverts de manière non seulement plus efficiente, mais aussi plus propre et plus respectueuse de l’environnement.

Le défi majeur de l’aménagement est de faire concorder les intérêts de tous les participants et d’unir leurs forces pour travailler à un développement cohérent. En complément de la planification générale des transports au niveau fédéral (prodes RN, prodes rail et projets d’agglomération) financés par le fonds d’infrastructure ferroviaire (fif) et le fonds pour les routes nationales et le trafic d’agglomération (forta), tous les cantons disposent de leurs propres stratégies de mobilité, plans directeurs et instruments de planification. Lucerne fonde par exemple la mise en œuvre sur le programme de construction des routes cantonales, le rapport sur les TP et la planification cantonale en matière de vélo. Il est prévu maintenant de réunir tous ces instruments dans un nouveau «programme de mobilité globale», afin que le canton puisse coordonner son action avec les régions et les communes. «Dans tous les organismes et à tous les niveaux mentionnés, un consensus de fond se dessine en faveur d’une planification de la mobilité porteuse d’avenir, selon la devise: éviter le trafic, le transférer, le gérer et l’interconnecter en respectant l’environnement», constate Nicole A. Mathys.

Priorités variables

Les priorités de mise en œuvre diffèrent en fonction de la région et du type de trafic: les mesures de lutte contre les pointes de trafic et les périodes de congestion restent un objectif central des villes et des agglomérations. Dans de nombreuses communes du Plateau, que ce soit Niederbipp (BE), Obergösgen (SO) ou Winznau (SO), les défis majeurs sont en revanche le trafic pendulaire et la planification de l’urbanisation. Selon une analyse de Pricehubble, entreprise spécialisée dans les données immobilières, ces trois localités sont représentatives d’une évolution qui peut être observée à de nombreux endroits de Suisse: bien qu’elles se situent en pleine campagne, elles deviennent de plus en plus des communes de pendulaires, grâce à des maisons relativement bon marché et à la proximité de Zurich (une heure de trajet au maximum). Il est aussi avantageux de travailler à Bâle et d’habiter dans le Jura, par exemple à Haute-Sorne, à Moutier ou à Develier. Une dynamique de mobilité et d’urbanisation similaire s’est aussi emparée des banlieues de certains centres intra-alpins tels que Viège ou Saint-Moritz. En haute saison, les grandes destinations touristiques alpines se voient en outre confrontées à des problèmes analogues à ceux des agglomérations et des villes: congestion et parkings saturés. Les régions de montagne périphériques et les vallées latérales reculées font face quant à elles à un défi tout autre: elles luttent contre l’exode et pour le maintien de la desserte par les TP.

Il n’est pas possible à l’heure actuelle de prévoir quels choix politiques futurs accéléreront encore la transformation de la mobilité en direction de la durabilité. Le levier majeur est sans aucun doute le trafic routier, qui occasionne actuellement environ un tiers de la consommation d’énergie. Le taux de motorisation de la Suisse est élevé avec environ 550 voitures pour 1000 habitantes et habitants et l’efficience énergétique vraiment mauvaise. Ceci qui est dû principalement aux nombreux véhicules puissants qui transportent la plupart du temps une seule personne. Les émissions de CO2 moyennes des voitures neuves en Suisse sont aujourd’hui parmi les plus élevées d’Europe.

«Nous serons obligés de rendre le trafic routier plus efficient au plan énergétique et plus respectueux du climat», Nicole A. Mathys en est convaincue. Avec la première étape de la «feuille de route pour la mobilité électrique », la Confédération souhaite qu’environ la moitié des nouvelles voitures immatriculées soient équipées d’une propulsion électrique ou hybride d’ici à 2025. Un autre poten­ tiel largement inexploité est la gestion des transports fondée sur des données pour une utilisation plus efficiente des moyens et des infrastructures de transport. «Le domaine du trafic individuel motorisé (tim), qui occasionne actuellement 70 % des coûts externes des transports, soit environ 14 milliards de francs par année, présente encore un potentiel d’optimisation important», fait remarquer Nicole A. Mathys. Toutefois, l’électrification visée du parc suisse de véhicules ne résout au mieux qu’une partie du problème. En fin de compte, les véhicules électriques participent aussi aux embouteillages, ont besoin de routes et, bien sûr, d’électricité dont la production n’est de loin pas toujours propre.

Promouvoir des solutions de mobilité innovantes

Les principaux instruments de l’infrastructure de mobilité sont les programmes de développement stratégique des routes nationales (PRODES RN) et de l’infrastructure ferroviaire (PRODES rail). Leur financement est assuré par le fonds d’infrastructure ferroviaire (FIF), avec un volume de 19,3 milliards de francs pour les deux étapes d’aménagement 2025 et 2035, et par le fonds pour les routes nationales et le trafic d’agglomération (FORTA), avec un volume de 11,6 milliards de francs d’ici à 2030 pour les routes nationales (PRODES RN) et de 7,18 milliards de francs de 2008 à 2023 pour le trafic d’agglomération, puis d’environ 1,6 milliards de francs dès 2024 pour la quatrième génération de projets. Ces instruments contribuent beaucoup à la desserte des régions, mais ils aident aussi les acteurs à accélérer la transition vers une mobilité durable et à développer les solutions innovantes nécessaires à cet effet.

Les instruments de la politique des transports axés sur l’infrastructure sont complétés par des instruments de promotion et des programmes qui affinent et soutiennent ce processus au niveau régional.

Programme en faveur du trafic d’agglomération (PTA)

C’est par le biais de ce programme que la Confédération parti cipe au financement de projets de transport qui visent à amélio rer le trafic d’agglomération. Le soutien porte en priorité sur l’extension des capacités des TP, sur l’électrification des moyens de transport, sur une meilleure interconnexion par le biais d’interfaces de transport, et sur des infrastructures de mobilité piétonne et cycliste sûres et attractives. Les mesures de modéra tion du trafic et d’apaisement des quartiers, les zones de rencon tre et les désengorgements ciblés des centres jouent un rôle décisif dans les projets du trafic individuel motorisé (TIM). Le périmètre du soutien comprend des communes éligibles organisées en entités responsables. Il inclut les agglomérations alpines de Coire, Davos, SaintMoritz, Altdorf, Glaris, Oberwallis (Brigue, Viège, Naters), Valais central (Sion, Sierre, Crans Montana), Coude du Rhône (Martigny) et Chablais (Monthey, Aigle, Bex), ainsi que les zones de programmation Interreg des régions frontalières.

Le PTA est le poids lourd financier des programmes de soutien. Lors de la consultation sur la quatrième période de programmation, la Confédération s’est prononcée en faveur d’un financement de 1,6 milliard de francs au total (cofinancement de 37 %). Les can tons, les villes et les communes y participent ensemble à raison de 2,7 autres milliards de francs (63 %). Le PTA déploie ses effets en priorité dans la Suisse urbaine. Avec des solutions de mobilité qui touchent le trafic pendulaire ou de loisirs, il rayonne toutefois loin à la ronde dans les espaces ruraux et les régions de mon­ tagne. Les projets PTA démontrent que, dans un petit pays comme la Suisse, les effets des mesures relatives aux transports se développent au­delà des agglomérations elles­mêmes.

➜ Exemples de projets (de la période de programmation actuelle):

© regiosuisse

Nouvelle politique régionale (NPR)

La NPR, gérée par le Secrétariat d’État à l’économie (SECO) en colla­ boration avec les cantons, soutient des projets de transport et de mobilité qui contribuent concrètement à la compétitivité des régions – par exemple dans le tourisme. La Confédération et les cantons parti­ cipent chacun pour moitié aux projets NPR. De nombreux projets de mobilité sont lancés dans le cadre d’une politique de desserte par les transports qui fait partie de la stratégie de développement régional.

➜ Exemples de projets: extension du réseau et de l’infrastructure

Programmes Interreg

Interreg, auquel la Suisse participe via la NPR dans les espaces transfrontaliers, poursuit des objectifs semblables à ceux de la NPR. Les projets de transport et de mobilité constituent une prio­ rité claire de son soutien, notamment dans les quatre régions frontalières qui coopèrent de plus en plus: Suisse du Nord­Ouest – Allemagne – France, Genève – Suisse romande – France, région du lac de Constance – Allemagne – Autriche ainsi que Tessin – Grisons – Valais – Italie.

➜ Exemples de projets:

Attila Kartal dans l’atelier de Rent a Bike AG à Willisau (LU). Les services renforcent le vélo comme moyen de transport tant quotidien que de loisirs.© regiosuisse

Projets-modèles pour un développement territorial durable (MoVo)

Avec les MoVo, huit services fédéraux soutiennent, sous la direc tion de l’ARE, des approches et des méthodes nouvelles pour un développement territorial durable, ce qui inclut aussi de nou velles solutions de mobilité. Pendant la quatrième période de programmation (2020–2024, en cours), la Confédération soutient 31 projets pour un total d’environ 3,9 millions de francs. Huit de ces projets sont explicitement consacrés à la mobilité. Ils visent princi palement à promouvoir les «courtes distances, l’activité physique et les rencontres».

➜ Exemples de projets actuels ou achevés récemment:

Innotour

La Confédération soutient à raison de 30 millions de francs la période de programmation actuelle 2020–2023 pour encourager l’innovation, la coopération et la professionnalisation dans le domaine du tourisme (Innotour). Les priorités de ce programme coordonné par le SECO portent non seulement sur de nouveaux services touristiques d’hébergement, de restauration et d’accueil, mais aussi sur le transport et le trafic. En fin de compte, des so­ lutions de mobilité touristique durable désengorgent l’ensemble du système de transport de la Suisse, dans lequel le trafic de loi­ sirs est connu pour jouer un rôle dominant.

➜ Exemples de projets:

Bureau de coordination pour la mobilité durable (COMO)

Le COMO est rattaché à l’Office fédéral de l’énergie. Il soutient chaque année jusqu’à une douzaine de projets novateurs en ma­ tière de mobilité durable. Ses ressources financières proviennent du programme SuisseÉnergie. Les projets COMO sont cofinancés par les offices fédéraux ARE, OFROU, OFT, OFEV et OFSP. Le sou­ tien se concentre sur des solutions qui favorisent les modes de déplacement propices à l’activité physique et respectueux de l’environnement et des ressources. L’éventail des projets s’étend de l’app pour une gestion simplifiée des places de parc aux mesures de promotion des TP et de la mobilité douce.

➜ Exemples de projets actuels:

Vous trouverez davantage de projets dans la base de données regiosuisse: regiosuisse.ch/fr/base-de-donnees-des-projets

© regiosuisse


Perspectives d’évolution du transport 2050

Les Perspectives d’évolution du transport 2050 esquissent quatre scénarios possibles d’évolution, dont le scénario de base qui se trouve au centre de la planification future. D’après ce dernier, le trafic voyageurs (mesuré en personneskilomètres) en Suisse, toutes catégories confondues, croîtra de 11 % d’ici à 2050. La raison principale est que la population continuera de croître durant la même période, de plus de 20 % pour atteindre 10,4 millions de personnes. Le DETEC s’attend à des taux de croissance nettement plus élevés pour le trafic de loisirs, déjà responsable aujourd’hui de 44 % des distances journalières. On table sur une augmentation de 15 % du trafic d’achats, mais sur une diminution du trafic professionnel de 13 % par rapport à aujourd’hui. Les moteurs de cette évolution sont le vieillissement de la population, la baisse de la part des personnes actives occupées dans la population totale et, surtout, la diminution du trafic pendulaire grâce à l’augmentation du télétravail.

Des changements se dessinent aussi en matière de répartition modale : l’urbanisation progressive et la nouvelle extension des TP auront pour conséquence que les gens des villes rouleront moins dans leur propre voiture. Déjà aujourd’hui, environ la moitié des ménages des grandes villes ne dispose pas de son propre véhicule motorisé, tandis que celui-ci semble rester indispensable à l’avenir dans les localités rurales et périphériques. Le trafic individuel motorisé (TIM) devrait certes diminuer de 5 % selon les Perspectives 2050, mais constituerait encore 68 % du trafic voyageurs. Tout compte fait, les TP pourraient voir leur part passer de 3 à 24 % d’ici à 2050. Le trafic cycliste devrait connaître des progrès sensibles, même si c’est à un bas niveau : le vélo pourrait doubler sa part en passant de 2 à 4 %.

S’agissant du trafic marchandises, le DETEC table sur une croissance toujours forte de 31 % pour atteindre 36 milliards de tonnes-kilomètres. D’ici à 2050, le rail devrait gagner deux points de pourcentage dans la répartition modale, avec une part de 39 % du trafic marchandises, mais la majeure partie des tonnes-kilomètres reviendra probablement toujours aux routes en 2050.

Comportement de la population en matière de mobilité en 2021

La population résidente suisse a parcouru en 2021 environ 43 % des distances intérieures pour les loisirs – le motif de déplacement de loin le plus important. En 2021, le deuxième motif de déplacement en importance a été le trafic professionnel, suivi par le trafic d’achats. Au total, 30 km ont été parcourus en Suisse par personne et par jour, 6,8 km de moins que six ans auparavant. En raison de la pandémie, la population a été moins mobile pour la première fois depuis des décennies. Le vélo électrique a été le seul moyen de transport qui a été davantage utilisé malgré la pandémie.

Les divers groupes de population diffèrent parfois beaucoup en matière de mobilité. Les jeunes adultes âgés de 18 à 24 ans ont été particulièrement mobiles avec une distance journalière moyenne de 40,2 km par personne. En 2021, les habitantes et les habitants des communes rurales ont parcouru un quart de kilomètre de plus que les citadines et les citadins. Du point de vue de la population, les améliorations des transports publics et la réduction des incidences des transports sur l’environnement sont plus importantes que les améliorations de la mobilité cycliste, routière ou piétonne.

Bibliographie

OFS/ARE (2023): Microrecensement mobilité et transports 2021. Neuchâtel

Müller-Jentsch Daniel, Avenir Suisse (2020): Les «vallées-centres». Les vallées principales comme axe de développement des régions de montagne.

Wüest Partner (2021): Berggebiete: Sozioökonomische Analyse, eine empirische Grundlagenstudie im Auftrag des SECO (résumé en français).

Un poumon vert au parfum industriel

Patricia Michaud

D’ici l’été 2021, le Parc des Carrières accueillera ses premiers visiteurs. Cet ambitieux projet transfrontalier prévoit de convertir en parc paysager une vaste zone mixte – champs, gravière, etc. – située entre les villes de Bâle, Allschwil, Hégenheim et Saint-Louis. Les promoteurs du projet s’appuient sur les caractéristiques mêmes de ce «non-lieu» pour structurer l’aménagement du territoire. Un modèle à exporter.

Des pelleteuses s’activent bruyamment dans une imposante gravière, tandis que des avions sillonnent le ciel; à perte de vue, on aperçoit des champs de colza et de maïs uniformes et rectilignes. Les quelque 300 hectares de terrain situés entre les villes suisses de Bâle et Allschwil et françaises de Hégenheim et Saint-Louis ne correspondent pas vraiment à l’idée que l’on se fait d’une oasis de nature et de détente. Et pourtant, d’ici l’été 2021, cette zone transfrontalière accueillera les premiers visiteurs du nouveau Parc des Carrières IBA, un ambitieux projet qui a pour but d’offrir un véritable poumon vert aux habitants de la région.

Dans ce parc paysager, dont les trois étapes de réalisation s’étendront jusqu’en 2028, les citadins trouveront de quoi échapper, le temps d’une heure ou d’une demi-journée, au stress du quotidien. Le projet fait la part belle aux sentiers végétalisés et à des équipements familiaux – aire de jeux, tour d’observation, etc. – mais aussi, à moyen terme, à la préservation de la biodiversité, ce grâce à des centaines d’arbres indigènes et à des prairies maigres pâturées par des moutons. Pour accéder à cet îlot de nature réaménagée – dont le cœur occupera près de 12 hectares –, les résidents des quatre localités limitrophes auront à leur disposition plusieurs corridors piétons et cyclables. Pas moins de 40 000 habitants du secteur pourront ainsi atteindre le Parc des Carrières en moins de 12 minutes à pied ou 5 minutes à bicyclette. Sans oublier la ligne de tram numéro 3 reliant Bâle à Saint-Louis, dont un arrêt donne directement accès au parc.

Coexistence entre nature et activité humaine

Le Parc des Carrières, c’est tout d’abord une vision, celle de l’urbaniste bâlois Andreas Courvoisier. «En Suisse, les gravières sont de taille relativement modeste. Mais en France et en Allemagne voisines, elles sont gigantesques et marquent fortement le paysage. Généralement, lorsqu’elles ne sont plus exploitées, ces carrières sont remblayées, puis le terrain est rétrocédé à l’agriculture. Or, il me paraît pertinent d’apporter de la valeur ajoutée à ces espaces, d’éviter la monoculture tout en contribuant à la biodiversité et à la mise en avant du paysage local dans toute sa spécificité. Après tout, le gravier est l’une des ressources naturelles essentielles dont dispose notre région!»

Il y a une dizaine d’années, Andreas Courvoisier a proposé de promouvoir une urbanisation verte innovante pour le territoire, rebondissant sur un appel à projets de l’IBA Basel. Cette structure a été créée en 2010 par les principaux acteurs politiques de la région, notamment dans le but d’orienter de manière transfrontalière et à long terme la croissance et l’intégration de la région urbaine. Elle a été soutenue à hauteur de 3,3 millions d’euros par le programme INTERREG Rhin Supérieur. À travers le Parc des Carrières, «il y a une réelle volonté de reconstruire le paysage, de lui redonner sa variété et sa richesse d’antan. Parallèlement, il faut jouer sur cette coexistence entre nature et activité humaine; elle fait partie intégrante du projet et est à l’origine d’une partie de son intérêt.» L’urbaniste cite l’exemple du gravier: «À certains endroits, il est prévu qu’il affleure presque à la surface, car il apporte une chaleur qui plaît à certaines espèces naturelles.»

Andreas Courvoisier et Monica Linder-Guarnaccia © regiosuisse

Un non-lieu en guise de structure

Pour l’IBA Basel, qui supervise plus de trente projets à saute-frontières, le Parc des Carrières constitue à la fois un projet pilote et modèle, «qui doit aider à montrer qu’il est possible d’augmenter la qualité de vie et du paysage grâce aux espaces non bâtis, dans une logique où toutes les parties sont gagnantes, que ce soient les habitants, les agriculteurs, les promoteurs immobiliers, les représentants politiques ou les défenseurs de l’environnement», explique avec enthousiasme Monica Linder-Guarnaccia, la directrice de cette structure dont le slogan est «Au-delà des frontières, ensemble».

À l’image d’Andreas Courvoisier, elle précise qu’il n’est ici ni question de créer un parc urbain avec des pelouses hyper-entretenues, ni, à l’inverse, de prétendre qu’on se trouve en pleine nature sauvage. «Il s’agit d’un modèle alternatif. Nous assumons le fait d’être aux portes de la ville, dans un contexte fortement industrialisé. C’est justement ce qui fait la richesse du projet. Nous avons à la fois la possibilité de sensibiliser à la thématique de la biodiversité et au fait qu’un ‹non-lieu› peut aider à structurer l’aménagement du territoire. » D’ailleurs, le nom même du projet annonce la couleur, puisqu’il évoque à la fois les côtés paysager (parc) et industriel (carrières).

Financement mixte

Sans surprise, deux des principaux défis que représente le projet de Parc des Carrières sont à chercher du côté du financement et de la mise à la même table de tous les acteurs concernés. Le tout «dans un contexte transnational et bilingue», rappelle Monica Linder-Guarnaccia. «Étant donné que l’idée de départ du parc émanait d’un privé, à savoir Andreas Courvoisier, nous avons débuté avec de l’argent privé, mis à disposition par diverses fondations. » Cette manne a financé les études de faisa­bilité du projet, qui, par ricochet, «nous ont permis de montrer aux autorités compétentes à quel point le parc était intéressant, notamment en terme de bassin de population concerné et de résolution des nœuds de communication».

Parmi les bailleurs de fonds de la première étape de réalisation du parc, Mme Linder-Guarnaccia cite la ville de Bâle, la région Grand Est ou encore la Confédération. À noter qu’en 2019, le projet s’est concrétisé grâce à la signature d’un accord-cadre et d’accords bilatéraux entre les différents partenaires publics et privés du projet. À également été créée l’Association pour la promotion du Parc des Carrières, une structure franco-suisse réunissant les principaux acteurs impliqués, à savoir : Saint-Louis Agglomé­ration, Saint-Louis, Hégenheim, le canton de Bâle-Ville, le canton de Bâle-Campagne, Allschwil, le Bürgerspital Basel, KIBAG, EuroAirport et Eurodistrict Trinational de Bâle (avec sa succursale IBA Basel).

© regiosuisse

Un modèle à exporter

« Situé à proximité immédiate de la ville de Bâle, jouxtant des quartiers densément peuplés, le Parc des Carrières profitera pleinement à la population bâloise même s’il se trouve sur sol français », se réjouit Susanne Fischer, qui coordonne le projet pour le canton de Bâle-Ville. «La qualité de vie s’en trouvera augmentée dans l’Ouest bâlois.»

«Le Parc des Carrières constitue un bel exemple de financement mixte », analyse pour sa part Andreas Courvoisier. Il ajoute que les promoteurs du projet ont trouvé un moyen supplémentaire de générer une partie des fonds nécessaires à la suite des opérations. «Une autorisation de sur-remblaiement de 2 m de toute la carrière a été obtenue.» Un concept innovant, qui conforte Monica Linder-Guarnaccia dans l’idée que le Parc des Carrières est un modèle qui peut être reproduit à l’échelle régionale, voire exporté. «Rien que dans la région d’activité de l’IBA Basel, on compte plus de 50 gravières. Le potentiel est énorme!»

iba-basel.net

interreg.ch

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30 ans d’Interreg

Interreg, l’instrument de promotion transfrontalier de l’Union européenne, existe maintenant depuis 30 ans. Des partenaires suisses y ont également par­ticipé depuis les débuts.  Les personnes de Suisse et de l’étranger intervenues au niveau des programmes, des projets et des politiques jettent un regard sur le passé et l’avenir dans la brochure « 30 Jahre Interreg – 30 ans d’Interreg – 30 anni di Interreg ». Elles font part des expériences qu’elles ont faites avec Interreg, de l’importance des différents programmes et des opportunités que la coopération transfrontalière et transnationale continuera d’offrir aux régions à l’avenir.

Télécharger la brochure du 30e anniversaire :
interreg.ch

Pays de l’absinthe

Le numéro 2 de «regioS» (décembre 2009) s’intéressait à l’association Pays de l’absinthe, porteuse d’un projet de valorisation de la fée verte entre le Haut-Doubs et le Val-de-Travers.

Faire la fête et marcher au Pays de l’absinthe

Principal projet porté par l’association Pays de l’absinthe, la « Maison de l’absinthe » a ouvert ses portes en grande pompe à Môtiers en juillet 2014 – de passage dans la région pour sa traditionnelle course d’école, le Conseil fédéral avait participé à la fête. Aujourd’hui, cette institution fait connaître à 12 000 visiteurs par an l’histoire sulfureuse de cet alcool, fabriqué clandestinement entre son interdiction en 1910 et sa réhabilitation en 2005. Une Route de l’absinthe, qui permet de cheminer de Pontarlier au Creux du Van et d’y rencontrer des distillateurs, a également vu le jour, ainsi que des manifestations telles que «Absinthe en fête», équivalent des manifestations caves ouvertes, dont la prochaine édition aurait dû se dérouler en juin 2020.

routedelabsinthe.com

Moins de trafic pendulaire grâce aux espaces de co-working

Raphaël Chabloz

Créer entre 150 et 200 lieux d’ici 2025 couvrant l’ensemble du territoire du Grand Genève et proposant près de 7000 places de travail, utilisées par environ 35 000 clients, c’était l’objectif affiché par «GE-NetWork», deuxième étape d’un projet Interreg visant à développer le télétravail et le co-working au bout du Léman. En 2014, une vingtaine de lieux étaient référencés, il y en avait plus de 50 en 2018. Cependant, ils restaient encore très largement concentrés sur la partie suisse du Grand Genève et au centre de l’agglomération. Les études réalisées lors de la première phase de ce projet montrent que la naissance de ce réseau franco-suisse permettrait de réduire de 6% les déplacements sur l’agglomération – soit près de 12 millions de déplacements annuels. Autre intérêt, dynamiser des régions périphériques. Si les «start-upers» ont déjà l’habitude du télétravail, les grandes entreprises sont encore frileuses. Leur démontrer les avantages de ces nouvelles formes de travail et les accompagner dans ce processus de transformation reste un objectif prioritaire du projet.

Plusieurs solutions sont envisagées pour que les nouveaux lieux soient viables dans les communes périphériques: des partenariats publics-privés, ou des modèles offrant des services en plus de l’offre de co-working. Du côté de collectivités publiques, plusieurs possibilités d’action existent. Les grands employeurs peuvent avoir un rôle d’exemplarité, mener des projets-pilotes. Second levier, la mise à disposition de foncier. Les communes peuvent également investir pour réduire la prise de risques, mais avec à terme l’objectif d’atteindre l’autonomie financière.

interreg.chteletravail-geneve.com«GE-NetWork» dans la base de données des projets sur regiosuisse.ch

Vous trouverez ici la version intégrale en allemand

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